Quand du foncier initialement destiné à l’urbanisation devient agricole et bio (76)
Sur un plateau agricole initialement destiné à l'urbanisation, la mairie de Gonfreville l'Orcher installe depuis 2019 un espace naturel et agricole bio de 35 hectares. Mise à disposition à des agriculteurs locaux de terres agricoles labellisées bio, espaces loués au golf en gestion sans pesticides, verger municipal, reboisement, espace maraîcher à venir pour alimenter la cantine municipale. Dans ce projet, la collectivité a embarqué plusieurs partenaires locaux vers une gestion plus durable.

© Gonfreville l'Orcher
Du lin, des pommes de terre et bientôt de la bière artisanale et des pommes bio « Made in Gonfreville ». Sur le plateau de Bévilliers qui comptait 35 hectares laissés à l'abandon, la mairie a lancé une démarche vertueuse en 2019. « Même s'il n'a quasiment jamais cessé d'être un secteur agricole, ce plateau était classé en zone à urbaniser, certains ont même imaginé un temps y implanter une prison », explique Alban Bruneau, maire de Gonfreville l'Orcher, commune limitrophe du Havre. À son élection en 2017, le maire fait prendre au foncier un virage à 180 degrés, portant l'idée de cultiver des produits agricoles locaux sur cette propriété communale. « Dans la métropole Le Havre-Seine, la production maraîchère locale ne couvre que 2 % des légumes consommés. Nous souhaitions augmenter la part de produits locaux dans l'assiette des enfants des écoles et des personnes âgées hébergées en résidence sénior », ajoute le maire.
Un plateau certifié en bio
« Nous avons commencé par faire certifier ces terrains en agriculture biologique : une étape relativement simple car ils étaient en friche depuis longtemps », indique le maire. Une étude d'avant-projet menée par la Chambre d'agriculture de Seine-Maritime a permis de dimensionner les besoins et de positionner le futur espace maraîcher de 6 hectares et un verger municipal d'un hectare. Puis la commune a commencé à aménager : plantation de miscanthus (plante rhizomateuse proche du bambou) pour limiter l'érosion des sols, plantation de haies séparatives pour s'isoler de l'axe routier, création d'un talus pour préserver les plantations des vents d’ouest dominants, reboisement d'une partie du site avec les enfants des écoles. La mairie a également planté un verger municipal d'un hectare : pommiers, pruniers et cerisiers produiront leurs premiers fruits en 2027. Et le PLUi bientôt arrêté va définitivement ancrer le secteur en zone agricole.
Des partenaires locaux pour faire vivre le plateau
« Au tout début, les agriculteurs ne voyaient pas notre projet d'un très bon œil. Mais nous n'avions pas besoin de toute la surface ; nous leur avons donc proposé de leur louer une partie du site », poursuit l'édile municipal. Seule condition : cultiver les 10 hectares en bio. « Nous leur avons ainsi donné l'occasion de découvrir ce mode de culture alternatif qu'ils ne pratiquaient pas encore. » Le plateau de Bévillliers jouxte également le golf du même nom, qui cherchait à s'agrandir : « Nous leur avons loué 10 autres hectares, ce qui leur a permis d'engager la certification de l'ensemble du golf pour une activité respectueuse de l'environnement puisqu'ils n'arrosent pas non plus : nous sommes en Normandie ! » Le dernier partenaire s'est installé en 2023 : il produit du houblon à bière sur 2 hectares : « Il dispose d'un bail à clauses environnementales de vingt-cinq ans pour créer son activité, à la suite d’un licenciement », souligne l'élu.
L'espace maraîcher : de la régie à l'accueil d'un maraîcher indépendant
« Pour le volet de production maraîchère, nous avons d'abord regardé ce qui se faisait ailleurs, notamment chez les pionniers de Mouans-Sarthoux », indique le maire. Mais le principe de la régie apparaît rapidement trop contraignant : « Nous nous sommes finalement rattachés à la dynamique engagée en 2022 avec Le Havre Seine Métropole et la création de la Société coopérative d’intérêt collectif Ceinture verte, qui soutient l'installation de maraîchers sur le territoire » 1. Avec cette SCIC, la mairie travaille depuis un an à concevoir un outil de production clé en main avec forage, système d'irrigation, bâtiments et serres. La municipalité pourrait ensuite louer les terres communales à cette coopérative, qui se chargera d'équiper le terrain, de trouver des candidats maraîchers et de les accompagner les trois premières années. « Concernant le verger, nous ne savons pas encore si nous allons l'inclure dans le bail : il faut que nous ayons un certain retour sur investissement en récoltant. »
Une démarche primée
« Notre grande réussite pour l'instant, c'est d'avoir embarqué notre environnement direct vers le bio et un travail respectueux des terres, souligne le maire. Notre démarche a d'ailleurs été primée par l'association Un+bio, fin 2021. Mais je serai totalement satisfait quand nous aurons enfin trouvé un maraîcher professionnel solide, à même de produire notamment pour notre cuisine centrale. »2 Sur la commune voisine de Montivilliers, la SCIC Ceinture verte accueille déjà un maraîcher et une ferme est aujourd’hui disponible. C'est le même objectif qui est visé à Gonfreville l'Orcher, d'ici deux ans environ. « Finalement, les maraîchers, c'est un peu comme les médecins généralistes : sans la dynamique publique, c'est compliqué d'y arriver ! », conclut le maire.
1 La Société coopérative d’intérêt collectif la ceinture verte
2 Un+Bio
Le projet en quelques chiffres
- 35 hectares certifiés bio par Ecocert, dont 10 cultivés en bio par deux agriculteurs (lin et pommes de terre)
- 10 hectares mis à disposition du golf
- 2 hectares en bail rural à clauses environnementales pour culture de houblon et production de bière normande
- 6 hectares pour du maraîchage bio à venir
- 1 hectare de verger communal
- 1 hectare reboisé
- 3 hectares « libres » : herbage, espace à reboiser
125 000 euros : coût global d'aménagement du site (reboisements, création de haies, aménagement d'hydraulique douce pour éviter érosion, création d'un talus), autofinancé à 93 % par la commune. 8 280 euros : subvention obtenue du conseil départemental de Seine-Maritime pour le reboisement.
La communauté urbaine Le Havre Seine Métropole a pris en charge la réalisation d’une haie de 300 mètres dans le cadre de l’aménagement du dispositif d’hydraulique douce.
- 20 000 euros : le coût de plantation du verger communal (100 arbres fruitiers)
- 7 500 euros : coût de l'étude Chambre d'agriculture pour dimensionner l'exploitation maraîchère
- 1 800 euros de loyers agricoles annuels perçus, une convention avec le golf est en cours de discussion après une période de mise à disposition gracieuse.
Commune de Gonfreville l'Orcher
Nombre d'habitants :
Bruneau Alban
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