La politique environnementale de la France passée au crible par la Commission européenne
La Commission européenne a publié début juillet la quatrième édition de son examen de la mise en œuvre de la politique environnementale par les différents États membres. Le rapport français ne surprendra guère, tant sa teneur est proche de celui publié en 2022.

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Bis repetita, ou presque. La teneur du rapport 2025 de la Commission européenne sur la mise en œuvre de la politique environnementale par la France n'est guère différente de celle de la précédente édition (lire notre article du 9 septembre 2022).
La qualité de l'air en progrès – travaux en cours
Au rang des bons points accordés, la Commission estime, comme il y a trois ans, que "la France est en bonne voie en ce qui concerne sa transition vers une économie circulaire". Sont également crédités l'augmentation "significative des critères environnementaux en matière de marchés publics écologiques" – "une réussite saluée par la Cour des comptes française", est-il observé – ou les "bons résultats" obtenus dans la lutte contre les espèces exotiques envahissantes. Et alors que la qualité de l'air constituait l'un des points noirs du précédent rapport, les progrès "en train d'être accomplis" en la matière sont cette fois relevés, "bien que des mesures soient encore nécessaires pour réduire les polluants". De même, il est observé que "la prévention des accidents industriels s'améliore, malgré une procédure d'infraction en cours concernant l'information et la participation des citoyens en ce domaine".
Biodiversité, eau, bruit, déchets… toujours à la peine
Plusieurs points noirs ne connaissent en revanche guère d'amélioration aux yeux de la Commission. Ainsi de la protection de la biodiversité, qui "reste particulièrement préoccupante, malgré l'ambition de la stratégie nationale en faveur de la biodiversité à l'horizon 2030 [dans son rapport global, la Commission constate que "seuls 11 États membres" ont adopté un tel instrument] et malgré les engagements internationaux pris par la France". Un constat déjà dressé par le rapport 2024 sur l'état de l'environnement en France élaboré par l'IGEDD (lire notre article du 27 mai dernier). "Les mesures effectivement prises par la France ne sont pas à la hauteur de ses ambitions", tacle la Commission.
Il en va de même de la gestion des déchets, qui "demeure problématique" – entraînant même le lancement d'une procédure d'infraction l'an passé –, et de celle du bruit, qui a également contraint la Commission à assigner la France devant la CJUE en la matière (lire notre article du 25 juillet 2024). Ou encore de la qualité de l'eau, où "la France est confrontée aux mêmes problèmes que de nombreux autres États membres" (lire notre article du 5 février). Dans ce domaine, la Commission met toutefois l'accent, pour la France, sur la nécessité "d'améliorer la continuité des cours d'eau et les débits écologiques ainsi que de réduire la pollution due aux pesticides et aux nutriments libérés par l'agriculture intensive". Non sans rappeler qu'elle avait décidé de saisir la Cour de justice de l'UE (CJUE) d'un recours contre Paris pour pollution par les nitrates (lire notre article du 25 juillet 2024 précité) ou que cette même CJUE avait condamné le 4 octobre dernier la France faute d'avoir respecté ses obligations en matière de traitement et de surveillance des eaux urbaines résiduaires dans 78 agglomérations. Dans son rapport global, on notera que la Commission retient toutefois comme "exemple de bonnes pratiques" le plan d'action français ciblant la pollution par les PFAS (lire notre article du 19 janvier 2023).
S'agissant de la protection du climat, la Commission rappelle de même qu'elle a engagé en janvier 2024 une procédure d'infraction contre Paris (et 25 autres États membres à l'époque, ndlr) pour transposition incomplète de la directive relative au système d'échange de quotas d'émission. Depuis, seules la France et la Pologne n'auraient pas encore transposé cette directive, a déclaré en commission des finances le député Jean-Philippe Tanguy, le 25 juin dernier, lors de l'adoption de son rapport d'information sur la contribution de la France au budget de l'UE (lire notre article du 16 juillet).
Un déficit d'investissement annuel estimé à plus de 21 milliards d'euros
Même balancement en matière de financement. Dans le rapport global, la Commission met en exergue le fait que la France, l'Allemagne, les Pays-Bas, l'Italie et l'Espagne "se sont distingués par le niveau élevé d'obligations vertes qu'ils ont émises en 2021-2023". Elle juge par ailleurs dans le rapport national que la France obtient "de bons résultats pour ses pratiques de budgétisation verte", tout en observant que "la suppression progressive des subventions préjudiciables à l'environnement demeure une préoccupation structurelle, exacerbée par la crise énergétique". Elle considère toutefois que l'investissement environnemental global nécessaire pour permettre à la France d'atteindre ses objectifs est insuffisant. La Commission estime les besoins à 63,8 milliards d'euros annuels, alors que le budget octroyé serait de 42,7 millions d'euros. Soit un déficit de 21,1 milliards d'euros par an, ainsi réparti : 8 milliards d'euros pour la prévention et la réduction de la pollution ; 4,5 milliards pour la biodiversité et les écosystèmes, 4,6 milliards pour l'économie circulaire et 3,9 milliards pour l'eau.
Actions prioritaires pour 2025
En annexe, la Commission dresse une – longue – liste d'"actions prioritaires" à conduire en 2025. Parmi elles, on relèvera notamment :
- en matière de gestion des déchets, l'amélioration de la collecte séparée à la source et de la préparation en vue de la réutilisation et le recyclage de déchets municipaux, l'augmentation du taux de collecte et de recyclage des déchets d'équipements électroniques et électriques ou encore la mise en œuvre et l'extension du paiement aux déchets pour les entreprises et les ménages ;
- en matière de biodiversité, la désignation des sites Natura 2000 et la mise en œuvre effective des mesures de conservation spécifiques à chacun d'entre eux, le renforcement des actions ciblant les habitats et les espèces en état de conservation défavorable, la mise en œuvre des éco-régimes et des mesures agroenvironnementales et l'élargissement de l'adoption des pratiques de l'agriculture biologique ou encore l'intensification du contrôle du respect du règlement relatif aux espèces exotiques envahissantes ;
- en matière de pollution, la prise de mesures afin de réduire les émissions de polluants atmosphériques, la réduction des rejets industriels dans l'eau, l'achèvement de la cartographie du bruit et la mise en œuvre des plans d'actions pour la gestion du bruit, l'intensification de l'introduction des solutions fondées sur la nature pour réduire les pressions hydromorphologiques, la réduction de la pollution des eaux due aux rejets de nutriments, de substances chimiques, de métaux… Liste tout sauf exhaustive.