Délégation au maire relative aux marchés publics et transmission des décisions au contrôle de légalité : quelles spécificités ?
Constat : L’article L. 2122-22, 4° du Code général des collectivités territoriales (CGCT) permet au maire, par délégation du conseil municipal, en tout ou partie et pour la durée de son mandat « De prendre toute décision concernant la préparation, la passation, l'exécution et le règlement des marchés et des accords-cadres ainsi que toute décision concernant leurs avenants, lorsque les crédits sont inscrits au budget ».
L'article L. 2131-2, 4°, du même code prévoit en outre que sont transmis au contrôle de légalité « Les conventions relatives aux emprunts, les marchés et les accords-cadres d'un montant au moins égal à un seuil défini par décret, les marchés de partenariat ainsi que les contrats de concession, dont les délégations de service public, et les concessions d’aménagement ».
Une difficulté d'interprétation de cet article peut résulter de la lecture de l'article L. 2131-2.1° du CGCT lequel dispose que sont transmis au contrôle de légalité « Les délibérations du conseil municipal ou les décisions prises par délégation du conseil municipal en application de l'article L. 2122-22 ». Pourtant, aucune disposition législative ou réglementaire voire jurisprudentielle ne prescrit un formalisme particulier.
Qu’en est-il lorsque le maire est décisionnaire pour tous les marchés et notamment ceux dont le montant se situe en-deçà du seuil de transmission ?
Réponse : La doctrine ministérielle apporte un éclairage intéressant. Elle s’appuie les conclusions du commissaire du Gouvernement relatives à l’arrêt Commune de Dunkerque, lesquelles indiquent que « lorsque, comme en l'espèce, le maire prend lui-même la décision de signer, en vertu d'une habilitation réglementaire permanente octroyée par le conseil municipal, il n'est pas possible de distinguer deux actes successifs dans sa décision, et d'exiger de lui qu'il transmette d'abord au représentant de l'Etat une décision qui précéderait la signature effective. Sa décision est une, elle est matérialisée par la signature, et elle est entièrement transmise au préfet par l'effet de la transmission du marché lui-même ». Dans l’affaire en cause, le Conseil d’Etat rappelle ainsi qu’« aucune règle n'impose (...) que la décision de signer le contrat soit elle-même transmise au représentant de l'Etat avant sa signature » dès lors que la décision est matérialisée par la signature.
En d’autres termes, la décision du maire constituée par la signature du contrat n’a pas à être transmise au contrôle de légalité pour acquérir un caractère exécutoire. A l’inverse, cela reviendrait à transmettre le marché et ferait échec à l'application de la dérogation selon laquelle les marchés passés selon la procédure adaptée (pour les marchés publics inférieurs à 221 000 € HT y compris pour les marchés de travaux) sont exonérés de transmission.
Dans ces conditions, il n’est donc pas requis d’adopter une décision formelle antérieurement à la signature du marché par laquelle le maire s'autoriserait lui-même à signer le marché.
Pour mémoire, certains actes doivent faire l’objet d’une transmission au représentant de l’État pour pouvoir revêtir un caractère exécutoire, au nombre desquels figurent tous les marchés publics qui dépassent un certain seuil. Depuis le 1er janvier 2024, ce seuil de transmission des marchés publics est fixé à 221 000 € HT. Il s’apprécie en fonction du montant global de l’opération et non par rapport aux lots. Dans ce cadre, le contrôle de la légalité de la décision du maire n'a d'autre objet que celui de la légalité du marché concerné. Il est à noter que, dans la pratique administrative, certaines collectivités peuvent choisir de prendre une décision distincte aux fins de sécuriser et de garantir la traçabilité des actes adoptés par le maire. En tout état de cause, à chacune des réunions, le maire est toujours tenu d’informer le conseil municipal des décisions qu’il a prises en son nom.
En conclusion, le maire n'est pas tenu de prendre une décision formelle et distincte de l'acte qu'il se propose d'adopter. Sa décision peut donc se matérialiser par la conclusion et la signature du marché. Il est à noter toutefois que le préfet peut, s’il l’estime nécessaire, demander à tout moment la communication des marchés publics ou avenants non soumis à son contrôle. Dans l’hypothèse où le maire déciderait de prendre une décision distincte du marché signé, celle-ci doit être soumise à l'obligation de transmission au titre du contrôle de légalité.
Références juridiques : Articles L 2122-22, L 2122-23, L 2131-2 du CGCT et L 2131-3 du CGCT; Conseil d'Etat, 7 / 5 SSR, du 29 avril 2002, 235708, inédit au recueil Lebon ; Réponse du Ministère délégué aux collectivités territoriales publiée le 25/05/2006 au JO Sénat (Question écrite n°22352) ; Réponse publiée au JO AN le 03/03/2003 (Question n° : 7269 - 12ème législature).
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