Levées de fonds legaltech : 2021 année record

Il y a près de 3 mois, nous avions publié  un article « Veille sur les LegalTechs 2021 » dans lequel nous nous étions notamment intéressés aux levées de fonds  réalisées sur les neufs premiers mois de l'année 2021. En ce début d’année, l'heure est venue de dresser le bilan 2021 de l’ensemble des levées de fonds réalisées par les acteurs français du secteur LegalTech et d’en retirer les grandes tendances.

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Des levées de fonds records

Pour réaliser cette étude, nous nous sommes notamment basés sur la liste des LegalTechs françaises (une centaine de LegalTechs y sont référencées) ainsi que sur les actualités du secteur, et pour chaque LegalTech, nous avons recherché si des levées de fonds avaient été réalisées en 2021.

Ainsi, sur plus d’une centaine de LegalTechs françaises étudiées, nous avons relevé 10 levées de fonds, pour un volume total prévisionnel s’élevant à 85 millions d’euros de fonds levés en 2021, faisant ainsi de 2021 une année record. A titre de comparaison, le volume total levé était de 52,1 millions d’euros en 2019 et de 22,8 millions d’euros en 2020. Ces chiffres confirment la tendance globale de croissance du marché comme nous l’exposions dans notre précédente publication.

Levées de fonds en hausse

© Banque des Territoires

Enfin et au-delà de l’indice de croissance dont témoignent ces chiffres, l’analyse des levées de fonds réalisées cette année permet également de mettre en évidence trois tendances sectorielles dominantes au cours de l’année 2021.

 

La conformité règlementaire à l’honneur en 2021 !

En 2021, la conformité règlementaire ou compliance est le domaine des LegalTechs françaises qui a levé le plus de fonds. En effet sur 85 millions d’euros levés en 2021, 38 millions d’euros (45%) ont été récoltés par des LegalTechs développant des solutions de compliance.

D’ailleurs, la palme de la plus haute levée de fonds réalisée par une LegalTech française en 2021 revient à Didomi qui a levé 34 millions d’euros. Cette LegalTech, à la frontière avec les AdTechs, met à disposition des entreprises des solutions de gestion du consentement des utilisateurs dans le cadre de l’application du Règlement Général sur la Protection des Données (RGPD) et propose également des outils de pilotage de la performance concernant la collecte des données. Ce nouvel apport financier doit permettre à la société, notamment, de se développer aux Etats-Unis.

Toujours en lien avec le RGPD, Data Legal Drive a levé 2 millions d’euros venant ainsi réaffirmer sa position de numéro 1 français des plateformes de conformité RGPD, mais aussi accroitre sa présence sur le marché européen et élargir son offre à la conformité aux exigences de la loi Sapin II et RSE (Responsabilité Sociétale des Entreprises). Son concurrent, Adéquacy a de son côté réussi une levée de fonds de 1,2 millions d’euros pour investir en R&D afin d’améliorer les fonctionnalités de son logiciel de conformité au RGPD.

Enfin, le dernier projet règlementaire à avoir levé des fonds cette année est celui de AML Factory qui a obtenu 950 000 euros. AML Factory est spécialisé dans le développement de solutions dans la lutte contre la criminalité financière.

Il est très intéressant de remarquer qu’au lendemain de la crise sanitaire de 2020, les LegalTechs qui se sont le plus développées sont celles spécialisées dans la protection des données personnelles et, plus généralement, dans la conformité règlementaire. Cette information est d’autant plus pertinente lorsque l’on sait que l’année de 2020 a été marquée par de nombreux scandales sur la protection des données personnelles.

 

Des solutions de gestion documentaire et contractuelle toujours attractives

Un autre domaine qui s’est presque tout autant développé cette année, est celui des solutions de gestion documentaire et contractuelle. En effet sur 85 millions d’euros levés en 2021, 35 millions d’euros (41%) ont été récoltés par des LegalTechs développant des solutions de gestion documentaire et contractuelle.

La plus haute levée de fonds, dans ce domaine, a été réalisée par Yousign qui a levé 30 millions d’euros cette année. Cette LegalTech française offre aux TPE et PME une solution de signature électronique de documents officiels tels que des contrats, des devis ou bien même des accords de confidentialité. Avec cette levée de fonds, Yousign espère équiper pas loin de 50 000 PME et TPE européennes d’ici l’année 2024.

Leeway, le logiciel SaaS permettant d’automatiser la gestion des contrats des entreprises et qui a vu le jour il y a un peu plus d’un an, a réussi cette année une levée de fonds d’un montant de 3,7 millions d’euros. Ces fonds doivent permettre à la jeune société, incubée à Station F à Paris, de recruter une vingtaine de personnes et d’accélérer le déploiement de leur plateforme.

Enfin, Legal Pilot et sa solution d’automatisation de la rédaction de documents et de certaines opérations juridiques a réuni en 2021 1,6 millions d’euros. Cette première levée de fonds doit permettre à la Start-up de recruter de nouveaux collaborateurs et de renforcer ses actions marketings et R&D.

Ces levées de fonds témoignent de la volonté des grandes entreprises de vouloir de plus en plus automatiser leurs processus documentaires et contractuels et ainsi de pouvoir dégager du temps et limiter l’intervention humaine aux seuls besoins d’analyse.

 

Un développement soutenu des outils à destination des professionnels du droit

Enfin, l’année 2021 a également été profitable aux LegalTechs développant des solutions à destination des cabinets d’avocats. L’ensemble des LegalTechs offrant ces services ont réussi à réunir 11,5 millions d’euros sur l’ensemble de l’année.

Parmi elles, on trouve Jus Mundi qui a levé cette année 8,5 millions d’euros pour son moteur de recherche spécialisé dans le droit international et l'arbitrage. Dédié en premier lieu aux cabinets d’avocats, Jus Mundi souhaite désormais renforcer ses compétences dans le droit du sport, de l'environnement et la fiscalité grâce à cette levée de fonds. Jus Mundi propose aussi la mise à disposition d’un répertoire d'avocats et d'arbitres avec leur spécialisation, leurs parcours ainsi que les affaires auxquelles ils ont participé.

Les levées de fonds d’Avostart de 2 millions d’euros et d’Uplaw de 1 million d’euros cette année confirment la demande croissante des cabinets d’avocats pour les solutions et outils digitaux. En effet, Uplaw est spécialisée dans la digitalisation du legal corporate et Avostart est une plateforme de mise en relation entre avocats et particuliers.

Ces sommes levées témoignent de la part de marché importante que représente les cabinets d’avocats pour les LegalTechs mais aussi de la forte appétence des cabinets d’avocats pour des solutions leur permettant d’automatiser et de simplifier les tâches inhérentes à leur métier.

Décompo sectorielle

© Banque des Territoires

Nous pouvons donc dresser plusieurs constats de cette année 2021 :

  • Le premier constat, au regard du volume total prévisionnel de fonds levés en 2021, est que le secteur des LegalTechs a connu une année très favorable en termes de levées de fonds. D’autant plus, lorsque l’on met ce résultat en perspective avec ceux des années 2020 (+273%) et 2019 (+163%). Ce résultat semble confirmer l’attraction grandissante, au fil des années, de ce marché pour les investisseurs. La recherche de fonds auprès d’investisseurs devrait d’ailleurs s’accentuer, les LegalTechs ayant besoin de ressources suffisantes pour le déploiement et l’amélioration de leurs solutions.
  • Le second constat est que la fraude est venue indirectement doper la croissance de certaines LegalTechs. En effet, il semblerait que la recrudescence des fraudes et des violations de données personnelles en 2020 soit une des principales raisons de l’engouement qu’ont connu les Legaltechs développant des solutions de mise en conformité règlementaire.
  • Enfin, la question restant en suspend est celle de savoir si les conséquences, à plus long terme, de la crise de Covid-19 seront-elles aussi des moteurs de croissance pour les LegalTechs et d’innovation pour les solutions qu’elles développent.