Etablissements scolaires : plus de 1,7 million d'élèves soumis à une forte "pression pesticides", selon un baromètre
Plus de 1,7 million d'élèves sont scolarisés dans un établissement "soumis à une pression forte" aux pesticides "dans un rayon de 1.000 mètres", selon un baromètre coordonné par Le Monde et une dizaine d'experts publié ce 17 décembre.
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Présenté comme une "cartographie inédite", le "baromètre de la pression pesticides autour des établissements scolaires", publié par Le Monde ce 17 décembre, a été "conçu pour éclairer le débat public" et "non comme un diagnostic toxicologique ou sanitaire", prévient le quotidien qui l’a coordonné avec une dizaine d’experts.
Selon les chiffres, "au moins 1,76 million d'élèves (environ 15% des effectifs, hors outre-mer) sont scolarisés dans des établissements soumis à une pression forte dans un rayon de 1.000 mètres - comme si chacun des 314 hectares entourant l'école avait reçu au moins un traitement de pesticides à pleine dose par an". D'après le journal, "un site scolaire sur quatre est concerné par une telle exposition potentielle".
Ce baromètre est construit à partir du registre parcellaire graphique et de l'indice de fréquence de traitement (IFT) associé aux cultures présentes dans un rayon de 1.000 mètres autour de chaque école, collège ou lycée, géolocalisés grâce à la base de données de l'Institut national de l'information géographique et forestière (IGN). L'IFT "est utilisé comme indicateur de pression d'usage des pesticides, et non comme indicateur de risque sanitaire ou d'impact environnemental", prévient la méthodologie détaillée.
Les cartes révèlent ainsi une "pression pesticides" hétérogène. Les collèges et lycées apparaissent un peu moins exposés, car plus souvent situés en zones urbaines, éloignées des champs. Les écoles particulièrement exposées se trouvent d’abord dans les bassins viticoles - Cognaçais, Gironde, Champagne… En septembre dernier, l'étude PestiRiv, menée par Santé publique France et l'Agence nationale de sécurité sanitaire de l'alimentation, de l'environnement et du travail (Anses), avait déjà conclu que les riverains des vignes étaient plus imprégnés par les pesticides que les autres Français, avec une surexposition des enfants de 3 à 6 ans. L’étude publiée par Le Monde montre que les écoles exposées sont également nombreuses dans les secteurs d'arboriculture fruitière mais aussi dans les plaines céréalières, notamment dans le nord de la France.
"Cela ne signifie pas que chaque enfant est en danger", précise Karine Princé, chargée de recherche au centre d'écologie et des sciences de la conservation du Muséum national d'histoire naturelle, citée par Le Monde. Mais, selon elle, "cela montre que réduire l'usage des pesticides autour des écoles doit devenir une priorité, et que des politiques publiques plus ambitieuses sont nécessaires pour protéger les enfants là où ils vivent et apprennent".
Pour faire baisser la pression, les auteurs de l’étude citent plusieurs "leviers complémentaires". A court terme, le dialogue local - échanges entre parents d’élèves, collectivités et agriculteurs, information en amont des traitements, adaptation des horaires ou des matériels pour limiter la dérive des pulvérisations hors des champs (sous l’effet du vent par exemple) – est jugé "central". A moyen terme, les experts recommandent de réduire l’usage de pesticides à proximité des écoles, d’élargir les zones non traitées et d’accompagner les changements de pratiques agricoles (agriculture biologique, diversification des cultures, plantation de haies, délimitation de bandes enherbées). Les collectivités peuvent aussi orienter les usages du foncier (obligations ou baux environnementaux), agir sur les plans locaux d’urbanisme et passer par des mécanismes d’indemnisation aux agriculteurs pour services environnementaux. Un guide qui leur est spécialement destiné a été publié par l'organisme Plante & Cité en mars dernier.