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Développement durable - Les déchets à la source de l'économie circulaire

"Economie circulaire : quelles perspectives pour la valorisation des déchets ?" Ce thème a servi de fil conducteur à la deuxième conférence parlementaire sur la politique des déchets organisée le 9 avril à Paris. Prochain Plan national déchets, évolution de la fiscalité, nouvelles filières de recyclage : l'actualité du secteur a été passée en revue.

Au moment même où se tenait à Paris la deuxième conférence parlementaire sur la politique des déchets, largement consacrée à leur valorisation dans le cadre de l'économie circulaire, la nouvelle ministre de l'Ecologie, Ségolène Royal, assurait lors de la séance des questions d'actualité à l'Assemble nationale le 9 avril que l'économie circulaire faisait bien partie des "grands chantiers" de sa feuille de route. Déjà mis en avant lors de la conférence environnementale de septembre dernier, ce thème est d'ailleurs inscrit dans le projet de "stratégie nationale de transition écologique vers un développement durable" 2014-2020, en phase de consultation jusqu'au 20 avril, et semble promis à un bel avenir. "En 2030, la Chine utilisera à elle seule 50% des matières premières dans le monde. Il y aura une tension majeure sur ces marchés", a alerté Chantal Jouanno, lors de la conférence parlementaire. L'ex-secrétaire d'Etat chargée de l'écologie, aujourd'hui sénatrice UDI de Paris, défend le principe de l'économie circulaire qui doit donc permettre d'optimiser l'usage de ressources de plus en plus rares. "Il faut penser que chaque ressource utilisée est un capital, a-t-elle souligné. Dans l'idéal, l'économie circulaire est une économie sans déchet." En attendant, Chantal Jouanno estime qu'"il ne faut pas remettre en question les priorités actuelles de la politique des déchets : la prévention, le recyclage, la valorisation organique et la valorisation énergétique".

Un Plan national déchets attendu en juin

Une hiérarchie illustrée par le futur Plan national de prévention des déchets 2014-2020. Après avoir fait l'objet d'une consultation publique, il devrait être présenté par le Conseil national des déchets au gouvernement en juin prochain, en même temps que les préconisations du Comité pour la fiscalité écologique, a confirmé Patricia Blanc, directrice générale de la Prévention des risques au ministère de l'Ecologie. Ce projet de plan prévoit notamment une réduction de moitié de la quantité de déchets mis en décharge, un objectif "ambitieux mais pas irréaliste", selon Patricia Blanc. Les trajectoires fixées reposent sur toute une série de leviers : des investissements importants - "plusieurs milliards d'euros devront être mobilisés sur la chaîne de la réutilisation et du recyclage", assure Patricia Blanc -, et un travail important de sensibilisation, de communication, d'information en amont. Suite à la consultation publique, le projet de plan réaffirme notamment l'importance de la sensibilisation à l'école. "Il y a un gros travail de formation à faire auprès des jeunes. On pourrait ainsi imaginer de mettre des conteneurs dans la cour de chaque école primaire", avance Gérard Miquel, sénateur du Lot et président du Conseil national des déchets. Il préconise aussi l'harmonisation des consignes de tri et la poursuite du travail de communication directe auprès des habitants via les ambassadeurs du tri. Pour Yves Détraigne, sénateur de la Marne et membre du groupe d'études sur la gestion des déchets, il faut se demander pourquoi 25% des foyers ne trient toujours pas leurs déchets. "Il y a des messages simples à faire passer et il faudrait aussi être très pragmatique dans les consignes de tri en se limitant à un bac pour les déchets secs et un bac pour les déchets humides", estime-t-il.

Fiscalité déchets : les propositions à l'étude

Autre évolution à suivre : celle de la fiscalité. Mathieu Glachant, professeur d'économie à l'Ecole des mines ParisTech et animateur du groupe déchets du Comité pour la fiscalité écologique, a présenté les pistes à l'étude pour le volet fiscal du projet de Plan déchets. Pour la TGAP déchets (taxe générale sur les activités polluantes), il n'est pas envisagé de modifier la trajectoire définie jusqu'en 2015 par le Grenelle de l'environnement. Pour la période 2016-20, la réflexion porte sur une possible hausse de taux, l'assiette de la taxe étant appelée à diminuer du fait de la réduction de la mise en décharge. Il est aussi proposé de supprimer certaines des réfactions - des rabais - accordées aux installations de traitement considérées comme performantes sur le plan énergétique et environnemental, soit parce ces réfactions n'ont jamais été appliquées, soit parce que la performance s'est généralisée. Le groupe déchets propose d'instaurer une modulation sur la performance des collectivités bénéficiant de rabais : ainsi, les communes qui dépasseraient un objectif donné de valorisation matière de déchets municipaux bénéficieraient d'un rabais alors que celles qui se situeraient en deçà n'en auraient pas. Deuxième grande proposition à l'étude : une taxe en amont qui permettrait de toucher tous les produits de consommation qui ne sont pas encore soumis à une écocontribution, dans le cadre des filières de responsabilité élargie du producteur (REP). Deux scénarios sont sur la table : une taxe avec une petite assiette et un taux élevé ou une taxe avec une large assiette et un taux faible. "Tous deux présentent beaucoup d'inconvénients, reconnaît toutefois Matthieu Glachant. Dans le premier cas, on s'expose à des effets pervers lors de la définition des produits soumis à cette taxation : serait-il concevable, avec les normes sanitaires qui sont les nôtres, de taxer les produits sanitaires, par exemple ? Quant au deuxième scénario, on se rend vite compte que si l'on conçoit une taxe à large spectre, elle n'aura qu'un faible effet sur l'incitation à recycler." La troisième piste à l'étude consisterait à développer la tarification incitative pour le service public des déchets municipaux. "Cinq millions d'habitants sont aujourd'hui soumis à ce type de dispositif. Avec le retour d'expérience que l'on a, on peut estimer que c'est un bon outil puisqu'il réduit la quantité d'ordures ménagères résiduelles de 56 kg/habitant/an", observe Matthieu Glachant. Le groupe déchets propose donc une trajectoire d'adoption de la tarification incitative qui s'appliquerait à 15 millions d'habitants en 2020 et à 25 millions en 2025, avec un renforcement du dispositif des aides de l'Ademe aux collectivités s'engageant dans le dispositif.

Plan recyclage et matériaux verts : cinq sujets identifiés

En matière de recyclage, la feuille de route du Plan recyclage et matériaux verts – l'un des 34 plans de la "Nouvelle France industrielle" initiés par le ministère du Redressement productif – doit être finalisée prochainement, a confirmé Christophe Lerouge, chef du service de l'industrie à la direction générale de la Compétitivité, de l'Industrie et des Services (DGCIS). L'ambition de ce plan est de faire émerger de nouvelles filières de recyclage sur le territoire français. Cinq sujets ont été identifiés : la réduction des mises en décharge par l'investissement dans le tri, le recyclage du plastique, le recyclage des cartes électroniques, la déconstruction des avions et le recyclage des déchets du BTP. L'objectif est ainsi d'augmenter la quantité de matériaux recyclés sur le marché français. Pour Gérard Miquel, il faut aussi parallèlement "trouver le moyen de soutenir les initiatives locales et les expérimentations en matière d'économie circulaire et réimaginer le soutien à ce niveau". "Faute d'appui, on a vu dans le passé certaines filières de recyclage de plastique se développer dans des pays voisins comme l'Espagne, a-t-il pointé. Aujourd'hui, certaines collectivités sont mobilisées pour le recyclage de l'aluminium et du petit acier, elles ont besoin d'être encouragées."

 

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