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Sport - En Loire-Atlantique, les communes jouent collectif pour acheter leurs équipements sportifs

Un esprit "jouer collectif" habite les élus aux sports de Loire-Atlantique, dont le premier des buts est de réaliser des économies, mais pas que... L'aventure commencée en 2014 avec l'initiative de Camille Autrusseau est avant tout humaine. L'adjoint au maire de Bouaye chargé des sport a fait, depuis, des émules et les communes du 44 mettent aujourd'hui leurs compétences en commun. Les fournisseurs ont joué le jeu. Reste aujourd'hui le possible objectif de mutualiser l'entretien et l'achat de matériel à une échelle toujours plus grande.

Pendant près de quarante ans, le Football Club de Nantes a été reconnu pour la qualité de son jeu collectif, tout simplement surnommé "jeu à la nantaise". Et cela a payé : il détient avec sept titres de champion de France l'un des plus beaux palmarès du football français. S'il a déserté la pelouse du stade de La Beaujoire depuis quelques saisons, il semble que cet esprit collectif habite aujourd'hui les élus aux sports de Loire-Atlantique…
En 2014, Camille Autrusseau, adjoint au maire de Bouaye chargé des sports, s'est demandé pourquoi une commune ayant des besoins d'investissement ou de rénovation pour ses équipements sportifs ne regardait pas ce qu'il se passait chez ses voisins. "On a tendance à travailler en silo", commente ce jeune élu qui a eu l'idée de briser les habitudes pour mettre en place ce qu'il appelle "une intelligence collective". "L'idée était de dire : si moi, aujourd'hui, j'ai des besoins, mes collègues en ont aussi. Donc arrêtons de travailler chacun pour soi, et essayons de travailler pour les habitants au sens le plus large possible", explique Camille Autrusseau.
Cela a commencé par un groupe de travail réunissant les élus d'une dizaine de communes du sud de l'agglomération Loire-Nantes métropole. Voyant que les choses tournaient bien, que les besoins en termes d'équipements sportifs étaient les mêmes pour tous, Camille Autrusseau contacte ensuite les 220 communes du département pour réaliser un état des lieux. "J'ai proposé à tous les élus aux sports de Loire-Atlantique de mettre leurs projets jusqu'à 2020 dans un tableau Excel, explique l'élu de Bouaye. Certaines communes n'avaient pas de projet à ce moment, d'autres nous ont fait part de leur projet avec un réel intérêt." Résultat, aujourd'hui, soixante-dix communes participent activement au groupement.

Mettre des compétences en commun

Parmi celles-ci, la commune de Saint-Brévin-les-Pins. "Nous avons eu vent de cette initiative lors d'une réunion des services techniques de notre intercommunalité", explique Thierry Deville, adjoint au maire de Saint-Brévin chargé des sports. Et cela tombait bien : Saint-Brévin avait pour projet de réaliser un terrain de football synthétique. La solution est donc toute trouvée : cet achat se fera par le biais d'un groupement de commandes informel réunissant quatre communes du pays de Retz ayant le même besoin. Parmi elles, Saint-Brévin est retenue pour être le pilote de l'opération. C'est là une des originalités de l'ambition portée par Camille Autrusseau : il ne s'agit pas uniquement de se regrouper pour peser économiquement face à un fournisseur, mais aussi de mettre des compétences en commun. "Les quatre communes n'étant pas de même taille, elles n'avaient pas la même capacité technique, juridique et de réponse aux obligations réglementaires, commente Thierry Deville. Nous avions un besoin d'expertise et Saint-Brévin étant la commune la plus importante, il était intéressant qu'elle s'empare de la compétence pour le compte des quatre autres. Nos agents ont donc conduit l'opération."
Un autre aspect intéressant du "jeu à la nantaise" par les collectivités territoriale est de faire visiter l'existant à ceux qui ont des projets. "Une commune faisait refaire le sol d'un équipement sportif, raconte Camille Autrusseau. Nous lui avons fait visiter quatre salles avec des typologies de sols différents. A l'occasion de son appel d'offres, cela lui a permis de savoir exactement ce qu'elle allait acheter. C'est vraiment une plus-value pour un élu. Cela permet d'interroger les sportifs sur ce qu'ils aiment, d'envisager l'entretien et les charges avec les services techniques."

250.000 euros d'économies pour un terrain

Mais bien entendu, l'intérêt principal d'un tel groupement est d'abord économique. "On arrive à près de 250.000 euros d'économies pour notre seul terrain et ses accessoires sur un budget initialement prévu d'environ 800.000 euros", se félicite Thierry Deville. Pour parvenir à un résultat aussi spectaculaire, il faut que les fournisseurs jouent le jeu, regroupent leurs équipes et leurs machines pour mener de front plusieurs chantiers en même temps et réaliser ainsi d'importantes économies d'échelle. "C'est une commande, donc les fournisseurs ne peuvent voir notre initiative que d'un bon œil, juge l'élu de Saint-Brévin. Mais ils doivent rester vigilants, car s'ils perdent une commande pour notre groupement, c'est quatre terrains d'un coup qu'ils perdent." Pour Camille Autrusseau, la relation avec les fournisseurs dans ce nouveau schéma doit être basée sur la confiance : "Quand une entreprise annonce un prix, il faut que cela soit le juste prix. Or certains ne sont pas intéressés. Ceux qui n'ont pas de concurrence font ce qu'ils veulent, même si nous sommes vingt communes à venir les démarcher. Pour d'autres entreprises, la crainte est de ne pas pouvoir faire le prix à la tête du client comme elles en ont l'habitude."
Au-delà des résultats économiques, les élus locaux se félicitent encore de la méthode pour ce qu'elle leur apporte humainement. "Il en est ressorti une accentuation des relations intercommunales au niveau des services et des élus. Cela m'a permis de côtoyer des élus que je ne connaissais pas ", raconte Thierry Deville. "On a créé un réseau de confiance entre élus, se félicite Camille Autrusseau. Aujourd'hui, quelles que soient les couleurs politiques, on parle avant tout entre élus du sport. Nous n'avons pas peur d'évoquer nos projets, de nous dévoiler. On a vraiment réussi à créer une intelligence collective."
Comme le ballon au temps glorieux du grand FC Nantes, les idées continuent de circuler et ne s'arrêteront pas avant d'avoir atteint leur but. Le prochain match pourrait concerner la mutualisation de l'entretien et de l'achat de matériel à une échelle toujours plus grande. Un groupement d'une centaine de communes est par exemple envisagé pour l'achat de peinture. Camille Autrusseau, référent Andes (Association nationale des élus en charge du sport) dans son département, pense même à faire jouer la France entière. "L'idée est de travailler avec nos collègues référents dans chaque département pour leur permettre de mettre cela en place s'ils le souhaitent. Tout le monde peut s'en saisir", conclut-il.

 

 

 

 

 

 

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