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Le Sénat adopte le projet de loi ratifiant les ordonnances relatives à l'évaluation environnementale

Le Sénat a adopté en première lecture le 10 octobre  le projet de loi ratifiant les ordonnances relatives à l'évaluation environnementale dont l'une vise à améliorer l'information et la participation du public.

Après les députés en juillet dernier, les sénateurs ont adopté en première lecture le 10 octobre le projet de loi de ratification de deux ordonnances destinées à améliorer le dialogue environnemental, dont l'une, qui prévoit notamment la création d'un "droit d'initiative" citoyenne, correspond à une promesse de François Hollande après le drame du barrage contesté de Sivens.
"Les ordonnances prises le 3 août 2016 sur le fondement de la loi Macron clarifient les règles de l'évaluation environnementale et réforment les procédures d'information et de participation du public", a rappelé Sébastien Lecornu, secrétaire d'État auprès du ministre de la Transition écologique et solidaire. "J'y vois un moyen de réduire la défiance du public par rapport aux procédures menées par les pouvoirs publics", a-t-il souligné à propos de celle sur l'information et la participation du public. "Il ne suffit plus que ces derniers décrètent un projet légitime pour qu'il le soit aux yeux du public. Nos concitoyens pourront désormais participer à la décision mais encore faut-il les associer au bon moment, a-t-il estimé. Cette ordonnance constitue une réponse pour protéger l'environnement mais aussi pour libérer les porteurs de projets, publics comme privés (…). Ils auront davantage de visibilité en amont de la procédure, ils pourront aller au-devant des problèmes pour les traiter le plus tôt possible."
"Très techniques, ces ordonnances touchent à des domaines fondamentaux du droit de l'environnement en conjuguant l'exigence de protection de l'environnement et la nécessaire simplification des contraintes et procédures", a résumé le rapporteur Alain Fouché (LR).

Limitation des études d'impact

L'ordonnance relative à l'évaluation environnementale limite les études d'impact aux projets considérés comme ayant le plus d'impact, et garantit en contrepartie la qualité des études ainsi qu'une association renforcée des collectivités territoriales et du public. Deux amendements ont été adoptés à l'initiative de Ronan Dantec en tant que rapporteur de la commission d'enquête du Sénat sur la réalité des mesures de compensation des atteintes à la biodiversité. L'un rend systématique une réponse écrite de la part du maître d'ouvrage à l'avis rendu par l'Autorité environnementale. L'autre propose que l'étude d'impact renvoie à la réalisation d'une étude préalable pour les projets de travaux, d'ouvrages ou d'aménagements susceptibles d'avoir des conséquences négatives importantes pour l'agriculture, étude prévue dans le cadre du mécanisme de la compensation collective agricole, créé par la loi d'avenir pour l'agriculture du 13 octobre 2014. "L'étude préalable comprend une analyse de l'état initial de l'économie agricole du territoire concerné, l'étude des effets positifs et négatifs du projet sur l'économie agricole du territoire, les mesures envisagées pour éviter et réduire les effets négatifs notables du projet ainsi que des mesures de compensation collective visant à consolider l'économie agricole, indique l'exposé des motifs de l'amendement. Cette étude complémentaire est adossée à l'évaluation environnementale."

Renforcement de la participation du public

La deuxième ordonnance relative aux procédures destinées à assurer l'information et la participation du public vise à renforcer cette participation, notamment en fixant des droits associés comme l'accès aux informations pertinentes, et à moderniser la participation. Elle introduit la possibilité d'organiser une concertation préalable pour certains projets, plans et programmes, en amont de leur élaboration, un droit d'initiative – un certain nombre de citoyens, des élus locaux ou des associations peuvent demander l'organisation d'une concertation préalable -, ainsi qu'une déclaration d'intention – les porteurs de projets, plans et programmes, en amont de la phase d'instruction, doivent communiquer leur intention de réaliser tel projet, plan ou programme.
Les sénateurs ont voté plusieurs modifications sur cette partie du texte. Le 5 octobre, en commission, tout d'abord, ils ont généralisé à quatre mois le délai durant lequel le droit d'initiative peut être exercé après la déclaration d'intention et ramené aussi à quatre mois le délai durant lequel les vices de forme ou de procédure au titre d'une concertation peuvent être invoqués par voie d'exception lors d'un recours, afin de ne pas créer des risques contentieux supplémentaires. Ils ont aussi supprimé le plafonnement du seuil de dépenses publiques à partir duquel un projet est soumis à déclaration d'intention et à droit d'initiative, "afin de ne pas empiéter sur le domaine réglementaire et de ne pas compromettre des adaptations futures de ce nouvel outil". Malgré l'avertissement de Sébastien Lecornu qui a rappelé que les députés avaient été "unanimes" pour fixer le plafonnement à 5 millions d'euros, afin d'intégrer des projets du même type que le barrage de Sivens, les sénateurs ont confirmé leur choix en séance. Le 10 octobre, ils ont aussi adopté contre l'avis du gouvernement et du rapporteur un amendement défendu par Philippe Bonnecarrère (UC, Tarn), qui revient à la rédaction initiale de l'ordonnance en dispensant de concertation "code de l'environnement" les projets déjà soumis à une concertation "code de l'urbanisme". "C'est le cas pour les zones d'aménagement concerté et pour les quartiers Anru de la politique de la ville", a-t-il illustré. "Or l'Assemblée nationale a décidé que, pour ces territoires où la procédure du code de l'urbanisme est obligatoire, la CNDP [Commission nationale du débat public, ndlr] serait désormais saisie pour savoir si elle doit être mise en œuvre ou bien si la concertation du code de l'environnement lui est préférable. Cet aiguillage par la CNDP est source de complexité et il fait comme si la concertation prévue par le code de l'environnement était préférable, plus sérieuse, mieux garantie - ce qui n'est nullement le cas", a-t-il expliqué. Un dernier amendement du rapporteur, adopté avec le soutien du gouvernement, vise à améliorer la continuité de l'information, en ouvrant la possibilité de désigner à titre facultatif un garant chargé de la phase postérieure à la participation préalable à certains projets actuellement hors périmètre.
Le texte doit à présent faire l'objet d'une commission mixte paritaire chargée de trouver une version commune aux deux chambres.