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Nomenclature Eau : le ministère lance le chantier de simplification

La nomenclature relative aux installations, ouvrages, travaux et activités (Iota) caractérisés par leur impact sur l’eau entame une profonde mue dans un objectif de simplification. Deux décrets et quatre arrêtés, soumis à la consultation jusqu'au 26 mai prochain, balayent ainsi une vaste étendue de thématiques, allant de l’assainissement en passant par les boues d’épuration ou encore les plans d’eau et leur vidange. 

Le ministère de la Transition écologique a ouvert à la consultation, jusqu'au 26 mai prochain, la réforme de la nomenclature  "loi sur l’eau". C’est donc au tour des installations, ouvrages, travaux et activités (Iota) ayant une incidence sur l’eau ou le fonctionnement des écosystèmes aquatiques de passer à la moulinette de la simplification. Cette refonte se décline à travers sept projets de textes (deux décrets et cinq arrêtés), dont un arrêté relatif aux plans d’eau qui sera présenté ultérieurement. À la clef plusieurs modifications de rubriques et de seuils qui devraient générer, selon le ministère, "un allègement de la charge administrative pour les porteurs de projet et les services instructeurs", certains dossiers passant de l’autorisation à la déclaration. Le Conseil national d’évaluation des normes (CNEN) demande à voir. À ce stade, la fiche d’impact transmise aux membres du CNEN ne permet "pas d’identifier les catégories d’acteurs bénéficiaires des économies estimées à 1,4 million d’euros par an", relève-t-il. Ce tour de passe-passe conduit également à ajuster (par décret simple) le dossier de demande d’autorisation environnementale en cohérence avec la nouvelle architecture des rubriques.   

Fusion de rubriques

Il est notamment proposé que la rubrique 2.2.1.0 relative aux rejets susceptibles de modifier le régime des eaux soit intégralement soumise au régime de la déclaration. En contrepartie, le ministère table sur "un meilleur encadrement des rejets susceptibles de dégrader les masses d’eau" en ciblant les substances les plus "dégradantes". Plusieurs rubriques sont par ailleurs fusionnées. C’est le cas pour les plans d’eaux (3.2.3.0) et vidanges (3.2.4.0) mais également en matière d’assainissement, avec le regroupement, au sein d’une nouvelle rubrique "système d’assainissement", des rubriques 2.1.1.0 (stations d’épuration) et 2.1.2.0 (déversoirs d’orage). La France sous la menace d’un nouveau contentieux au titre de la directive n° 91/271/CEE "Eaux urbaines résiduaires" (DERU) veut faire bonne figure en introduisant cette notion de "système d’assainissement". 

Pallier les défaillances des systèmes d’assainissement

L’arrêté de référence - en date du 21 juillet 2015 - est largement retravaillé en ce sens. Même méthode avec l’intégration des règles d’évaluation de la conformité de la collecte par temps de pluie, ces dernières figurant actuellement dans une simple note technique. L’objectif est aussi de généraliser "une démarche vertueuse" en instaurant l’obligation de diagnostic permanent des réseaux de collecte (compris entre 120 et 600 kg/j de DBO5), pour lesquels les Assises de l’eau ont mis en évidence des marges de progrès importantes. Seules les stations de traitement des eaux usées (STEU) y sont pour l’instant soumises. L’échéance est fixée au 31 décembre 2020 pour les agglomérations d’assainissement générant une charge brute de pollution organique supérieure (CBPO) ou égale à 600 kg/j de DBO5 (soit l’équivalent de 10.000 habitants). Elle est toutefois repoussée au 31 décembre 2024 pour les petites agglomérations. Il est également proposé de dématérialiser le dossier de conception des ouvrages d’assainissement - destinés à collecter et traiter une CBPO inférieure ou égale à 12 kg/j de DBO5 - en remplaçant l’envoi de ce document par la saisie d’informations dans un registre électronique. La liste des agglomérations d’assainissement actuellement publiée sur le portail d’information sur l’assainissement communal sera dorénavant arrêtée par le préfet, en indiquant les systèmes d’assainissement qui y sont rattachés (art. R. 2224-6 du code général des collectivités territoriales). Là encore il s’agit de coller aux exigences de la directive Deru (notamment en matière de rapportage). Le ministère fait valoir que les périmètres "resteront inchangés", l’objectif étant exclusivement "de sécuriser la procédure avec la publication d’un arrêté local". Le CNEN reste néanmoins interrogatif "sur la dilution des responsabilités" qui pourrait découler de cette organisation. 

Approche intégrée sur les boues d’épuration

Afin de limiter les doubles classements, la rubrique 2.1.3.0 relative à l’épandage des boues de station d’épuration est modifié pour y inclure le stockage en vue d’épandage aujourd'hui réglementé par la rubrique n°2716 de la nomenclature ICPE. Cette approche intégrée de l’ensemble de la chaîne, de la production jusqu'à l’épandage des boues, devrait en particulier éviter une instruction par deux services différents (police de l’eau et police des ICPE). Autre mesure de simplification, le mélange de boues entre elles dans des unités d'entreposage ou de traitement communs est prévu, le texte supprimant l’avis préalable du préfet (art.  R. 211-29 du code de l’environnement). Le mélange de boues avec d’autres déchets demeure lui interdit. Il est néanmoins prévu que le préfet pourra l’autoriser, "sous réserve que les déchets composant le mélange soient individuellement conformes aux prescriptions techniques qui leur sont applicables en vue de l’épandage sur les sols agricoles". Le décret prévoit en outre la transmission du plan d’épandage sous format électronique, sachant que l’outil électronique Sillage permet déjà de le faire en pratique. Des clarifications sont enfin apportées sur les conditions de dépôt temporaire des boues. En zone vulnérable, la durée de dépôt est ainsi ramenée à 30 jours. 

Régime allégé pour les cours d’eau

Dernier point abordé, la restauration des fonctionnalités naturelles des milieux aquatiques pour laquelle est créée une nouvelle rubrique "exclusive de l'application des autres rubriques" de la nomenclature, permettant de ne soumettre qu’à déclaration et non à autorisation les projets listés par un arrêté ministériel rédigé à cet effet. Un régime allégé se profile pour tout un tas de travaux de restauration des écosystèmes des cours d’eau et zones humides : arasement d’ouvrage, désendiguement, suppression d’étangs, revégétalisation des berges, restauration de zones naturelles d’expansion des crues etc. Toutes une série d’opérations prévues dans les documents de gestion est également concernée, à l’exemple des schémas directeurs d'aménagement et de gestion des eaux (Sdage), chartes de parcs naturels, stratégies locales et plans de gestion des risques d’inondation. C’est d'ailleurs l’un des arguments mis en avant par le ministère, qui affiche la volonté sur ce sujet de "simplifier la procédure applicable pour les travaux et infrastructures directement en lien avec l’exercice de la compétence gestion des milieux aquatiques et la prévention des inondations (Gemapi)".