Projet de loi logement - La discussion parlementaire s'annonce riche en rebondissements

L'examen par le Sénat en première lecture, à partir du 14 octobre, du projet de loi de mobilisation pour le logement et la lutte contre l'exclusion pourrait conduire à l'introduction d'aménagements importants dans le texte initial. Au-delà des 500 amendements déjà déposés, plusieurs éléments se conjuguent en effet pour compléter, amender, voire remettre en cause, certains aspects du projet de loi. La pression vient d'abord du Sénat lui-même (voir article : "Le Sénat part à nouveau en campagne", 30 septembre 2008).
La commission des affaires économiques et son rapporteur - le sénateur UMP des Yvelines Dominique Braye - ont en effet adopté plusieurs amendements importants. L'un d'entre eux supprime carrément l'article 17 du projet de loi, qui doit assouplir l'obligation des 20% de logements locatifs sociaux prévue par l'article 55 de la loi SRU (Solidarité et Renouvellement urbains) du 13 décembre 2000. Hors du Sénat, Etienne Pinte - auteur du rapport remis en septembre au Premier ministre sur l'hébergement d'urgence et l'accès au logement - demande que les propositions qui "ont été actées" par François Fillon soient intégrées au projet de loi. Ceci pourrait notamment amener à enrichir la partie du texte consacrée à la lutte contre l'exclusion. A défaut d'une reprise de ses propositions par le Sénat, le député des Yvelines pourrait bien s'en charger lui même à l'Assemblée.

 

Les élus locaux mobilisés

Les élus locaux ne sont pas en reste. Outre ceux impliqués directement dans les organismes représentant le logement social - comme Michel Delebarre à la tête de l'Union sociale pour l'habitat (USH) -, Jean-Paul Huchon, président de la région Ile-de-France, vient d'adresser, le 10 octobre, une lettre au président de la République, pour déplorer que si "l'ampleur de la crise du logement en Ile-de-France est connue de tous, elle reste pourtant ignorée dans ce projet de loi", qualifié de "pas à la hauteur des enjeux". Une position partagée par le comité de suivi de la mise en oeuvre du droit au logement opposable (Dalo), dans l'avis qu'il vient de remettre sur le projet de loi. Cette instance officielle - regroupant les membres du Haut Comité pour le logement des personnes défavorisées, les associations de collectivités territoriales et des représentants des principaux acteurs du logement social - estime que le Dalo ne pourra se concrétiser qu'à trois conditions : un effort budgétaire accru de la part de l'Etat (comme le soutient aussi le rapport Pinte), un maintien de l'article 55 de la loi SRU et une véritable prise en compte de la spécificité de l'Ile-de-France (voir article: "Un article 55 "bis" de la loi SRU pour l'ensemble des constructions ?", 14 mai 2008).
Les principales modifications du projet de loi pourraient bien venir de l'Elysée et du gouvernement lui-même. Lors du Conseil des ministres exceptionnel réuni le 13 octobre pour examiner le projet de loi de finances rectificative pour le financement de l'économie, Christine Boutin a présenté une communication - tout aussi exceptionnelle - sur "les décisions prises pour faire face à la situation de l'immobilier" (voir article: "Lancement de la consultation régionale des opérateurs pour les logements Vefa", 14 octobre 2008). Cette communication à la veille de l'examen du projet de loi est le signe que, face à la crise financière, ce dernier a changé de statut pour devenir un dossier prioritaire, suivi directement depuis Matignon et l'Elysée.

 

Jean-Noël Escudié / PCA

 

Référence : projet de loi de mobilisation pour le logement et la lutte contre l'exclusion (examiné en première lecture par le Sénat à partir du 14 octobre 2008).