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La France veut porter une ambition durable pour la région alpine

A la suite de l’Italie, de la Slovénie et du Tyrol, la France assurera cette année la présidence de la Stratégie de l’Union européenne pour la région alpine. Lancée officiellement à Lyon, mardi 4 février, avec la signature d’un accord de partenariat État-Régions, cette période de 12 mois devrait être mise à profit pour faire des Alpes la première montagne durable.

Symbole de la construction européenne décentralisée à l’échelle des régions, la Suera (Stratégie de l’Union européenne pour la région alpine) rassemble 48 régions du massif alpin, représentant sept États et quelque 80 millions de citoyens. Au-delà de la coopération européenne renforcée qu’elle entend promouvoir sur les 450.000 km2 qu’elle englobe, cette initiative lancée en 2015 poursuit trois grands objectifs : "favoriser un accès équitable à l’emploi, autoriser une accessibilité interne et externe durable pour tous, élaborer un cadre environnemental plus inclusif et des solutions énergétiques renouvelables et fiables pour l’avenir".

Partant de ces enjeux, la présidence française s’est quant à elle tracé une feuille de route qui se veut ambitieuse et qui se dessine autour de sept engagements : participation, préfiguration, cohésion, jeunesse, pragmatisme, "concrétude", valorisation. "Que les choses soient claires, derrière ces mots, il y a du concret", affirme Laurent Wauquiez, président de la région Auvergne-Rhône-Alpes.

Relever les défis de la mondialisation et du réchauffement climatique

Puissance invitante pour l’occasion et appelé, dans une gouvernance innovante réunissant l’État et trois régions (Bourgogne-Franche-Comté et Provence-Alpes-Côte d’Azur se joignant à Auvergne-Rhône-Alpes), à porter la parole d'un territoire qui abrite quatre des neuf départements alpins de l’Hexagone, ce dernier a souhaité mettre en évidence deux enjeux majeurs. Celui du défi de la mondialisation et de ce qu'elle représente pour le massif alpin, mais aussi celui de la question de l’environnement.

"La mondialisation fait le jeu des métropoles, voire des mégalopoles. Elle favorise la concentration des richesses sur les territoires urbanisés, dans lesquels les individus qu’elles concentrent bénéficient de toujours plus d’argent, tandis que les habitants des territoires excentrés, comme les espaces alpins, ont le sentiment d’être laissés de côté. Pour répondre à ce défi, nous devons travailler ensemble, dans la même direction, avec des objectifs communs", souligne Laurent Wauquiez.

Deuxième enjeu identifié par le président de la région Auvergne-Rhône-Alpes, la question du réchauffement climatique constitue un défi fondamental, pour des territoires dont l’économie reposait jusque-là en partie sur "l’or blanc" et qui doivent aujourd’hui s’inventer un nouvel avenir. "La réponse aux questions que nous posent cette issue inéluctable n’est pas dans les mains des États, mais dans les nôtres. C’est à l’échelle de nos territoires, que nous pouvons trouver des solutions. D’où le rôle essentiel de la Suera. Car la stratégie alpine se situe au bon niveau. Nous sommes suffisamment grands pour avoir une vision d’ensemble et suffisamment proches pour avoir plus d’agilité et de capacité à réagir sur du concret", poursuit Laurent Wauquiez.

Donner la parole aux territoires

Unanimes pour le rejoindre dans son analyse, Marie-Guite Dufay et Renaud Muselier ont fait entendre la voix de leurs territoires respectifs. Et leur sensibilité propre.

Pour la présidente de la région Bourgogne-Franche-Comté, "au-delà de la question des moyens financiers, qui est cruciale, cette présidence française doit fournir l’occasion de mettre en évidence des initiatives individuelles." Marie-Guite Dufay estime qu’il faut notamment impliquer la jeunesse et faire en sorte que la parole politique et la parole institutionnelle ne soient pas seules à se faire entendre. "Tous les citoyens dans cet arc européen doivent donner leur sentiment et apporter leurs idées pour faire face au réchauffement climatique. Si les gens ne s’emparent pas de cette question, nous n’avancerons pas. Pour notre part, nous réunirons des jeunes de tout le massif alpin au mois de juillet prochain, dans le Parc naturel du Jura", assure-t-elle. Avec l’ambition, bien entendu, de faire émerger des projets.

En Provence-Alpes-Côte d’Azur, Renaud Muselier et ses équipes ont aussi des projets à présenter : "Nous avons déjà commencé, avec des réalisations très concrètes : plus aucun lycée chauffé au fuel fin 2019, installation d’une borne électrique tous les 100 kilomètres…" Député européen et rompu aux négociations avec les membres de la Commission, le président de la région l’assure : "Si nous avons la capacité de présenter des dossiers suffisamment constructifs et bénéfiques pour l’ensemble de nos territoires, nous bénéficierons des financements de la Commission." Et de rappeler que 10% des plus 1.000 milliards d'euros de budget européen pour la période 2021-2027 financeront de grands projets.

Des actions concrètes

Innovante puisque collégiale, la présidence française se veut également ambitieuse et pragmatique. Jacqueline Gourault, ministre de la Cohésion des territoires et des Relations avec les collectivités territoriales, répète qu’elle veut obtenir des résultats tangibles et proposer des actions concrètes. Des projets qui partiront du terrain et qui apporteront une réponse locale sur une région, voire plusieurs. Le cas de la commune des Orres, dans les Hautes-Alpes, qui mène un projet avec la Slovénie et l’Italie, pour voir comment aboutir à une meilleure utilisation de l’énergie dans les stations et aller ainsi vers la transition énergétique, symbolise les démarches que la présidence française souhaite voir fleurir.

En Auvergne-Rhône-Alpes, Laurent Wauquiez et ses équipes travaillent également sur un projet transfrontalier majeur en relation avec la transition énergétique. "L’exemple type de ce que peut nous apporter la Suera c’est notre programme centré sur l’hydrogène, explique-t-il. Si nous faisons les choses tout seul de notre côté, nous ne pesons rien face aux Chinois, même avec l’aide des régions Provence-Alpes-Côte d’Azur et Bourgogne-Franche-Comté. L’argent mis par la France représente à peine 30 millions d'euros, alors que la Chine a débloqué 3 milliards d'euros sur ce dossier. En revanche, si nous allons chercher les Italiens, qui ont un institut très performant à Turin sur ce sujet, si nous amenons avec nous les Suisses et les Autrichiens, qui peuvent faire basculer leurs stations de ski vers l’hydrogène, nous devenons alors très forts."

 

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