Des sols en mauvais état dans l’UE, peu de perspectives d’amélioration

À en croire la Cour européenne des comptes, il était temps que la Commission européenne présente son projet de directive pour renforcer "la surveillance et la résilience" des sols (voir notre article du 6 juillet). Dans un rapport qu’elle vient de publier ce 10 juillet, la Cour juge en effet que l’action de l’Union européenne en la matière se résume pour l’heure en un sous-titre : "Des normes peu ambitieuses et un ciblage limité". Un diagnostic qu’elle a établi en se focalisant sur deux instruments : la politique agricole commune 2014-2020 d’une part (via la couverture minimale de sols, le travail limité de la terre et le maintien des niveaux de matières organiques des sols) et la directive Nitrates d’autre part. Or aucun des deux n’emporte sa conviction et ce, bien que la Cour estime à quelque 85 milliards d’euros les fonds de la PAC alloués sur cette période à la gestion durable des sols et des effluents. 

Les États membres – dont la France, qui fait partie des États examinés – n’échappent pas à la critique. La Cour observe que la faiblesse de leurs exigences, "qui correspondent souvent aux pratiques agricoles existantes", n’emportent en conséquence que des changements de comportement limités et des améliorations mineures des pratiques agricoles. S’y ajoutent de trop nombreuses dérogations, la Cour relevant par exemple que seules 35% des exploitations françaises étaient tenues d’appliquer les trois pratiques de verdissement (diversification des cultures, maintien de prairies permanentes et surfaces d’intérêt écologique) au cours des années 2017-2019. 

La Cour déplore en outre que les fonds disponibles soient rarement affectés en priorité aux zones connaissant les problèmes les plus criants. Elle préconise en conséquence de les allouer à l’avenir d’une part en fonction de la gravité des problèmes rencontrés, d’autre part en fonction des améliorations visées. Autre lacune décelée, la faiblesse des mesures visant à améliorer la gestion des effluents, y compris dans les zones connues pour avoir un excédent d’azote (il est relevé qu’en Bretagne des mesures ont bien été prévues, mais que les agriculteurs y ont peu souscrit). 

La Cour ne se fait par ailleurs guère optimiste. Elle note que si des améliorations ont été apportées avec la nouvelle PAC 2023-2027, elle les juge insuffisantes pour avoir un réel impact, en visant notamment pour la France l’avis de l’Autorité environnementale (voir notre article du 23 novembre 2021) sur le plan stratégique. Un avis qu’avait en partie repris la Commission européenne, non sans susciter l’ire du ministre français (voir notre article du 2 mai 2022).