Citoyens - Immigration : le "contrat d'accueil et d'intégration" sera généralisé
"Aujourd'hui, nous voulons ouvrir une nouvelle étape en modernisant les règles et en les faisant respecter." Présidant le quatrième Comité interministériel de contrôle de l'immigration (Cici), hier jeudi à Matignon, le Premier ministre a défendu l'idée d'une immigration "choisie" plutôt que "subie". Les derniers chiffres de l'immigration présentés à cette occasion montrent que seulement 5% des immigrés réguliers viennent en France pour des raisons économiques. L'écrasante majorité s'installe pour des motifs familiaux, soit 102.000 personnes en 2004, dont 24% au titre du regroupement familial. C'est dans ce contexte que Nicolas Sarkozy a présenté son avant-projet de loi sur l'immigration qui doit être discuté au Parlement au printemps. Ce texte avait été préparé de longue date mais la crise des banlieues de novembre 2005 l'a rendu impérieux. Parmi les 87 articles de cet avant-projet révélé dans les grandes lignes par le ministre de l'Intérieur dans Le Journal du dimanche figure la généralisation du "contrat d'accueil et d'intégration" assorti d'engagements pour tout étranger désireux de s'installer "durablement" en France. C'est un pas supplémentaire dans la politique d'accueil mise en place par le gouvernement depuis 2003.
Un "service public de l'accueil"
La loi Sarkozy de 2003 avait déjà permis de renforcer le pouvoir des maires en matière d'immigration avec la possibilité pour les services sociaux des communes de contrôler les conditions d'accueil d'un étranger, une vérification effectuée auparavant par l'Office des migrations internationales (OMI) uniquement. Cette même loi avait rendu payante l'attestation d'accueil, soit 15 euros à la charge de l'hébergeur. Un moyen d'éviter les attestations de complaisance. La loi du 18 janvier 2005 de programmation pour la cohésion sociale a par la suite créé l'Agence nationale de l'accueil des étrangers et des migrations (Anaem) chargée de mettre en place un "service public de l'accueil". Parmi ses prérogatives, l'Anaem pouvait proposer aux migrants un "contrat d'accueil et d'intégration" à titre expérimental. Plus de 60.000 contrats ont ainsi été signés. Aujourd'hui, ce contrat est généralisé et rendu obligatoire pour pouvoir obtenir un titre de séjour de longue durée ou une régularisation. A la signature du contrat, le candidat au séjour doit s'engager à respecter les valeurs de la République (respect des lois, égalité hommes-femmes...) et à apprendre le français, le cas échéant. Avant de délivrer une carte de résident de dix ans, les préfets et les maires auront la charge de vérifier si le contrat est bien appliqué.
Un nouveau titre de séjour "talents et compétences"
L'avant-projet de loi instaure par ailleurs un nouveau titre de séjour "talents et compétences". D'une durée de trois ans renouvelable, cette carte s'adresse à des étrangers de haut niveau (scientifiques, informaticiens, artistes...), à même de "participer au développement de l'économie française" ou au "rayonnement de la France dans le monde". A l'inverse, il durcit les conditions financières du regroupement familial. Celui-ci ne sera possible qu'après dix-huit mois de résidence, contre un an actuellement. La lutte contre les fraudes au mariage mixte est renforcée : l'acquisition de la nationalité française pour le conjoint étranger ne sera possible qu'après trois ans de résidence en France, au lieu de deux. Les étudiants retenus sur des critères spécifiques bénéficieront d'une carte spéciale de séjour de quatre ans maximum, en contrepartie de l'engagement de retourner dans leur pays une fois leur diplôme en poche. Un délai de six mois pourra toutefois être accordé aux titulaires de masters pour trouver du travail en France. Les régularisations ne seront plus automatiques au-delà de dix ans de résidence sur le territoire national. La politique des "quotas" pour les trois années à venir initialement défendue par le ministre de l'Intérieur a été abandonnée. Pour des raisons de constitutionnalité, il est désormais question d'"estimations".
Michel Tendil