Normes imposées aux collectivités : Gabriel Attal veut "lancer une simplification massive"

Les normes superflues ou trop coûteuses sont dans le collimateur du gouvernement. Après avoir décidé des simplifications pour le monde agricole, il envisage de faire de même pour les collectivités, avec un plan en préparation. Selon le Premier ministre, qui s'exprimait ce jeudi sur le sujet, l'objectif est de rendre "du pouvoir d'agir" aux élus locaux.

Le Premier ministre a souhaité, ce 4 avril, "aller plus loin" dans la chasse aux normes excessives qui s'appliquent aux collectivités locales. "Plus que jamais, il est temps de franchir une nouvelle étape et de lancer une simplification massive des normes" qui concernent les collectivités, a lancé Gabriel Attal lors d'une rencontre organisée au Sénat par la délégation aux collectivités territoriales.

"Ce mal français qu'est le trop-plein de normes gâche la vie de nombreux maires (…), il bride, il frustre, il inquiète, il instille le doute là où il devrait y avoir de la clarté", a dénoncé le chef du gouvernement, qui participait à la célébration du premier anniversaire de la charte en faveur de la simplification des normes signée entre le gouvernement et le Sénat (sur cette charte, voir notre article du 17 mars 2023). Il a aussi constaté que les élus "n'en peuvent plus d'être noyés" sous "les contraintes". "À force de règles, de sur-règles, on empêche les élus locaux, notamment les maires, d'agir", a-t-il encore critiqué. En pointant également "le fardeau sur la dette et les déficits" que génère l'inflation normative. Et, au passage, en faisant sien un constat souvent dressé par les édiles eux-mêmes : "On ne peut pas dire aux élus en même temps qu'ils dépensent trop et ajouter de nouvelles règles coûteuses."

"Faire confiance"

Pour lutter contre le fléau de l'inflation normative pour les collectivités, Gabriel Attal a annoncé avoir demandé la mise en place d'un "plan de simplification". L'objectif étant que "des normes qui gênent et freinent les élus puissent être supprimées ou simplifiées dans tous les domaines", à l'instar de l'action qui a été conduite récemment pour l'agriculture. Ce plan sera alimenté par les propositions que doit faire prochainement la mission conduite par Boris Ravignon, maire de Charleville-Mézières (voir notre article). Par ailleurs, à la demande du Premier ministre, le Conseil national d'évaluation des normes (CNEN) – l'instance qui examine pour avis l'ensemble des projets de textes ayant une incidence financière sur les collectivités locales - devrait remettre "tous les six mois" à ce dernier "des propositions pour réduire le stock de normes obsolètes".

"Simplifier, c'est faire confiance", a également estimé Gabriel Attal. En déclarant que le gouvernement allait "faire davantage confiance aux élus locaux, qui sont les meilleurs connaisseurs de leur territoire". Il a rappelé que pour leur permettre de prendre plus facilement des initiatives, le gouvernement a chargé le conseiller d'État honoraire Christian Vigouroux d'une "réflexion" sur le régime de responsabilité des décideurs et gestionnaires locaux. Réduire les excès normatifs permettra de "rendre" aux élus locaux "du "pouvoir d'agir", a estimé Gabriel Attal, en utilisant une expression forgée par l'Association des maires de France.

Délégalisation

En matière de simplification en général - pas seulement s'agissant des normes applicables aux collectivités - Gabriel Attal a indiqué vouloir "amplifier" la délégalisation de certaines dispositions qui sont de nature législative, alors qu'elles pourraient relever du domaine réglementaire. Le Premier ministre a précisé qu'une prochaine démarche de ce type concernera le relogement en urgence des personnes qui sont victimes de catastrophes, comme les inondations : une fois le déclassement acté, les règles pourront être modifiées dans de brefs délais par décret, afin que les personnes concernées puissent être relogées au-delà de la limite actuelle de six mois. "C'est une procédure qui me paraît très intéressante, si on veut simplifier en s'attaquant au stock de normes existantes", a estimé Gilles Carrez, président du CNEN.

Dominique Faure, ministre déléguée chargée des collectivités territoriales, a pour sa part annoncé qu'elle remettra "dans deux mois" au Premier ministre, "dix propositions de simplification", parmi lesquelles "l'élargissement du guichet 'Démarches simplifiées' pour les dotations d'investissement, la simplification de la dotation de solidarité pour les collectivités victimes d'événements climatiques exceptionnels, le déploiement d'un guichet unique de l'ingénierie", ou encore "la rationalisation de la contractualisation entre État et collectivités".

Nouvelles normes : un coût de 1,6 milliard d'euros en 2023

Au-delà de la simplification des normes, Dominique Faure présentera d'ici deux mois un Agenda territorial comportant "les principaux jalons à venir". Pour rappel, cette feuille de route, élaborée notamment avec les associations d'élus locaux, avait été initiée par Élisabeth Borne lorsque celle-ci était à Matignon et avait été bien accueillie par les représentants des collectivités.

En 2023, les 235 projets de textes soumis à la consultation du CNEN doivent générer un coût supplémentaire net (c'est-à-dire tenant compte des éventuelles recettes et économies nouvelles) de 1,6 milliard d'euros en année pleine, a révélé le président de l'instance. En saluant un progrès par rapport à 2022. Une année où 325 textes avaient été présentés au CNEN, avec à la clé un coût net de 2,5 milliards d'euros. En 2023, les dépenses nouvelles sont "essentiellement" liées à la masse salariale (hausse du point d'indice, prime de pouvoir d'achat, relèvement du minimum de traitement), tandis que l'année précédente, l'obligation pour les collectivités d'équiper leurs bâtiments de dispositifs de régulation de chauffage avait beaucoup pesé dans les nouveaux frais.