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La filière bois-énergie cherche à redorer son image

La filière bois-énergie le baptise "syndrome d’Idéfix", en écho au célèbre chien de la bande-dessinée, pleurant au pied du moindre arbre abattu. "Nous contribuons au contraire à une bonne gestion de la forêt. Il n’y a nul risque de déforestation en France !", a martelé ce 23 mai Mathieu Fleury, président du comité interprofessionnel du bois énergie (CIBE), lors d'une journée sur les enjeux du secteur co-organisée entre autres avec le réseau d'élus Amorce, la Fédération des services énergie environnement (Fedene) et la Fédération nationale des collectivités concédantes et régies (FNCCR).

Outre le "syndrome d'Idéfix", l'image du chauffage individuel au bois domestique est-elle ternie par la prise de conscience, inégale selon les territoires impactés, de sa contribution à la pollution de l'air aux particules fines ? "C'est un enjeu dont la filière doit tenir compte, avec pour lignes de mire le renouvellement et le développement d'un parc d'appareils performants, très peu émetteurs tels que ceux labellisés Flamme verte, et la diffusion de bonnes pratiques sur l'utilisation du combustible. Sachant que l'impact écologique d'un poêle à granulés de bois n'a évidemment rien à voir avec celui d'une cheminée à foyer ouvert", répond Yann Denance, vice-président de l'association Propellet (filière du granulé bois atteignant le cap du million de foyers français équipés). 

Taxe carbone : quand son gel refroidit les ardeurs

Point de tabou, en tout cas : une table ronde a été consacrée durant cette journée du 23 mai à cet impact de la combustion du bois sur la qualité de l'air. L'Ademe a parlé des fonds air bois, un dispositif d'aide publique au renouvellement sur lequel une métropole comme Grenoble, suite à de faibles résultats, veut par exemple mettre les bouchées doubles. En Ile-de-France, il est question de les généraliser (voir ci-dessous notre article du 29 mars 2019). Son cumul possible avec le crédit d'impôt pour la transition énergétique (Cite) est à faire connaître. L'évolution prévue du Cite, serpent de mer des discussions à chaque projet de loi de finances, sera d'ailleurs suivie de très près par cette filière qui, globalement, cherche à faire valoir ses atouts et à retrouver sa compétitivité. "Jusqu'en 2014, tout allait bien, depuis les projets stagnent et diminuent sur le terrain", confirme Pascal Roger à la tête de la Fedene.

La trajectoire de hausse de la contribution climat-énergie laissait espérer un rééquilibrage d'ici deux ans. Maîtres d'ouvrage et collectivités ont anticipé sa répercussion sur le coût des énergies fossiles : face à cela, la stabilité de coût du bois-énergie prenait tout son sens et devenait un facteur de compétitivité. "Ils ont misé dessus et multiplié les projets. Le gel de la hausse de la taxe carbone a eu raison de cet élan", poursuit-il. 

Bientôt un groupe de travail national

A la rentrée sera lancé un groupe de travail national sur le bois-énergie, dans la continuité de celui sur les réseaux de chaleur et de froid, lancé en mars dernier par la secrétaire d’Etat Emmanuelle Wargon, et qui se termine dans un mois. "En peu de temps nous allons pouvoir régler des problèmes qui traînent depuis des années", espère Pascal Roger. Des mesures fiscales, de communication et de bonnes pratiques sont attendues. Le besoin d'une véritable ambition se fait sentir. "La filière est prête à relever le défi, fixé par la PPE [programmation pluriannuelle de l'énergie, ndlr], de réaliser en dix ans ce qui a été fait en vingt ans. L'enjeu se joue aussi en termes d'emplois : elle représente 40.000 emplois, recrute  - ce qui se sait peu - et contribue à relocaliser des activités sur les territoires", observe Mathieu Fleury. L'urgence, conclut Pascal Roger, consiste à "mettre en cohérence les politiques d'aide publiques avec les objectifs ambitieux qui sont notamment affichés dans la PPE".