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Urbanisme - Modernisation du PLU : le décret est paru

Prenant la suite de l'ordonnance prévue par la loi Alur, une série de décrets s'attèle à la partie réglementaire de la recodification du code de l'urbanisme, ouvrant aux communes et intercommunalités de nouveaux outils dans le cadre d'un plan local d'urbanisme modernisé et recentré autour du projet d'aménagement.

Initiée par l'ordonnance du 23 septembre 2015 (lire notre article ci-contre), l'entreprise de recodification du code de l'urbanisme (CU) - principalement son livre Ier - s'est achevée ce 29 décembre par la publication de deux décrets relatifs à la partie réglementaire. Pour l'essentielle à droit constant, cette nouvelle codification opère, moyennant une réécriture du titre V, une modernisation du contenu du plan local d'urbanisme (PLU). C'est précisément cette partie du projet que le ministère du Logement avait ouvert à la concertation en septembre dernier (lire notre article ci-contre). Un premier décret (n° 2015-1782), prévu par la loi Alur, précise principalement les obligations des maîtres d'ouvrage quant à la concertation préalable facultative du public pour les projets de permis de construire ou d'aménager situés sur un territoire couvert par un document d'urbanisme (art. L. 300-2 du CU). Ce texte ouvre par ailleurs la possibilité pour le maître d'ouvrage de joindre l'avis de l'autorité environnementale à sa demande. C'est un second décret (n° 2015-1783) qui s'attache à réformer le contenu du plan local d'urbanisme (PLU) en réaffirmant "le lien entre le projet de territoire, la règle et sa justification".

Secteurs sans règlement

Il s'agit d'offrir aux communes et intercommunalités de nouveaux outils à appliquer "à la carte, en fonction de chaque projet de territoire", relève la ministre Sylvia Pinel. Par exemple, les élus pourront "définir des secteurs spécifiques d'aménagement sans règlement pré-établi". L'article R. 151-8 ouvre ainsi la possibilité d'encadrer les zones urbaines et à urbaniser par de simples orientations d'aménagement et de programmation (OAP) sans recours au règlement. L'article R. 151-19 ouvre également la possibilité de couvrir certaines zones urbaines d'un PLU intercommunal par le règlement national d'urbanisme (RNU). Le contenu du règlement est simplifié et recentré sur ses enjeux (R. 151-9 à R. 151-16). L'article R. 151-9 est ainsi une mesure de rappel de l'objectif du règlement du PLU : permettre la mise en œuvre du projet d'aménagement et de développement durables (PADD). L'article R. 151-11 constitue une ouverture complète au recours à la représentation graphique de la règle (la partie écrite doit le préciser) et une clarification du statut des illustrations accompagnant la règle écrite. Elles ont une valeur opposable si la partie écrite le précise. Le décret clarifie en outre les termes utilisés par les PLU en imposant un lexique national (arrêté par le ministère) définissant les termes utilisés dans les documents d'urbanisme (R. 151-15).

Destination des constructions

Le décret diminue de 9 à 5 le nombre de destinations des constructions nécessitant un suivi par les services instructeurs en cas de changement de destination (R. 151-27). Il ouvre également la possibilité de différencier les règles du règlement entre 20 sous-destinations (contre 9 destinations auparavant) dont le contenu sera précisé par arrêté ministériel (R. 151-28). Par ailleurs, les élus pourront "lors de l'implantation des bâtiments, fixer des objectifs à atteindre (comme l'ensoleillement), plutôt que de donner des règles chiffrées (comme les écarts entre les bâtiments)", indique le ministère. Les articles R. 151-12 et R. 151-13 sécurisent ces pratiques innovantes en autorisant le recours à des règles qualitatives, sous forme de prescriptions (objectifs, résultats), et à des règles alternatives. Ces dernières ne pourront toutefois servir de dérogations.

Délimitation et réglementation

Le texte offre la possibilité de délimiter des secteurs dans lesquels les règles du PLU pourront préférentiellement s'appliquer sur plusieurs parcelles contiguës lors d'un dépôt d'un permis de construire conjoint (R. 151-21). Il élargit les possibilités de classer des zones en AU (zones à urbaniser). L'article R. 151-24 est quant à lui un élargissement des possibilités de classer en zone naturelle. La partie afférente à l'usage des sols et à la destination des constructions est codifiée aux articles R. 151-27 à R. 151-38. Le décret clarifie les possibilités d'interdire ou d'autoriser des usages des sols en recourant à la destination des constructions. Il ouvre la possibilité de créer des règles permettant d'imposer une mixité des destinations ou sous-destinations au sein d'une construction ainsi que de créer des bonus de constructibilité que le règlement détermine selon l'emprise au sol et la hauteur (R. 151-37). Il permet également de définir des règles différenciées entre le rez-de-chaussée et les étages supérieurs des constructions.

Règles volumétrique et d'implantation

Le texte modernise l'écriture des règles de hauteur et d'emprise au sol (R. 151-39). Il clarifie l'expression de la règle volumétrique par objectif ainsi que la manière d'exprimer la densité suite à la suppression du coefficient d'occupation des sols (COS). L'article R. 151-41 actualise l'expression des règles volumétriques d'implantation avec possibilité de réglementer les emprises et les hauteurs maximales comme minimales. Il opère une clarification de la portée de la réglementation sur l'aspect extérieur des bâtiments et modernise la rédaction des possibilités de réglementer le patrimoine en intégrant la conservation. Le décret ouvre également la possibilité d'imposer une part minimale de surfaces non imperméabilisées ou éco-aménageables, en application de la loi Alur (R. 151-43). Il permet au règlement de fixer les conditions de réalisation des aires de stationnement et de les minorer en cas de destinations multiples des constructions permettant la mutualisation (R. 151-45). L'article R. 151-46 intègre l'équivalence entre logement et places d'hébergement pour personne âgée dépendante (loi de simplification de la vie des entreprises). Enfin, le décret apporte la possibilité de réglementer la desserte des terrains par les services publics de collecte des déchets (R. 151-47).

Régime transitoire

Le décret - qui entre en vigueur le 1er janvier 2016 - prévoit une application progressive "avec droit d'option pour les collectivités". Pour les procédures d'élaboration ou de révision générale en cours initiées avant cette date, les dispositions issues du décret s'appliqueront "uniquement si une délibération du conseil communautaire ou du conseil municipal se prononçant en faveur de l'intégration du contenu modernisé du PLU intervient au plus tard lors de l'arrêt du projet". Les collectivités se lançant dans une élaboration ou une révision générale de leur PLU après le 1er janvier 2016 intégreront quant à elles l'ensemble du contenu modernisé du PLU. Les PLU approuvés avant l'entrée en vigueur de ce décret restent régis par le code de l'urbanisme en vigueur au 31 décembre 2015 jusqu'à leur prochaine révision.

A noter, un troisième décret, dont la publication est annoncée par le ministère "dans les jours qui viennent", prévoit d'allonger la durée de validité des permis de construire, "qui passe de deux à trois ans, avec deux prolongations possibles d'un an sur demande du maître d'ouvrage". Il s'agit en réalité d'une mesure du plan de relance, qui devait arriver à échéance le 31 décembre. Les collectivités pourront toutefois "refuser de prolonger le permis de construire au-delà de 3 ans, notamment en cas de modification de leurs documents d'urbanisme et des règles imposées au projet", précise le ministère.

Philie Marcangelo-Leos / Victoires-Editions

Références : décret n° 2015-1782 du 28 décembre 2015 modifiant diverses dispositions de la partie réglementaire du code de l'urbanisme ; décret n° 2015-1783 du 28 décembre 2015 relatif à la partie réglementaire du livre Ier du code de l'urbanisme et à la modernisation du contenu du plan local d'urbanisme, JO du 29 décembre 2015, p. 24529 et p. 24530.