Saint-Just-en-Bas: une opération maisons ouvertes pour sauver l'école (42)

Dans le département de la Loire, Saint-Just-en-Bas est un village de moyenne montagne, situé à une centaine de kilomètres de Lyon et de Clermont-Ferrand. La ville la plus proche, Montbrison (15 943 habitants), est à une trentaine de kilomètres. Fin 2017, le conseil d'école alerte la mairie d’une baisse des effectifs. L’école accueille 24 enfants de Saint-Just-en-Bas et de la commune voisine, Palogneux (80 habitants), dans deux classes. Les deux communes sont en regroupement pédagogique intercommunal (RPI) depuis longtemps. Des solutions doivent être trouvées pour sauver les deux classes : un regroupement pédagogique avec une troisième commune obligerait les écoliers à parcourir jusqu’à 34 km en transport scolaire. La commune est étendue et possède des hameaux éloignés du bourg, les communes voisines sont situées à une dizaine de kilomètres. En 2019, l’école a été sauvée d’une fermeture imminente grâce à une mobilisation exceptionnelle des parents, de tous les élus et notamment grâce à une opération de promotion du village.

Recenser les logements vacants

« Une école, c'est essentiel pour une petite commune comme la nôtre, témoigne Nicole Ferry, adjointe et maire lors du précédent mandat. Au-delà d’une école, c’est tout le village qui est menacé. » La mairie et les parents d’élèves se mobilisent. Début 2018, la mairie organise une réunion publique. La solution est simple : accueillir de nouvelles familles sur le territoire. « Très vite, l'idée de proposer des logements vacants à de nouvelles familles a été émise. » Un travail de recensement est mené auprès des habitants et des propriétaires de résidence secondaire. Le village compte une vingtaine de logements vacants. Une fiche descriptive est réalisée pour chaque logement.

La commune dispose de 2 logements inoccupés au-dessus de la mairie, ils seront proposés à la location. La collectivité engage des travaux de rénovation complète de l’ex-presbytère. Un duplex et un logement accessible aux personnes à mobilité réduite seront bientôt disponibles. « Cela facilitera l’implantation de jeunes ménages qui pourront, plus tard, acheter ou faire construire sur la commune ».

La promotion du village à grande échelle

« Il est difficile de toucher des publics en dehors de notre village, explique l’élue. Nous n’avons pas d’agence immobilière ou de bailleur social sur le territoire. » La mairie endosse le rôle d’agence immobilière. L’opération Maisons Ouvertes est lancée sur les deux villages, Saint-Just-en-Bas et Palogneux, avec des habitants comme ambassadeurs. L’idée est de mettre en lien les locataires et les acquéreurs avec les propriétaires. Un film de promotion est réalisé bénévolement par un parent d’école, puis posté sur les réseaux sociaux. Sur les abords du village, on peut lire le slogan « Saint-Just-en-Bas, c’est trop sympa, Palogneux, y a pas mieux ! ». S’ensuivent des reportages sur une chaine locale puis nationale. « On ne s’attendait pas à autant de retombées médiatiques », s’étonne encore l’élue. Les villages reçoivent aussi la visite de Pierre Bonte et de Céline Blampain, deux grands défenseurs de la ruralité.

Maisons ouvertes contre fermeture d’école

En mars 2018, deux journées de découverte du cadre de vie s’organisent à Saint-Just-en-Bas et à Palogneux, en collaboration avec l’association des parents d’élèves, le Sou des écoles. Une quinzaine de logements sont proposés à la location et à l’achat, tandis qu’un terrain communal à construire est proposé à la vente. Les élus et les parents d’élèves font visiter leur village à une vingtaine de ménages. Le parcours comprend l’école, la médiathèque, le café-restaurant multiservice, le terrain multisport, les panoramas et les logements vacants. À cette occasion, un an de transport scolaire est offert pour un enfant scolarisé par la commune de Palogneux.

Une troisième journée découverte des villages est également organisée en novembre 2018.

Les nouvelles installations

L’opération Maisons ouvertes est un succès et se solde par 10 transactions de vente. Les deux villages gagnent plus d’une dizaine de nouveaux foyers. Ces nouveaux habitants, venus du nord de la France, du sud ou de la région s’installent et certains créent des activités. Le village connaît de nouvelles installations : en 2019 une scierie, en 2020 une fabrication artisanale de biscuits, une société d’accessoires de levage et de chargement. Il y a eu 5 installations agricoles en 2019 et 2020. À la rentrée de septembre 2018, l’école passait de 24 à 28 élèves mais perdait une classe. « Nous sommes allés au tribunal pour demander la réouverture de la seconde classe », témoigne l’élue. Quelques jours après la rentrée, l’inspection d’académique acte la réouverture de la deuxième classe.

Saint-Just-en-Bas et Palogneux deviennent des symboles de communes qui se battent pour attirer de nouveaux habitants et garder leur école. Malgré son succès, l’opération n’a pas été réitérée. En 2020, à l’issue des confinements liés à la pandémie Covid-19, de nouveaux habitants font le choix de s’installer dans le village. Entre-temps, deux familles venues avec l’opération Maisons ouvertes sont reparties. « Les actifs sont plus frileux car cela demande à repenser le travail, à faire du télétravail ou à créer une nouvelle activité, explique l’élue. En zone rurale, la mobilité est une problématique importante. Il ne faut pas idéaliser la vie à la campagne. Pour certains citadins, c’est parfois difficile… Mais pas pour les autres, conquis ! »

À l’heure du bilan

« Notre village se repeuple. Depuis le confinement, d’autres personnes sont venues s’installer ou ont acheté pour une résidence secondaire. Il y a même eu une construction de maison individuelle dans un hameau. Certains jeunes qui ont grandi au village reviennent, car ils ne souhaitent plus habiter en ville. Dans les hameaux, toutes les maisons sont vendues. Il reste encore de rares terrains constructibles mais le nouveau règlement d’urbanisme, avec la lutte contre la consommation foncière et l’artificialisation des sols, va limiter le développement de la commune.

Ce n’est normalement pas le rôle d’une commune d’être agent immobilier mais dans les petites communes, on fait de tout ! »