Finances locales - La reprise de l'investissement alimente le recours à l'emprunt

L'investissement local devrait rebondir de 7% cette année (après +6,8% l'an dernier), estime la Banque postale collectivités locales. L'établissement a présenté ce 19 septembre sa note de conjoncture sur les finances locales. En plus d'une solide capacité d'autofinancement, le secteur pourrait mobiliser un volume un peu plus important d'emprunts.

La croissance de l'investissement local en 2018 pourrait être plus forte que prévu. Ce 19 septembre, la direction des études de la Banque postale collectivités locales a estimé qu'il pourrait cette année grimper de 7% pour atteindre 54,2 milliards d'euros. Un rythme plus soutenu que la hausse de 6,1% qu'elle avait anticipée au mois de mai dernier (voir notre article du 15 mai 2018 : L'investissement redémarre, les dépenses de fonctionnement restent contenues).
A dix-huit mois de la fin du mandat, les communes et intercommunalités appuient sur l'accélérateur afin de mettre en œuvre leurs projets d'équipements. La tendance est aussi encouragée par "la pression" qui s'exerce sur les élus en faveur de l'entretien du patrimoine, notamment les routes, a pointé Luc-Alain Vervisch, directeur des études de l'établissement bancaire. Cinq années de baisse des dotations ont conduit les collectivités territoriales à arrêter ou reporter des travaux d'entretien, qui désormais deviennent indispensables.

Coupes sombres dans les dépenses de solidarité

A noter : en dépit du fardeau que constituent les dépenses sociales, les élus des départements adoptent le même comportement que leurs homologues du secteur communal. Les dépenses d'investissement des collectivités départementales pourraient croître de 5% cette année. Une première après huit années de recul. Quant aux régions, elles se singulariseraient par une quasi-stabilité de leurs dépenses d'investissement (+ 0,8%).
Au total, malgré une accélération qui, selon la banque, devrait se poursuivre en 2019, les dépenses d'équipement engagées par les collectivités locales durant l'actuel mandat municipal (2014-2020) seront probablement inférieures de quelque 15 milliards d'euros au mandat municipal précédent (2008-2014). Les investissements ont donc indéniablement servi de variable d'ajustement aux collectivités locales pour faire face à la baisse des dotations de près de 12 milliards d'euros durant le précédent quinquennat. Tout comme les politiques de solidarité à caractère facultatif déployées par les collectivités locales. Les dépenses d'insertion et de prévention médico-sociale ou spécialisée initiées par les départements ont reculé de 2,5 à 1,6 milliard d'euros entre 2013 et 2017 (soit -40%), selon les calculs de la banque. De leur côté, les dépenses engagées par les collectivités dans leur ensemble dans les domaines de la culture, du sport et de la jeunesse ont été réduites sur la même période de 20,4 milliards d'euros à 18 milliards d'euros (-12% en euros courant).

Dépenses de fonctionnement : +0,9%

Les contrats de trois ans signés au premier semestre par 228 des 322 collectivités dont les dépenses de fonctionnement inscrites au budget principal sont supérieures à 60 millions d'euros, devraient être dans l'ensemble respectés. La Banque postale anticipe en effet une hausse des dépenses de fonctionnement du secteur local de 0,9%, inférieure donc à la limite de 1,2% fixée par la loi de programmation des finances publiques votée fin 2017.
Mais en 2019 et 2020, les grandes collectivités pourraient rencontrer plus de difficultés à respecter les exigences du législateur. En cause notamment, une accélération possible de la croissance de la masse salariale. En effet, si en 2018, la décision prise par le gouvernement de reporter le plan sur les parcours professionnels, les carrières et les rémunérations (PPCR) a permis aux collectivités d'économiser 103 millions d'euros, elles devront bien honorer cette dépense en 2019 – en sachant que la mesure se chiffrera à 129 millions d'euros en 2020. Autre facteur d'aggravation des dépenses pointé par la Banque postale : la nouvelle vigueur de l'inflation, qui renchérit le prix des biens consommés par les collectivités.

Recours à l'emprunt

En se serrant la ceinture et grâce à des recettes de fonctionnement bien orientées (+1,3%), les collectivités pourraient augmenter leur épargne brute, celle-ci atteignant un "niveau historique" de 42,8 milliards d'euros. Après déduction des remboursements d'emprunts (16,4 milliards d'euros), cette épargne devrait couvrir près de la moitié des investissements. Le solde serait financé par des subventions et 17,3 milliards d'emprunts nouveaux. Ces derniers augmenteraient cette année de 4,5% après deux années de repli. Signe d'une véritable reprise des emprunts souscrits par le secteur, "les équipes commerciales de la Banque postale collectivités locales ont quasiment réalisé dès la mi-année leur objectif annuel pour les collectivités de moins de 5.000 habitants", a indiqué Betty Marcerou, directrice générale de la Banque postale collectivités locales.
Afin de financer leurs projets d'investissement, les élus locaux "envisagent une poursuite de l'endettement en 2019-2020, de l'ordre de 0,1 point de PIB", a poursuivi Luc-Alain Vervisch. Cela correspond à "une augmentation de 2 à 3 milliards d'euros de l'encours de dette des collectivités locales". Dès lors, les responsables de la banque font part de leurs doutes sur la possibilité pour le secteur public local de parvenir à dégager une capacité de financement de 0,7 point en 2022, un objectif fixé par la loi de programmation des finances publiques. Ils partagent donc les interrogations émises à ce sujet, en février, puis en juin dernier, par la Cour des comptes.