Délimitation d’aires d’alimentation de captages : Ecophyto met la main à la poche

La mobilisation de crédits dédiés dans le cadre de la Stratégie Ecophyto 2030 doit permettre d’accélérer la démarche de délimitation des aires d'alimentation des captages en particulier dans les situations de blocage. Une instruction, dévoilée ce 22 novembre, revient sur le modus operandi de ce financement selon différentes modalités, dont l’opportunité est à apprécier localement par les préfets.

"A ce jour, parmi les 1.150 captages prioritaires, environ 150 restent sans AAC [aires d’alimentation de captages] et peu de captages sensibles en sont pourvus, alors que cela constitue la première étape, incontournable, de la démarche de protection", relève le ministère de la Transition écologique. C’est pourquoi en complément de l’offre d'aqua-prêts de la Banque des Territoires et des enveloppes des agences de bassin, la mobilisation de crédits dédiés dans le cadre de la Stratégie Ecophyto 2030 "doit permettre de lever les difficultés rencontrées sur certains captages, qu’elles soient d’ordre financier, politique ou technique", appuie-t-il dans une instruction relative à la prise en charge de la délimitation d’aires d’alimentation de captages, rendue publique ce 22 novembre. 

Le ministère y décrit les modalités d’utilisation par les préfets des crédits versés à cette fin sur le fonds de concours du programme 113 (Paysages, eau et biodiversité) intitulé "contribution à la protection des aires d’alimentation de captage". Lors de la présentation en mars de la feuille de route "captages", le gouvernement tablait sur une enveloppe de 6,5 millions d’euros. Ce sera sans doute sensiblement moins…  "Une somme de 4,8 millions d’euros a été prévue dans la programmation [de cette enveloppe] au titre de 2024 (…). Une enveloppe du même ordre a vocation à être reconduite au moins pour la programmation 2025", souligne l’instruction. "Ces montants peuvent être consommés sur plusieurs années", ajoute-t-elle. Le coût de l'opération de délimitation, qui nécessite l'expertise d'un hydrogéologue, est estimé à 50.000 euros par captage. L'objectif affiché étant de disposer d'une cartographie précise de l'ensemble des captages sensibles, l'enveloppe sera loin d'être suffisante.

L’arrêté définissant les "captages sensibles" toujours attendu

Le fonds de concours est à l’usage des préfets (de région et de département) "pour le financement d’études visant à délimiter les AAC et les zones les plus contributives à la protection du captage, en fonction de l’analyse qu’ils font des difficultés propres à chaque situation locale", indique le ministère. Y sont éligibles les captages prioritaires "ainsi que ceux qui auront été définis comme sensibles en application de l’arrêté à paraître mentionné à l’article L211-11-1 du code de l’environnement". 

Attendue depuis deux ans, la définition des captages sensibles devrait enfin aboutir mais sans doute pas avant la fin du second semestre 2026 (voir notre article du 23 octobre 2025). "En l’attente de cette désignation, les captages identifiés comme sensibles dans les Sdage en vigueur pourront également bénéficier de la mesure", explique l’instruction. 

Quant aux dépenses prises en charge, elles correspondent "au temps de travail d’hydrogéologues et de salariés des bureaux d’études sélectionnés afin de conduire des études de délimitation des AAC". L’instruction revient sur les attendus des études de délimitation conditionnant leur financement. Celles-ci doivent entre autres comprendre, pour appréhender le contexte local et ses spécificités, "le recensement de l’ensemble des informations et données relatives au fonctionnement du captage d’eau potable (et notamment l’ensemble des points de prélèvement concernés par la délimitation) et de la PRPDE [personne responsable de la production et distribution de l’eau]", et notamment l’impact du changement climatique ; "la délimitation de l’aire/du bassin d’alimentation de captage" ; "l’identification cartographique des zones les plus vulnérables à la pollution" ; "la transmission informatique de la délimitation au format Sandre et des zones les plus vulnérables à la pollution" ; éventuellement, "des recommandations pour l’élaboration des plans d’actions". 

Une enveloppe à la main des préfets

Le préfet de département identifie, en lien avec l’agence de l’eau, l’ARS et la DREAL/DEAL, les points de prélèvement qui pourraient bénéficier du dispositif (si possible par ordre de priorité) et veille à la "bonne articulation" des différents financements. Il transmet les points de prélèvement concernés au préfet de région, qui "consolide les demandes", et adresse régulièrement à la direction de l’eau et de la biodiversité (DEB) la liste des captages sur lesquels il sollicite des crédits. 

Une "priorisation" des demandes peut être opérée en fonction des crédits disponibles chaque année. Les crédits sont en principe délégués par la DEB au préfet de région qui est chargé de les attribuer à la PRPDE maître d’ouvrage voire de les déléguer au préfet de département ou de les mobiliser pour le financement d’un marché mis en place par ses services. Le financement de l’étude de délimitation peut ainsi être organisé selon différentes modalités, "dont l’opportunité est à apprécier localement par le préfet", en lien avec l’agence de l’eau et la PRPDE. 

Deux cas de figure sont décrits :

 -soit la PRPDE est volontaire pour porter la démarche de délimitation. Le taux d’intervention des crédits du fonds de concours est plafonné à 75% du coût total des dépenses, rappelle l'instruction. Le complément peut provenir de cofinancements publics, en particulier des agences de l’eau. Ainsi lorsque la PRPDE ne dispose pas des moyens financiers suffisants pour apporter la contrepartie aux crédits de l’agence de l’eau, l’Etat (sur décision du préfet) lui verse une subvention. Et "si nécessaire", un appui technique peut également être apporté à la collectivité, en particulier pour l’élaboration du cahier des charges et le suivi de la réalisation de l’étude. Par ailleurs, dans le cas où le projet ne rentre pas dans le périmètre d’intervention des agences de l’eau, le préfet verse une subvention à la PRPDE, maître d’ouvrage. La contrepartie doit alors être apportée par la collectivité sur ses fonds propres, par un apport financier ou en valorisant le temps de travail des agents impliqués dans le suivi de la démarche. Au besoin, elle peut aussi être apportée par une dotation de soutien de l’Etat à l’investissement des collectivités territoriales (DETR, DSIL) ;

- soit la PRPDE se montre réticente ou s’oppose à engager la démarche ou ne dispose pas de l’ingénierie lui permettant de piloter le marché. Sur décision du préfet, l’Etat se substitue par conséquent à la PRPDE et prend la maîtrise d’ouvrage de l’étude en portant le marché correspondant. "Ce marché peut inclure la délimitation d’une ou plusieurs AAC, au niveau départemental ou au niveau régional si des dispositions sont prises pour coordonner un dispositif à ce niveau", note l’instruction. Et dans ce cas de figure, l’étude est financée à 100% par les crédits du fonds de concours.

 

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