Face au "tout-voiture", le Forum Vies mobiles présente son "système alternatif de mobilité"

Le Forum Vies mobiles, un think tank expert de la mobilité, a présenté ce 16 septembre les résultats d’une étude menée pendant deux ans sur sept départements pour évaluer un "système alternatif de mobilité" (SAM) "plus inclusif, plus écologique et cinq fois moins coûteux que le système voiture actuel" qui pourrait être mis en place rapidement en s’appuyant sur les infrastructures existantes.

"Et si la France pouvait se passer de voiture ?" En posant la question, le Forum Vies mobiles ne craint pas de répondre par l’affirmative. Il se fonde pour cela sur les résultats d’une étude sur la faisabilité technique et le coût d’un "système alternatif de mobilité" (SAM), qu’il a présentés ce 16 septembre. L'étude a été menée pendant deux ans avec les bureaux d’étude Vizea et BL évolution qui ont dessiné et chiffré le système sur sept départements représentatifs du territoire métropolitain et de sa diversité (Ille-et-Vilaine, Mayenne, Loiret, Meurthe-et-Moselle, Hautes-Alpes, Creuse et Gironde). Un chiffrage national a ensuite été réalisé à partir de ces sept territoires.

Modèle dominant jugé "à bout de souffle"

Le think tank pointe d'abord un modèle du tout-voiture "excluant et insoutenable". Si en dehors de quelques centres-villes, il est devenu presque impossible de se passer de voiture, "seulement 18% des conducteurs affirment pouvoir utiliser leur voiture librement (soit 12% de la population totale), sans subir aucune entrave", souligne l’étude. "Le prix de l’essence, les réparations, la fatigue, la météo, l’hostilité de la nuit, la peur de ne pas trouver de stationnement, sans compter le stress de la circulation : autant d’obstacles qui s’additionnent faisant du système automobile un chemin pavé de renoncements", énonce-t-elle. Et ce n’est pas tout. "L’omniprésence de la voiture dans l’espace public interdit également aux enfants de se promener dans la rue sans danger, aux piétons de flâner dans un espace apaisé, aux cyclistes de se déplacer sereinement et aux non-cyclistes d’oser s’y mettre", poursuit-elle. 

Ce modèle est aussi "insoutenable écologiquement et économiquement", estime l’étude, l’automobile représentant à elle seule 16% des émissions de CO2 nationales. Elle est également à l’origine de nombreuses nuisances, poursuit-elle : pollution atmosphérique et sonore, sédentarité, dégradation des cadres de vie et des écosystèmes, occupation de l’espace, étalement urbain, accidentologie ou encore stress. "Autant d’externalités négatives qui se chiffrent en dizaines de milliards chaque année pour la société", soutient l’étude. Ainsi, "lorsqu’on additionne l’ensemble des coûts privés et collectifs, dont les externalités négatives, liés au ‘système voiture’ seulement, on atteint un total de 305 milliards d’euros par an. C’est 10% du PIB national", rapporte l'étude.

Trois conditions pour assurer une "assurance mobilité" pour tous

Face à ce modèle, le Forum Vies mobiles affirme que l’on peut "dès maintenant mettre en place et faire fonctionner un système alternatif de mobilité qui apporterait une véritable ‘assurance mobilité’". Mais "pouvoir se déplacer librement en France sur tous les territoires à toute heure et sans voiture sera possible (…) à certaines conditions qui relèvent de choix politiques structurants", prévient-il. La première repose sur "un réseau ferroviaire entretenu et rénové pour une offre cadencée de trains du quotidien, à la demi-heure dans la journée et à l’heure la nuit et une desserte en transports collectifs cadencée sur route au minimum à la demi-heure en journée et à l’heure la nuit : bus cadencés dans les agglomérations et cars cadencés dans les milieux moins denses et les polarités secondaires pour une desserte fine de tous les territoires, tous les jours de la semaine." La deuxième condition posée par les experts du Forum Vies mobiles serait de "libérer près de la moitié des routes locales de l’emprise de la voiture : 20% pour un réseau cyclable et piéton continu et sécurisé, en ville comme à la campagne et 23% où la priorité sera systématiquement donnée aux transports collectifs". Troisième condition : "harmoniser et intégrer l’offre, l’information et la billettique à l’échelle nationale pour rendre le réseau lisible et simple d’utilisation pour tous et garantir une véritable intermodalité".

Une alternative cinq à six fois moins coûteuse que le "système voiture" actuel

Le SAM serait aussi largement moins coûteux que le modèle actuel, fait valoir le Forum Vies mobiles. "Si l’on considère l’ensemble des coûts composant ce nouveau système de mobilité, et qu’on leur applique, en fonction de leur nature, une durée d’amortissement prudente (10 à 15 ans pour les infrastructures dédiées au vélo et à la marche, 15 à 20 ans pour celles destinées aux réseaux de bus et de cars et 30 ans pour les infrastructures ferroviaires), on peut estimer le coût annuel de ce système à environ 60 milliards d’euros", "soit cinq à six fois moins que le système voiture actuel". Pour l’environnement, le gain serait "massif", anticipent les experts, avec "une réduction a minima de 70% des émissions de gaz à effet de serre liées aux déplacements des personnes". "Au-delà des potentielles économies pour les ménages et les collectivités (achat et/ou entretien des véhicules et des infrastructures), une grande partie des externalités négatives dont le système voiture est à l’origine (pollution, bruit, congestion…) disparaîtraient quasi intégralement, représentant à elles seules, avec une estimation très prudente, 70 milliards d’euros chaque année", fait valoir le think tank, qui y voit aussi "l’assurance d’une plus grande autonomie stratégique pour le pays" avec "moins de dépendance au pétrole, aux métaux critiques pour les batteries, et aux industries automobiles étrangères".

Des expérimentations à mener 

Alors que le débat public s’intensifie autour des arbitrages à faire entre transition écologique, rigueur budgétaire, désenclavement des territoires, le Forum Vies mobiles estime que le SAM apporte des réponses à ces enjeux. "Il ne s’agit pas d’une utopie, mais d’un scénario concret, conçu à partir des réalités territoriales et prêt à être expérimenté, avance-t-il. La mise en œuvre de ce modèle dans plusieurs territoires pilotes constitue une prochaine étape essentielle." "Ces expérimentations permettront d’en affiner les modalités, de faire la preuve des bénéfices pour les habitants et l’environnement, et de nourrir une stratégie nationale cohérente pour une transition juste et efficace vers une mobilité du XXIe siècle", conclut-il.

 

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