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Eau et milieux aquatiques - Le projet de loi sur l'eau de retour au Sénat

En ouverture de sa session extraordinaire, le Sénat examine en seconde lecture à partir de ce jeudi 7 septembre le projet de loi sur l'eau qui avait subi de nombreuses modifications devant l'Assemblée. Parmi les dispositions réintroduites dans le projet : la création d'un fonds départemental pour l'eau et l'assainissement.

Le projet de loi sur l'eau et les milieux aquatiques revient ce jeudi en seconde lecture devant le Sénat. Adopté le 30 mai dernier en première lecture par l'Assemblée nationale, le texte a subi de la part des députés un grand nombre de modifications par rapport à la version initiale, examinée en 2005 par le Sénat.
Les députés socialistes et communistes avaient appelé à voter contre ce texte, estimant qu'il ne répondait pas suffisamment à l'ambition première du projet d'assurer "le bon état écologique des eaux" en 2015, comme le prévoit la directive cadre européenne du 23 octobre 2000. Le volet consacré aux pollutions d'origine agricole était notamment jugé décevant.
Les députés ont introduit de nombreuses dispositions dans le titre Ier relatif à la préservation des ressources en eau et des milieux aquatiques. Parmi les nouveautés, on relève la simplification des procédures de transfert de propriété entre collectivités publiques pour la mise en place des périmètres de protection immédiate des captages d'eau potable et la transposition en droit français de la directive 2006/7/CE du 15 février 2006 concernant la gestion de la qualité des eaux de baignade.
Les modifications les plus importantes apportées par l'Assemblée touchent au titre II du projet de loi qui traite de l'alimentation en eau et de l'assainissement. Les députés ont notamment souhaité revoir les obligations des propriétaires et des collectivités en matière d'assainissement non-collectif (ANC), en instaurant un système à la carte où le contrôle des installations relève de la seule commune.
Ils ont également supprimé la taxe sur les eaux pluviales destinée à financer des travaux en matière d'assainissement et proposé la création de deux crédits d'impôts pour la réhabilitation des installations d'assainissement non-collectif et la mise en place de systèmes de récupération et de traitement des eaux de pluie. Dans le catalogue des mesures relatives aux services publics de distribution d'eau et d'assainissement, l'Assemblée nationale a voté pour la généralisation de la pose de compteurs individuels dans les logements collectifs.

Nouvelles mesures contre les "bateaux ventouses"

Elle a aussi introduit un titre II bis consacré à la préservation du domaine public fluvial, pour apporter des réponses pratiques au problème des "bateaux ventouses" stationnant sans autorisation le long des cours d'eau. Il est ainsi prévu de soumettre à l'accord du maire les autorisations de stationnement de bateaux supérieures à un mois et d'organiser une procédure d'abandon et de déchéance des droits du propriétaire afin de permettre la vente d'embarcations manifestement en déshérence.
Enfin, dans le titre III consacré à la planification et à la gouvernance, l'Assemblée a supprimé le fonds départemental pour l'alimentation en eau et l'assainissement, considérant que ce mécanisme renchérissait le prix de l'eau. Concernant la composition des comités de bassin, elle a fixé la répartition des trois collèges - collectivités territoriales, usagers et professionnels et Etat - à respectivement 40%, 40% et 20%. Elle a aussi porté le montant maximum des dépenses des agences de l'eau  de 12 à 14 milliards d'euros pour la période 2007-2012.
Le texte examiné à partir d'aujourd'hui par le Sénat comporte près de 500 amendements. "Nous avons mené au cours de l'été un gros travail de concertation avec les acteurs de l'eau et avec les députés pour que les modifications apportées suscitent le moins de polémiques possibles", assure Bruno Sido, sénateur de la Haute-Marne et rapporteur du projet de loi sur l'eau.
En matière d'assainissement, un amendement propose de donner explicitement aux communes la possibilité, en cas de refus des propriétaires et après mise en demeure, de procéder d'office et aux frais des intéressés aux travaux de réhabilitation ou de réalisation de leurs installations d'assainissement non-collectif défectueuses.
En termes de financement, le projet soumis aux sénateurs prévoit d'entériner la suppression de la taxe sur les eaux fluviales et de ruissellement et de supprimer aussi le crédit d'impôt pour la réhabilitation des installations d'assainissement non-collectif. Concernant l'article 26 du projet de loi qui traite des compétences  des collectivités territoriales en matière d'assainissement non collectif, un amendement propose d'octroyer toute latitude aux communes dans les modalités d'organisation du contrôle des installations et les délais de mise en œuvre, afin de préserver les collectivités ayant déjà mis en place des services publics d'assainissement non-collectif (Spanc). L'échéance reste fixée au 31 décembre 2015 pour la mise en conformité du parc des installations.
Dans le chapitre relatif à la préservation du domaine public fluvial, les sénateurs auront à examiner un amendement prévoyant la délimitation, par le gestionnaire de ce domaine, de zones de stationnement pour les bateaux-logements, toute modification du tracé ou création d'une nouvelle zone étant soumise à l'accord préalable de la commune concernée.


Un fonds pour reconnaître le rôle des départements

Enfin, le projet soumis aux sénateurs réintroduit la création facultative d'un fonds départemental pour l'eau et l'assainissement. Alimenté par une taxe de 5 centimes d'euro par m3, il permettrait aux conseils généraux d'alléger la charge des communes qui réalisent des travaux de captage, de distribution et d'assainisement. "Ce fonds consacrerait le rôle important des départements dans le domaine de l'eau, qui ont accordé 700 millions d'euros à ce secteur en 2005", justifie Bruno Sido. Quant aux agences de l'eau, les sénateurs proposent de ramener leur plafond de dépenses de 14 à 12 milliards d'euros, un montant jugé suffisant compte tenu des excédents de trésorerie dont elles disposent.
Les sénateurs ont jusqu'au 13 septembre à midi pour examiner le texte qui devrait être soumis en commission mixte paritaire courant décembre 2006.

 

Anne Lenormand