PLF 2018 - "Les moyens de l'action"... y compris au niveau local ?

Le gouvernement a présenté ce 27 septembre les grands axes et les principales mesures budgétaires et fiscales du projet de loi de finances pour 2018 ainsi que du projet de loi de programmation des finances publiques 2018-2022. Le volet finances locales avait déjà été largement dévoilé. On n'en sait donc guère plus aujourd'hui, hormis des précisions sur la CVAE. On retrouve en revanche la traduction de divers plans récemment annoncés, qu'il s'agisse d'emploi, de social, de transition énergétique... ou de logement.

Le gouvernement a présenté ce mercredi 27 septembre l'essentiel des mesures contenues dans son projet de loi de finances (PLF) pour 2018 ainsi que dans le projet de loi de programmation des finances publiques 2018-2022. Des mesures devant, sous le slogan "Les moyens de l'action", permettre de concilier "transformation de l'économie", baisse des prélèvements et réduction du déficit public. Un exercice d'équilibrisme.
Pour le premier budget du quinquennat Macron, l'exécutif avait d'emblée assumé l'idée de "faire des choix forts", de sortir de la "politique du rabot". Quitte, forcément, à faire des déçus. D'où, dans le même temps, le souci de faire entendre que les réformes "bénéficieront à tous les Français sans exception" et de mettre l'accent sur les gains attendus pour les uns et les autres en termes de pouvoir d'achat (l'un des documents diffusés mercredi par Bercy, sous la forme d'un petit livret illustré, s'intitulant même "Ce que le gouvernement fait pour votre pouvoir d'achat").

15 milliards d'économies

Dans ses prévisions, le ministère de l'Economie parie sur une croissance de 1,7% l'an prochain, semblable à celle prévue en 2017. Une prévision jugée "raisonnable" par le Haut Conseil des finances publiques (HCFP). Le gouvernement se veut également prudent pour le reste du quinquennat. La croissance devrait stagner à 1,7% jusqu'en 2021, puis se hisser à 1,8% en 2022, malgré les réformes prévues pour stimuler l'activité. "Tant mieux si nous avons de bonnes surprises", a déclaré Bruno Le Maire mercredi matin lors d'une conférence de presse commune aux trois ministres hébergés à Bercy.
Autre indicateur clef : selon le gouvernement, le déficit public devrait refluer l'an prochain à 2,6% du produit intérieur brut (PIB), après 2,9% cette année.Cette baisse, destinée à consacrer le retour de la France dans les clous budgétaires européens, devrait permettre à la dette publique de se stabiliser à 96,8% du PIB, avant un reflux à partir de 2019. Avec cette deuxième année consécutive sous la barre des 3%, la France va pouvoir "sortir de la procédure de déficit public excessif" dans laquelle elle se trouve depuis 2009 et "retrouver de la crédibilité" auprès de ses partenaires européens, s'est félicité Bruno le Maire.
Pour tenir ses engagements, le gouvernement a prévu de baisser de 0,7 point le taux de dépense publique, en réalisant près de 15 milliards d'économies par rapport à la "hausse spontanée" (ou "hausse tendancielle") des dépenses. Un montant inférieur à ce qui avait été annoncé durant l'été (20 milliards), mais néanmoins "sans précédent", selon Bercy.
Sur ces 15 milliards, a résumé Gérald Darmanin, sept seront réalisés sur le périmètre de l'Etat, cinq sur celui de la Sécurité sociale… tandis que "trois milliards" relèveront "des collectivités locales et du Grand Paris". Vendredi, le gouvernement avait indiqué que l'effort demandé aux collectivités, de 13 milliards au total d'ici 2022, se traduirait par 2,6 milliards d'économies en 2018. Quid du gap de 400 millions ? Interrogé sur ce point, le ministre de l'Action et des Comptes publics a confirmé qu'il s'agira d'une baisse de crédits liée aux chantiers du Grand Paris Express.

Collectivités : un scénario confirmé

Sur le volet dépenses et recettes des collectivités, tout ou presque avait déjà été dit vendredi dernier par Gérald Darmanin et Gérard Collomb a l'issue de leur rencontre avec les associations d'élus puis mardi devant les membres du Comité des finances locales.
Les documents fournis à la presse par Bercy ce mercredi ne font donc que confirmer les choses, que ce soit pour le PLF ou pour la "trajectoire de finances publiques" 2018-2022 : un total de 13 milliards d'économies "en dépenses de fonctionnement par rapport à leur évolution spontanée", une "contractualisation individuelle entre l’Etat et les plus grandes
collectivités", une "nouvelle règle prudentielle" complétant la règle d'or actuelle afin de mieux encadrer le ratio d'endettement des collectivités, un "effort en matière de soutien à l’investissement local avec notamment la pérennisation de la dotation de soutien à l’investissement"... Sur la contractualisation avec les 319 plus grandes collectivités, on n'en saura pas plus pour le moment sur le "bonus-malus" envisagé (dotations ou ressources fiscales ?), celui-ci devant être "déterminé de manière concertée dans le cadre de la Conférence nationale des territoires".
S'agissant de la réforme de la taxe d'habitation, là encore, seulement des confirmations : une mise en œuvre sur trois ans (diminution de 30% en 2018, de 65% l'année suivante), uniquement pour la résidence principale, le choix du dégrèvement… Le coût pour l'Etat de cette réforme sera de 3 milliards en 2018, 6,6 milliards en 2019, puis 10,1 milliards à partir de 2020.

CVAE : retouches en vue

En revanche, quelques éléments nouveaux apparaissent du côté de la fiscalité des entreprises. Est ainsi annoncée une "exonération de cotisation foncière pour les entreprises" (CFE) - ainsi que de taxes additionnelles à la cotisation foncière des entreprises affectées aux chambres consulaires - "pour les entrepreneurs imposés sur une base minimum et dont le chiffre d’affaires est inférieur à 5.000 euros à partir de 2019". Sans précision, pour l'heure, sur les compensations envisagées.
Surtout, le PLF 2018 entend revoir les modalités de calcul et de répartition de la CVAE. D'une part, "pour les groupes qui pourraient être intégrés fiscalement (qu’ils soient ou non effectivement intégrés), le taux de CVAE serait dorénavant calculé en tenant compte du chiffre d’affaires de l’ensemble des sociétés membres du groupe, en prenant en compte les entités même non intégrées fiscalement", explique Bercy. D'autre part, en termes de répartition, le PLF viendra abroger une mesure qui prévoyait, à compter de 2018, "une consolidation de la valeur ajoutée des entreprises au niveau du groupe et non au niveau de chacune de ses entreprises", ce qui aurait entraîné "d’importants transferts de recettes entre collectivités" et une instabilité de ces recettes. Les choses pourront être réexaminées dans le cadre de la Conférence nationale des territoires, précise Bercy, qui prévoit en outre de maintenir, dans le contexte de la révision des valeurs locatives des locaux commerciaux, l'avantage en faveur des collectivités accueillant des établissements industriels.

Revalorisations de prestations sociales

"Redonner du pouvoir d'achat aux Français", "Lutter efficacement contre le chômage et inciter à l'activité", "Compétitivité et attractivité", "Soutenir l'investissement et l'innovation", "Accompagner la transition écologique", "Transformer la politique du logement"… Tous ces axes devant, selon la terminologie de Bercy, structurer les lois de finances des années à venir, à commencer par 2018, toute une série d'autres mesures fiscales ou budgétaires intéresseront les collectivités locales. Localtis y reviendra dans ses prochaines éditions, une fois connu le contenu précis des articles du PLF.
On mentionnera d'ores et déjà que plusieurs engagements pris par l'exécutif dans le champ des prestations sociales trouvent leur traduction budgétaire, dont la revalorisation en deux temps (2018-2019) de l'allocation aux adultes handicapés (AAH), la revalorisation de l’allocation de solidarité aux personnes âgées (Aspa) et anciennes allocations du minimum vieillesse et la revalorisation de la prime d'activité.
Sur le terrain de l'économie et de l'emploi, les acteurs locaux de l'insertion retiendront par exemple la création d'un nouveau type d'emplois francs dans les quartiers prioritaires politique de la ville (prévu par le plan d'investissement dans la formation, mais pas avant 2020) ou bien encore l'extension, à l'ensemble des personnes s'installant en tant que travailleurs indépendants, de "l'exonération Accre" (aide aux chômeurs créateurs et repreneurs d'entreprise), qui consiste en une exonération de charges sociales durant la première année d'une entreprise.
A une autre échelle, on rappellera le remplacement du crédit d’impôt pour la compétitivité et l’emploi (CICE) et du crédit d’impôt de taxe sur les salaires (CITS, ou "CICE associations") par un allégement de charges. Une disposition qui, pour le secteur associatif, doit générer un gain de 1,4 milliard d'euros, comme l'avait expliqué le gouvernement la semaine dernière.

Premières traductions budgétaires du "plan Climat"...

L'axe de la transition écologique se traduira notamment par l'alignement de la fiscalité du gazole sur celle de l'essence et les dispositions contre les véhicules les plus polluants, par la reconduction du crédit d'impôt pour la transition énergétique (CITE, reconduit pour un effort budgétaire de 875 millions d'euros, mais transformé en prime versée à la réalisation des travaux dès 2019), le "chèque énergie" destiné aux ménages en situation de précarité énergétique, et par les opérations de rénovation thermique des logements via l'Anah. Autant de dispositions récemment détaillées par Nicolas Hulot dans le cadre de son "plan Climat". L'enveloppe du ministère de la Transition écologique augmentera de 500 millions d'euros en 2018, à 10,4 milliards.
En dehors de ce volet énergétique, budgétairement parlant, le logement apparaît bien comme l'un des perdants du PLF en se voyant imposer des économies à tous les étages. "La France consacre plus de 40 milliards d'euros à la politique du logement, soit 2% de sa richesse intérieure, un niveau très supérieur à la plupart de ses voisins européens", affirme le document budgétaire détaillé mercredi en Conseil des ministres. Dans ce contexte, il s'agit de "réduire la dépense publique" tout "en améliorant les résultats" de cette politique. Le budget du ministère de la Cohésion des territoires tombera ainsi de 18,3 milliards d'euros à 16,5 milliards l'an prochain puis à 15 milliards en 2019, soit une baisse de 18% en deux ans.

... et de la "stratégie logement"

En ligne de mire, cela n'aura échappé à personne, les aides personnelles au logement (APL) qui représentent pour l'Etat une "charge lourde et dynamique" de 18 milliards d'euros sans que soient atteints "les objectifs d'amélioration des conditions de logement", selon Bercy. Engagée sur deux ans, leur réforme porte d'abord sur le secteur social, avec une réduction de la dépense publique de 1,7 milliard d'euros sur 2018. Celle-ci provient, pour 1,5 milliard, d'une baisse de loyers imposée aux bailleurs sociaux, censée rendre "indolore", pour les locataires HLM, la réduction de leur APL pour un montant global équivalent. On sait les réactions que cela suscite au sein du mouvement HLM actuellement réuni en congrès à Strasbourg. Cette baisse doit être compensée par une stabilisation du taux du livret A et par un allongement de la dette des organismes HLM. Autre compensation prévue : le supplément de loyer de solidarité (SLS) se déclenchera "au premier euro".
Par ailleurs, le gouvernement proroge, comme annoncé il y a tout juste une semaine lors de la présentation de la "stratégie logement", deux aides publiques: l'avantage fiscal Pinel, et le Prêt à taux zéro (PTZ). Tous deux sont reconduits pour quatre ans mais recentrés sur les zones tendues. Comme annoncé également, un abattement fiscal sera appliqué sur les plus-values de cession de terrains en vue de la construction de logements.
Enfin l'enveloppe consacrée à la rénovation urbaine dans le cadre du NPNRU sera doublée à 10 milliards d'euros, mais son financement n'est pour l'heure pas détaillé.

 

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