Aubagne relance son agriculture périurbaine (13)
Face au déclin des exploitations et aux défis de souveraineté alimentaire, la ville d’Aubagne déploie une politique agricole volontariste, avec le projet du Camp de Lambert. Là, elle soutient l'installation de jeunes exploitants, et démontre la viabilité d'une agriculture périurbaine bio et en circuits courts.
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C’est une tendance implacable. Le nombre d’exploitations agricoles ne cesse de diminuer depuis les années 1980 en Provence-Alpes-Côte d’Azur. D’après la direction régionale de l’alimentation et de la forêt (Draaf), le département des Bouches-du-Rhône a ainsi vu le nombre de fermes chuter de 61 % sur son territoire, entre 1988 et 2020. Voilà pourquoi la commune d’Aubagne, qui compte 70 % de sa superficie en territoire naturel ou agricole, se mobilise depuis plusieurs années. « Face à ce constat, la ville entend protéger le foncier existant et mobiliser de nouvelles terres productives pour préserver une souveraineté alimentaire », explique Mathieu Hermant, conseiller municipal à l'agriculture.
De l’accompagnement avant tout
Le projet du Camp de Lambert, porté par Aubagne est destiné à développer une agriculture bio en circuits courts. La commune, avec le conseil départemental et la Société d'aménagement foncier et d'établissement rural (Safer), a acquis 15 hectares. Ces terres sont mises à disposition de six jeunes agriculteurs via des baux ruraux, signés en 2023, avec un loyer symbolique d'environ 100 euros par an, la ville privilégie ici le soutien aux exploitants. « Le but n'est pas de faire de l'argent mais d’accompagner ces installations », commente Mathieu Hermant. Les bénéficiaires ont été choisis en fonction de la diversité des productions bio qu’ils envisageaient : maraîchage, verger, plantes, œufs, volailles et huile d’olive.
La ville a investi dans les infrastructures essentielles (eau, électricité, locaux) et un partenariat avec la chambre d’agriculture, la Safer et le Centre d'études techniques agricoles (Ceta) du Pays d'Aubagne permet d’assurer l'accompagnement technique et économique des jeunes agriculteurs sélectionnés. Le financement combine les efforts de la ville d'Aubagne et du conseil départemental (via l’acquisition et des aides aux exploitants de type fonds départemental de gestion de l’espace rural), complétés par des dispositifs européens et régionaux, notamment la dotation jeune agriculteur .
Une opportunité saisie
« C’est une opportunité foncière qui a permis de concrétiser cette ambition », souligne Mathieu Hermant, rappelant que la ville a saisi une opportunité rare, à savoir la vente d’un terrain de 15 hectares. Pour l’emporter, la ville qui était en recherche active, s’est associée à des acteurs agricoles locaux pour monter un projet structuré. « Nous avons mis en avant l'installation de jeunes agriculteurs, la redynamisation d'une zone agricole en jachère, l'accompagnement et le soutien d'une commune sur des projets de cette envergure », poursuit l’élu.
Les agriculteurs installés ont réalisé leurs premières ventes en 2024 et s'investissent collectivement pour l’irrigation, les serres et les haies. Les ventes de paniers dépassent déjà les attentes. Mais des défis restent à relever. « La gestion leur appartient, mais cela peut être compliqué en raison des éventuels départs ou des investissements à réaliser », admet Mathieu Hermant. Pour favoriser le circuit court, des études sont en cours pour installer un lieu de vente sur place.
Pour Mathieu Hermant, la réussite repose surtout sur la « volonté politique d'installer de nouveaux agriculteurs et de reconquérir des terres agricoles laissées en jachère ». Cela nécessite une démarche proactive d’identification du foncier, un accompagnement global (technique, administratif et financier via un faible loyer et des aides) et des partenariats solides et un projet convainquant pour la Safer.
Des perspectives
Parmi les pistes d’évolution : le point de vente du Camp de Lambert est ainsi à l’étude, et un diagnostic va être réalisé sur les 900 hectares de zones agricoles de la commune. Cette démarche s'inscrit dans le Projet Alimentaire Territorial (PAT) de la Métropole de Aix-Marseille-Provence, qui promeut le « bien manger en Provence ». Comme l’explique Gérard Gazay, maire d’Aubagne, l’objectif « est de pérenniser une agriculture rémunératrice et durable, pourvoyeuse de productions de proximité diversifiées et de qualité ». La stratégie inclut la modernisation de l'irrigation, un marché de producteurs créé en parallèle avec 20 producteurs locaux, une restauration collective locale et un soutien aux familles en précarité. De quoi remettre l'agriculture au cœur de la sécurité alimentaire et la placer comme levier de croissance et d'indépendance, en favorisant le bio et la consommation locale.
Chiffres clés du projet du Camp de Lambert
- 1,5 million d’euros pour l’acquisition du terrain, par la ville avec une aide du département et de la Safer
- 68 000 euros investis par la ville pour les travaux d'aménagement du site, incluant l'alimentation en eau, le raccordement électrique, et les locaux
- 30 420 euros dépensés par la ville pour l'accompagnement technique et économique des agriculteurs, assuré par la chambre d'agriculture
- 6 jeunes agriculteurs installés sur le site, sélectionnés parmi 42 dossiers de candidature reçus
- 100 euros de loyer mensuel pour chaque agriculteur installé
Commune d’Aubagne
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