Archives

Projet de loi artisanat - Les députés instaurent un "contrat de revitalisation commerciale"

Les députés ont achevé l'examen du projet de loi relatif à l'artisanat, au commerce et aux très petites entreprises le 13 février 2014, dans le cadre de la procédure accélérée. Parmi les mesures ajoutées par les députés en séance publique : l'expérimentation pendant cinq ans d'un "contrat de revitalisation commerciale" pour les secteurs marqués par la disparition du petit commerce ou le développement de mono-activités. Les députés ont également prolongé d'un an le droit de préemption des communes sur les baux commerciaux. Les communes bénéficieront aussi d'informations complémentaires concernant le nombre de salariés du cédant et la nature de leur contrat de travail.

Les députés ont achevé le 13 février 2014 l'examen du projet de loi relatif à l'artisanat, au commerce, et aux très petites entreprises dans le cadre de la procédure accélérée. "Face à la désertification rampante qui s'étend partout dans nos territoires, au syndrome du dernier commerçant dans les territoires ruraux, au syndrome des rues mortes et des nouveaux quartiers sans commerce dans le milieu urbain, nous ne pouvions plus attendre, il fallait agir sans tarder !", s'est félicité Fabrice Verdier, rapporteur de la commission des affaires économiques (député SRC du Gard). Le texte comprend en effet de nombreuses mesures en matière d'urbanisme commercial. Il fusionne ainsi le permis de construire et l'autorisation préalable d'exploitation. Il modifie parallèlement la représentation des élus locaux dans les commissions départementales d'aménagement commercial (CDAC) - leur nombre passera de 5 à 7 - et dans la Commission nationale d'aménagement commercial (Cnac). En commission, les députés avaient décidé de porter de 8 à 11, le nombre de membres de la Cnac, dont un représentant des maires de France et un représentant de l'Assemblée des départements de France. Un amendement adopté en séance publique par les députés prévoit d'ajouter encore un douzième membre à la Cnac, désigné par l'Association des régions de France. "Cet ajout nous semble d'autant plus justifié que la loi du 13 août 2004 transfère aux conseils régionaux des compétences en matière de développement économique et d'aménagement du territoire", détaille l'exposé sommaire de l'amendement.

Un droit de préemption facilité

Le texte facilite également le droit de préemption des communes lors de la vente de locaux commerciaux pour maintenir une diversité commerciale en centre-ville. Cette pratique est peu utilisée par les collectivités car complexe. Le projet de loi donne aux collectivités la possibilité de déléguer ce droit de préemption à un établissement intercommunal, un concessionnaire en aménagement ou une société d'économie mixte (Sem). Dans un amendement, les députés ont ajouté la nécessité de donner des informations complémentaires à la structure qui préempte, concernant le nombre de salariés du cédant et la nature de leur contrat de travail. "La structure qui préempte, doit pouvoir, là aussi, être informée pour pouvoir mieux évaluer les enjeux sur l'emploi local de la fermeture ou du changement du type d'activité, détaille l'exposé sommaire de l'amendement, ces deux aspects peuvent peser réellement sur la décision ou non de préempter." Le délai accordé à la structure qui préempte a également été relevé à trois ans dans le projet de loi, contre deux ans actuellement. C'était notamment une revendication des maires de petites villes (lire ci-contre notre article du 13 février 2014). "C'est une avancée considérable au service des élus pour une politique commerciale de centre-ville ou de centre-bourg, dans lesquels, parfois, les meilleurs emplacements restent malheureusement inaccessibles aux entreprises artisanales et commerciales", a affirmé Alain Calmette député SRC du Cantal durant les débats.

Un nouveau "contrat de revitalisation commerciale" expérimenté

Autre modification apportée par les députés : l'expérimentation pendant cinq ans d'un "contrat de revitalisation commerciale" pour des zones désertifiées ou dégradées. Un amendement gouvernemental adopté en séance prévoit ainsi d'expérimenter cette nouvelle forme de contrat qui aura pour but de favoriser la diversité, le développement et la modernisation des activités dans des périmètres marqués par une disparition progressive des activités commerciales ou un développement de la mono-activité. L'Etat, les collectivités territoiriales et leurs établissements publics pourront charger l'opérateur du contrat de revitalisation commerciale d'acquérir les biens nécessaires à sa mise en oeuvre. Il s'agit d' "offrir aux élus la possibilité d'intervenir en matière de dynamisme commercial sans lien direct avec une opération d'aménagement et donc d'anticiper sur les difficultés que pourraient être celles de l'animation commerciale". Dans le cadre de ce contrat, l'opérateur choisi pourra exercer le droit de préemption, comme le souligne un amendement adopté en séance. A noter que ces contrats diffèrent des "contrats de bourgs" évoqués par le Premier ministre lors du dernier congrès des maires, qui, outre des mesures de revitalisation, comprendront aussi des dispositions en matière de logement. Un premier appel à projets doit prochainement être lancé.
La question des baux commerciaux est également abordée dans le projet de loi. Leur régime vieux de 60 ans a été réformé. Le texte met en place un droit de préférence pour le locataire en cas de vente du local commercial occupé. Il impose l'indice des loyers commerciaux (ILC) pour la hausse des loyers, au détriment de l'indice du coût de la construction (ICC) pour mieux prendre en compte le niveau d'activité réel des commerçants. Le texte prévoit aussi le lissage sur plusieurs années de l'augmentation de loyers en limitant la hausse à 10% par an. Il porte enfin la durée des baux dérogatoires de deux à trois ans pour faciliter le recours à ce type de baux et les rendre plus attractifs pour les commerçants souhaitant tester leur activité sans s'engager dans un bail commercial plus contraignant.

Le Fisac rénové

Le projet de loi sur l'artisanat réforme également le Fonds d'intervention pour les services, l'artisanat et le commerce (Fisac). "Paralysé par la contradiction entre la croissance des besoins sur les territoires les plus fragiles et les contraintes budgétaires, le Fisac est refondé sur de nouvelles bases", a signalé Sylvia Pinel, ministre de l'Artisanat, du Commerce et du Tourisme, le 12 février, lors de la discussion générale sur le projet de loi, rappelant qu'un abondement de 35 millions d'euros avait été accordé au fonds pour l'année 2013 et un abondement identique pour 2014 pour résoudre le problème des 1.500 dossiers en stock. Avec ce projet de loi, le fonds va passer d'une logique de guichet à une logique de projets. Les crédits seront désormais attribués par appel à projets national, selon des priorités fixées par le gouvernement, "comme l'accessibilité aux personnes en situation de handicap ou encore la sécurité des commerces", a précisé Sylvia Pinel dans un communiqué publié le 13 février, ajoutant que "ce fonds doit permettre à tous les territoires, notamment dans les zones rurales et les quartiers politique de la ville, de bénéficier d'un accompagnement". La ministre assure que les crédits seront "connus de tous" et que les "décisions seront rendues dans des délais indiqués à l'avance", allusion au manque de ressources de ces derniers temps. Des modifications qui n'ont pas satisfait tout le monde, à l'image du député UDI du Territoire de Belfort. "S'agissant de la réforme du Fisac, nous regrettons simplement que le gouvernement ait fait le choix de restreindre son champ d'intervention plutôt que de rechercher à pallier le manque de moyens et de lisibilité de cet outil pourtant majeur pour la préservation d'un tissu entrepreneurial de proximité, notamment en milieu rural", a ainsi signalé Michel Zumkeller.

Un régime unique pour la micro-entreprise

Enfin, le projet de loi s'attaque au statut de l'autoentrepreneur. La volonté du gouvernement de modifier le statut, avec des seuils de chiffres d'affaires réduits, avait provoqué la fronde des "poussins". Finalement, le projet de loi crée un régime unique, simplifié de la micro-entreprise, qui va bénéficier de certains aspects du régime des autoentrepreneurs, dont la simplicité dans l'inscription sur internet, et le calcul des impôts et cotisations sociales en pourcentage du chiffre d'affaires. "Les autoentrepreneurs deviennent des micro-entreprises", a résumé la ministre. Les seuils de chiffres d'affaires à ne pas dépasser n'ont pas été réduits. Ils sont maintenus à 32.600 euros pour l'artisanat et les professions libérales et 80.500 pour les commerces. Le projet de loi entérine en revanche la nécessité pour les artisans d'indiquer sur les factures et devis les qualifications qu'ils possèdent, pour attester de leur compétence professionnelle. Les entrepreneurs individuels qui relèvent de l'artisanat devront aussi suivre obligatoirement le stage préalable d'installation, valable pour tous les autres artisans. "Nous en arrivons à un texte plutôt positif, même si j'ai envie de dire : que d'énergie dépensée, que de temps gaspillé, que d'agitation inutile, que de 'poussins' en colère, que de 'pigeons plumés', que d'autoentrepreneurs déboussolés et que d'artisans désorientés", a toutefois déploré Damien Abad, député UMP de l'Ain…
Le vote définitif de l'Assemblée sur le texte aura lieu le 18 février.

 

Pour aller plus loin

Voir aussi

Abonnez-vous à Localtis !

Recevez le détail de notre édition quotidienne ou notre synthèse hebdomadaire sur l’actualité des politiques publiques. Merci de confirmer votre abonnement dans le mail que vous recevrez suite à votre inscription.

Découvrir Localtis