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Décentralisation - Economie, emploi : le gouvernement veut muscler les régions

Dans les domaines de l'économie et de l'emploi, l'Etat va transférer "le maximum de compétences" aux régions, a annoncé le gouvernement à l'issue d'une réunion, le 18 février, avec une délégation de l'Association des régions de France. Dans le cadre de la préparation du projet de loi de décentralisation annoncé pour début avril, il est envisagé notamment de transférer la responsabilité de la plupart des pôles de compétitivité.

Les régions vont devenir les véritables "patrons" du développement économique. Le projet de loi de décentralisation qui sera présenté en Conseil des ministres, en principe le 2 avril prochain, va renforcer leurs compétences dans ce domaine, a annoncé le Premier ministre, le 18 février en début de soirée, dans un communiqué faisant suite à une réunion de travail entre huit présidents de région et le gouvernement, qui était représenté par les deux ministres en charge de la décentralisation et le Premier ministre. "Les régions auront vocation à accompagner la croissance des entreprises et à renforcer leur capacité à innover et à exporter", indique le communiqué.
Dans la cour de l'hôtel de Matignon, à l'issue de cette réunion de travail qui a duré près de deux heures, Marylise Lebranchu, ministre de la Réforme de l'Etat, de la Décentralisation et de la Fonction publique, a précisé qu'en matière d'économie et d'emploi, le projet de loi prévoira "un maximum de transferts aux régions". En ajoutant que le gouvernement allait "regarder de près toutes les actions de l'Etat". "En particulier, le Premier ministre, a-t-elle poursuivi, demande maintenant aux ministres concernés, de regarder les transferts de pôles de compétitivité aux régions, avec peut-être quelques exceptions pour des pôles de compétitivité d'ordre mondial ou européen".

Des schémas régionaux opposables

"Il y a un accord entre tout le monde" sur les transferts de compétences dans les domaines de l'économie et de l'emploi, a souligné Marylise Lebranchu. "Ce qui nous intéresse, c'est de bien faire notre job en matière de formation et de développement économique (...) Nous n'avons jamais demandé à exercer des compétences détenues par d'autres collectivités territoriales", a confirmé Alain Rousset, président de la région Aquitaine, qui est aussi à la tête de l'Association des régions de France (ARF). Le gouvernement en a pris acte. "Certaines compétences ne sont pas transférées, on en a largement discuté", a confié la ministre.
Dans un communiqué, l'ARF précise que les régions "souhaitent articuler leurs compétences exclusives autour de quatre grands blocs" : le développement économique ; l’éducation, la formation professionnelle, l’apprentissage et accompagnement vers l’emploi ; la transition énergétique ; enfin, les transports collectifs de voyageurs (hors transports urbains).
La clarification de l'action publique et le renforcement des responsabilités confiées aux régions, deux grands axes de la réforme souhaités par le gouvernement, se traduiront notamment par la consécration de deux schémas régionaux – et deux seulement – qui auront un caractère opposable. Le premier portera sur "le développement économique, l'innovation et l'internationalisation des entreprises". Quant au schéma régional d’aménagement et de développement du territoire, qui existe déjà, il deviendra "un document de planification essentiel qui aura une valeur prescriptive", assure Matignon. "C'est un vrai rôle de cohérence et de coordination donné aux régions", a commenté Marylise Lebranchu.

La coopération interrégionale préférée à une nouvelle carte des régions

Comme l'a souhaité le président de la République lors de sa conférence de presse, le 14 janvier dernier, "davantage de marge de manoeuvre sera conférée aux régions pour qu’elles puissent adapter les règles aux spécificités des territoires", indique le communiqué du Premier ministre.
Mais, selon les présidents de région, Jean-Marc Ayrault n'aurait pas considéré comme "prioritaire" le redécoupage des régions, un autre sujet évoqué par le chef de l'Etat, le 14 janvier dernier. "Ca n'est pas interdit. C'est possible", a commenté Martin Malvy, président de la région Midi-Pyrénées, à l'issue de la réunion. "Cela ne doit pas faire écran à tout le travail qu'on doit mener par ailleurs", a poursuivi François Bonneau, président de la région Centre. Face au Premier ministre, les présidents de région ont pour leur part insisté sur la nécessité de la poursuite du développement de "l'interrégionalité".
En même temps que la question du renforcement des compétences, "il faut regarder la question des ressources", a estimé Marylise Lebranchu, sans en dire plus, compte tenu du fait qu'elle n'a "pas de mandat" sur le sujet. La délégation composée de huit présidents et d'une vice-présidente de région venait de mettre la question sur la table, en demandant le bénéfice d'une part plus importante du produit de la cotisation sur la valeur ajoutée des entreprises (CVAE), un des impôts qui a remplacé la taxe professionnelle.

Pour une nouvelle donne fiscale

"Nous avons la responsabilité du développement économique, mais les retombées de l'investissement dans le développement économique sont sur les agglomérations et sur les départements", a avancé Alain Rousset devant le Premier ministre. Compétentes en matière d'aides directes aux entreprises, "les régions françaises accompagnent deux à trois fois moins les PME que les régions allemandes", a-t-il par ailleurs souligné, pour justifier l'octroi de ressources supplémentaires aux régions.
En 2013, la CVAE a généré 16,3 milliards d'euros de recettes au profit des collectivités, dont 25% pour les régions, mais 48,5% pour les départements et 26,5% pour les communes et intercommunalités. Comme le gouvernement écarte toute hausse de la pression fiscale, la demande de l'ARF suppose une "réorganisation de la fiscalité", en mettant en cohérence les compétences et les ressources des collectivités, a admis Alain Rousset. Les présidents de région ont encore proposé l'affectation à leur échelon de recettes de versement transport, ou d'une partie des recettes de TVA.
"On est rentré dans un choix de décentralisation, un choix de lisibilité des compétences, de simplification, d'efficacité, d'économies, de responsabilité pour nous", s'est félicité Alain Rousset. Mais "il reste beaucoup de travail", a estimé Marylise Lebranchu. Le Premier ministre poursuit les consultations sur le projet de loi de décentralisation, en recevant ce 20 février une délégation de l'Assemblée des départements de France (ADF). L'Association des maires de France (AMF) sera à son tour reçue le 27 février.
 

 

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