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Lois de finances - Logement : la LFI 2015 et la LFR 2014 font le plein de mesures

La loi de finances pour 2015 et la loi de finances rectificative pour 2014, toutes deux publiées au Journal officiel du 30 décembre 2014, comptent pas moins de 25 mesures relatives au logement. La très grande majorité d'entre elles ont un rapport direct avec la volonté du gouvernement d'enrayer la chute de la construction neuve, qui s'est notamment concrétisée par l'annonce d'un "plan de relance du logement" à la fin de l'été (voir notre article ci-contre du 29 août 2014). Une réaction indispensable, alors que la plupart des experts prévoient que le nombre des constructions neuves pourrait passer sous la barre des 300.000 sur l'année 2014.

Lutter contre la rétention du foncier

Une première série de mesures s'attaque à la question du foncier - ou plutôt de la rétention du foncier -, identifiée comme le principal frein à la construction de logements dans les zones en tension (voir notre article ci-contre du 24 novembre 2014). Cinq mesures sont ainsi prévues sur les plus-values immobilières.
- Instauration d'un abattement de 30% de l'IRPP (impôt sur le revenu des personnes physiques ) et des prélèvements sociaux sur les plus-values réalisées sur les cessions de droits à bâtir ou de terrains à bâtir, pour toutes les promesses de ventes signées entre le 1er septembre 2014 et le 31 décembre 2015, sous réserve que l'opération ne concerne pas des proches du cédant et se réalise effectivement avant le 31 décembre de la deuxième année suivant celle de la date de signature de l'avant-contrat (loi de finances pour 2015, article 4-II). Cet article prévoit également un alignement du régime d'imposition des cessions de terrains à bâtir sur celui des cessions d'immeubles bâtis (plus favorable).
- Instauration d'un abattement de 30% sur les cessions de biens immobiliers situés en zone tendue, en vue d'opérations de démolition-reconstruction de logements (LF, art.4-III). La mesure concerne les communes où s'applique la taxe sur les logements vacants. Les cessions à des proches du vendeur en sont exclues.
- Elargissement de l'exonération des plus-values en cas de cession d'un immeuble en vue d'y réaliser des logements sociaux (LF, art.9).
- Prolongation jusqu'au 31 décembre 2017 de l'exonération des plus-values sur les cessions de droits de surévaluation (LF, art.10).
- Harmonisation des modalités d'imposition des plus-values immobilières des personnes physiques résidant hors de France (loi de finances rectificative pour 2014, article 60). La mesure prévoit un taux unique de 19% pour ces plus-values, quel que soit le lieu de résidence du vendeur. Jusqu'alors, le taux était de 19% pour les résidents de l'Union européenne ou de l'Espace économique européen et de 33,3% pour les résidents hors UE et EEE. Le taux reste en revanche fiché à 75% pour les plus-values des personnes physiques résidant dans un Etat ou territoire non coopératif (ETNC).

Alléger le coût de certaines opérations immobilières

Les dispositions fiscales ne se limitent pas au régime des plus-values foncières ou immobilières. Plusieurs mesures concernent en effet la TVA applicable aux opérations immobilières.
- Mise en place d'une TVA à taux réduit (5,5%) pour les opérations d'accession sociale à la propriété dans les 1.300 quartiers prioritaires de la politique de la ville de métropole ou pour les opérations situées à une distance de moins de 300 mètres des limites de ces quartiers (LF, art.17).
- Mise en place d'une TVA à taux réduit (5,5%) pour une série de travaux réalisés par les organismes HLM (LF, art.19) : travaux lourds de rénovation (dans les logements PLUS ou PLAI, les structures d'hébergement temporaire ou d'urgence, les établissements pour personnes âgées ou handicapées...) et livraisons à soi-même de travaux de rénovation, amélioration, transformation, ou aménagement dans le cadre d'opérations financées par un PLUS, un PLAI ou une subvention de l'Anru. Ces opérations complètent la liste d'opérations à 5,5% en vigueur depuis le 1er janvier 2014 (désamiantage, protection contre l'incendie, accessibilité, mise aux normes...).
- Réduction à 10% - sous conditions - de la TVA sur les logements intermédiaires résultant de la transformation de locaux à usage de bureaux (LFR, art.53).

Un coup de pouce à l'investissement locatif...

La relance de l'aide à l'investissement locatif dans le logement intermédiaire - après l'échec relatif du dispositif "Duflot" - est une autre composante du plan de relance. La loi de finances 2015 comporte deux mesures importantes à ce titre :
- Mise en place, à compter 1er janvier 2015, du dispositif "Pinel" d'aide à l'investissement locatif intermédiaire (LF, art.5). Le principal apport de ce nouveau dispositif réside dans l'assouplissement de ses modalités, notamment avec la possibilité de ramener de neuf à six ans la durée de mise en location, la réduction d'impôt passant alors de 18% à 12% en métropole et de 29% à 23% en outre-mer. Le "Pinel" ouvre également la réduction d'IRPP au cas d'une location à un ascendant ou un descendant de l'investisseur, ce qui n'était pas possible avec le "Duflot".
- Relèvement de 10.000 à 18.000 euros du plafond des avantages fiscaux en outre-mer (LF, art.82). Compte tenu de l'importance de la déduction fiscale sur le "Pinel outre-mer" (voir ci-dessus), le plafond de 10.000 euros suffisait à écrêter la déduction fiscale, même si l'investisseur ne bénéficiait d'aucune autre niche fiscale. D'où le relèvement du plafond global des avantages fiscaux, qui évite cet effet d'écrêtement automatique et rend donc le "Pinel" plus attractif.

...et à l'accession à la propriété

Côté accession à la propriété, la loi de finances pour 2015 et la loi de finances rectificative pour 2014 comportent également deux mesures importantes :
- Assouplissement des modalités du prêt à taux zéro (LF, art.59 et LFR, art.14) : ces deux articles apportent divers aménagements au dispositif du PTZ. Parmi celles-ci, on retiendra notamment l'ouverture du PTZ aux opérations d'acquisition-amélioration dans l'ancien - mais uniquement dans 5.920 petites communes situées à 95% en zone C -, avec une quotité minimum de travaux de 25% (voir notre article ci-contre du même jour) ou encore la suppression la condition de performance énergétique pour l'éligibilité au PTZ. Ces dispositions législatives complètent les modifications déjà introduites par un décret et un arrêté d'août 2014 sur les modalités et le zonage du PTS (voir notre article ci-contre du 28 août 2014).
- Réforme de l'aide personnalisée au logement "accession" (LF, art. 93) : ce fut la mesure la plus contestée de la loi de finances, les constructeurs redoutant même que son application déclenche une "catastrophe" (voir notre article ci-contre du 27 octobre 2014). L'APL accession - qui était au demeurant en perte de vitesse - se voit en effet transformée en un dispositif de sécurisation des ménages en accession, en prévoyant l'attribution de l'aide en cas de chute de plus de 30% des revenus du bénéficiaire, par rapport au moment où le prêt immobilier a été signé. Le gouvernement a maintenu cette disposition, malgré l'opposition ouverte d'une partie de sa majorité. Celle-ci a toutefois obtenu le report de la mise en œuvre de la réforme au 1er janvier 2016. Ce délai devrait être mis à profit pour réaliser une étude d'impact de la réforme, en vue d'en amender les modalités, voire d'en abandonner le principe (voir notre article ci-contre du 6 novembre 2014).

Amélioration des logements

D'autres mesures portent sur l'amélioration des logements ou de leur performance énergétique. C'est le cas notamment des dispositions suivantes :
- Remplacement du crédit d'impôt développement durable (Cidd) par le crédit d'impôt pour la transition énergétique, ou Cite (LF, art.3). Outre la dénomination, les principaux changements portent sur l'instauration d'un taux unique de 30%, l'ajout de nouveaux travaux à la liste des opérations éligibles (dont l'installation d'un dispositif de recharge pour les véhicules électriques), l'introduction de dépenses éligibles spécifiques aux conditions climatiques des DOM...
- Extension de l'éco-PTZ aux DOM, pour tous les logements dont le permis de construire est postérieur au 1er mai 2010, ce qui correspond à la date d'entrée en vigueur de la RTAA DOM, autrement dit de la réglementation thermique, acoustique et aération dans les départements d'outre-mer (LF, art.14).
- Prolongation, jusqu'au 31 décembre 2017, du dispositif de crédit d'impôt en faveur de l'aide aux personnes, destiné à financer notamment l'installation ou le remplacement d'équipements visant à favoriser le maintien à domicile des personnes âgées ou des personnes handicapées (LF, art.73). Ce dispositif - et sa prolongation - s'appliquent également au financement des diagnostics préalables et des travaux prescrits par un plan de prévention des risques technologiques (PPRT) avec, dans ce cas, la fixation d'un plafond unique de dépenses éligibles de 20.000 euros par logement.
- Exonération des opérations de requalification des copropriétés dégradées (Orcod) d'intérêt national (LFR, art.40). Ces opérations bénéficient ainsi d'une exonération des droits de mutation à titre gratuit (DMTG) pour les biens fonciers et immobiliers de l'Etat à un établissement public foncier. De même, la LFR exonère de la taxe foncière sur les propriétés bâties - pour une durée de quinze ans - les logements acquis par un EPF dans le cadre d'une Orcod d'intérêt national. Elle dispense aussi - toujours dans le même cadre - les acquisitions d'immeubles réalisées par un EPF de la taxe de publicité foncière et des droits d'enregistrement.

Diverses dispositions fiscales

A toutes ces mesures s'ajoutent une dizaine de dispositions fiscales, à commencer par celles portant sur la fiscalité locale et la détermination des valeurs locatives :
- Instauration d'une surtaxe de 20% sur les résidences secondaires situées dans des communes soumises à la taxe sur les logements vacants (LFR, art.31). Avec la réforme de l'APL accession, cette disposition - laissée à la discrétion du conseil municipal - a été la plus âprement discutée. Trois cas d'exonération sont cependant prévus. Le Conseil constitutionnel a validé l'instauration de cette surtaxe.
- Majoration de la valeur locative cadastrale des terrains situés en zone tendue, donc concernés par la taxe sur les logements vacants (LFR, art.31) : la majoration est de 25% de la valeur, auquel s'ajoute un forfait de 5 euros par mètre carré pour les impositions 2015 et 2016, puis de 10 euros à partir de 2017.
- Prorogation jusqu'au 31 décembre 2018 de l'exonération de la taxe foncière sur les propriétés bâties (TFPB), pour les logements neufs à usage locatifs répondant à divers cas de figure (LFR, art.61) : financement à plus de 50% par des prêts aidés, subvention de l'Anah ou de l'Anru...
- Prorogation jusqu'au 31 décembre 2020 de l'abattement de 30% sur la base d'imposition de la TFPB au bénéfice de certains logements sociaux situés dans les quartiers prioritaires de la politique de la ville (LFR, art.62).
Pour être complet, on retiendra aussi diverses mesures portant sur les droits de mutation (DMT) :
- Exonérations temporaires de la DMTG (droits de mutation à titre gratuit) pour certaines donations entre vifs (LF, art.8).
- Exonération partielle de la DMTG pour les immeubles et les droits immobiliers dont les titres de propriété ont été reconstitués (LF, art. 15).
- Instauration définitive de la possibilité de relever de 3,8% à 4,5% le taux départemental de la DMTO (droits de mutation à titre onéreux), qui n'était normalement ouverte que jusqu'au 29 février 2016 (LF, art.116-II).
Enfin, un article (LFR, art.44) apporte diverses modifications à la taxe d'aménagement, qui concerne les communautés urbaines et les communes dotées d'un PLU ou d'un POS. Les modifications portent notamment sur la définition du fait générateur.

Jean-Noël Escudié / PCA

Références : loi 2014-1654 du 29 décembre 2014 de finances pour 2015 ; loi 2014-1655 du 29 décembre 2014 de finances rectificative pour 2014 (Journal officiel du 30 décembre 2014).

 

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