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Industrie - Les sénateurs veulent renouer avec la "culture industrielle"

La mission sénatoriale sur la désindustrialisation a enfin remis ses conclusions, mercredi 6 avril, après un an de travail. Les sénateurs ne sont pas parvenus à faire taire toutes leurs divergences, après avoir reporté une première fois la présentation de leur rapport. Ce dernier, intitulé "Réindustrialisons la France", a été voté par quatorze d'entre eux, neuf ayant voté contre. Ils se sont toutefois entendus sur un certain nombre de points.
Tout d'abord sur le diagnostic. La France a perdu 700.000 emplois industriels dans la dernière décennie. Deux millions si l'on remonte au début des années 1980, comme le montre une étude de la direction générale du Trésor publiée l'an dernier. "Il y a une trentaine d'années, on a laissé de côté la machine-outil, c'est un abandon de première classe. Il faut sortir de cette idéologie post-industrielle", s'insurge le président de la mission, le sénateur socialiste du Doubs, Martial Bourquin. La machine-outil, qui fait le succès industriel de l'Allemagne où la mission s'est rendue en voyage d'étude. "En Allemagne, 80% des chefs d'entreprise sont ingénieurs, c'est le rapport inverse en France", constate le rapporteur Alain Châtillon, sénateur UMP de Haute-Garonne. Les résultats sont là : l'industrie représente encore 30% de la valeur ajoutée outre-Rhin, contre 16% en France. Il n'y a pourtant pas de fatalité et, selon le président du Groupe des fédérations industrielles (GFI), Pierre Gattaz, interrogé récemment par Localtis, l'année 2011 pourrait marquer un tournant (voir ci-contre notre article du 4 avril 2011). A condition de créer un contexte favorable à ce retour en grâce. C'est ce à quoi se sont employés les sénateurs qui formulent dix-sept propositions pour renouer avec la "culture industrielle".

Ecosystèmes industriels locaux

Certaines sont déjà sur le métier, comme la fusion entre le contrat de transition professionnelle et la convention de reclassement personnalisée pour les licenciés économiques, ou encore l'appui à l'export des entreprises, puisque les régions et l'Etat viennent de s'entendre sur un partenariat pour créer une sorte de guichet unique (lire ci-contre notre article du 7 avril 2011). Les sénateurs veulent favoriser l'ancrage territorial des entreprises en renforçant les écosystèmes industriels locaux, comme les grappes d'entreprises. Ils préconisent aussi un "grand plan d'action" en direction des PME et TPE industrielles, notamment en subordonnant les aides publiques à la mise en réseau des entreprises. Des aides, notamment européennes, qui doivent être rendues plus lisibles au niveau régional et conditionnées au maintien d'activité sur une longue période. "Il est inadmissible qu'une entreprise française ou étrangère vienne prendre de l'argent et parte à l'étranger après deux ou trois ans", dénonce Alain Châtillon.
Autre axe : intensifier la recherche et l'innovation notamment par le biais du crédit impôt recherche (CIR) qui doit bénéficier davantage aux PME alors que les grands groupes et leurs filiales en captent près du tiers. Les sénateurs proposent de rendre les pôles de compétitivité éligibles au CIR, une solution parmi d'autres pour pérenniser leurs financements après 2011. La question des brevets est aussi au coeur du rapport : meilleure protection, fiscalité plus incitative, etc.
Mais quelques points de divergences "importants" demeurent, selon Martial Bourquin, qui a voté contre le rapport : "La question du coût du travail, le rôle des banques et du crédit, et la taxe professionnelle." Un sujet sensible qui n'a pas manqué de surgir. "La taxe professionnelle fait cruellement défaut. Cette coupure avec les territoires est une erreur", critique le sénateur du Doubs. Or, pour Alain Châtillon, au contraire, "le fait d'avoir supprimé la taxe professionnelle constitue un élément supplémentaire pour le développement industriel". Le rapport définitif sera publié à la mi-avril et fera l'objet d'un débat en séance public le 26 avril. 

 

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