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Services déconcentrés de l'Etat - Nouvelles casquettes pour les préfets

Le Premier ministre vient d'adresser aux préfets une circulaire sur la réforme de l'administration territoriale de l'Etat. Objectif : traduire en pratique le nouveau pouvoir du préfet de région sur le préfet de département.

Le 13 décembre dernier, François Fillon recevait à Matignon le corps préfectoral. En conclusion de son discours, le Premier ministre évoquait la réforme de l'administration territoriale de l'Etat issue de la révision générale des politiques publiques. Brièvement, le chef du gouvernement assurait avoir entendu les craintes des préfets d'un "regain de centralisation" et d'une "priorité donnée au niveau régional au détriment du niveau départemental en matière de ressources humaines" (voir notre article ci-contre du 14 décembre 2010). Serait-ce pour rassurer ces hommes pourtant habitués aux réformes administratives ? Toujours est-il que le même jour, le Premier ministre signait une circulaire présentant les "conditions de mise en oeuvre" du décret du 16 février 2010 relatif aux pouvoirs des préfets et à l'organisation et à l'action des services de l'Etat dans les régions et les départements. Rappelons que ce décret abroge celui de 2004 sur les pouvoirs des préfets et constitue, avec la création des nouvelles directions départementales, la pièce maîtresse de la réforme des services déconcentrés de l'Etat (sur ces sujets voir nos articles ci-contre).
Cette circulaire de 16 pages porte principalement sur les relations entre préfet de région et préfet de département, le rôle du CAR (comité de l'administration régionale) et le contenu des nouveaux plans stratégiques de l'Etat (Pase) pour la période 2011-2013. Elle explique également ce qu'est le "rôle pivot" du préfet de région dans l'utilisation des crédits de l'Etat.

CAR et pré-CAR : pré carré du préfet de région ? 

Rappelons que le préfet de région peut désormais adresser des instructions aux préfets de département (article 2 du décret). Sur le contenu précis de ces instructions, le Premier ministre reste flou : "Le pouvoir d'instruction vise à assurer la cohérence de l'Etat dans la région dont le préfet de région est le garant. Il peut recouvrir des domaines variables selon les priorités gouvernementales, les spécificités territoriales et les nécessités du moment." Le préfet de région peut également user de son "droit d'évocation", c'est-à-dire la possibilité de dessaisir un préfet de département de certains dossiers pour les traiter directement au niveau régional pour "mettre en cohérence les politiques de l'Etat" (sur ce droit d'évocation, voir notre article du 26 juillet ci-contre). Pas beaucoup plus de réponses non plus sur les missions des sous-préfets : ceux-ci sont "confirmés dans leur mission d'animation et de coordination de l'action, dans l'arrondissement des services de l'Etat. Cette fonction est étendue à la gendarmerie nationale, dans les limites compatibles avec son statut militaire".
La deuxième partie de la circulaire est au contraire beaucoup plus précise : elle présente les missions des CAR (article 35, 36, 37). Cet "état-major" du préfet de région est composé des préfets de département et de tous les chefs de service de niveau régional, y compris recteurs et directeurs d'agence régionale de santé (ARS). Réuni tous les mois, ce comité doit être consulté sur "l'utilisation de tous les crédits ouverts au profit des services de l'Etat dans la région". Une instance de préparation (le pré-CAR) rassemble autour du secrétaire général pour les affaires régionales (Sgar) les secrétaires généraux de préfecture et les représentants de services régionaux. Il traite toutes les affaires courantes et permet au CAR de "concentrer ses travaux sur l'examen des sujets stratégiques". C'est donc devant ces deux instances collégiales (CAR et pré-CAR) que doivent désormais passer tous les crédits de l'Etat arrivant dans une région.

Entrer dans le Pase 2011-2013

La circulaire décrit ensuite le fonctionnement du Pase, qui remplace les anciens Pased et Paser. Ce document unique à l'échelle de la région couvrira la période 2011-2013 en concordance avec la seconde phase des contrats de projets et des programmes européens. Ce plan doit "déterminer un nombre limité d'orientations qui se traduisent par un programme d'action resserré" et être sur le bureau du Premier ministre pour le 30 juin 2011. Tous les acteurs locaux qui ont des projets sur la période 2011-2013 porteront donc attention à l'élaboration de ce document.
Sur la question de la contractualisation avec les collectivités locales, la circulaire reprend l'article 59 du décret du 16 février : le préfet de région signe les contrats avec la région et ses établissements publics, le préfet de département signe avec les départements, communes et leurs établissements publics. "Cette compétence inclut l'habilitation à négocier et à conclure les conventions au nom de l'Etat." La circulaire ne précise pas comment cette compétence du préfet de département s'articulera avec les pouvoirs renforcés des préfets de région sur les crédits. Pouvoirs renforcés à condition que les responsables de programme en ministère ne les oublient pas dans les "discussions de cadrage budgétaire" (circulaire, p.14). A toutes fins utiles, les préfets sont cependant invités à "tenir compte des contraintes pouvant peser sur les programmes" avant de formuler des avis réservés ou défavorables sur les enveloppes qui doivent leur être allouées.  Enfin, la circulaire évoque les relations avec la gendarmerie, les services départementaaux d'incendie et de secours et les ARS, et énumère les différentes possibilités de mutualisation de services offertes aux préfets.

Référence : décret n°2010-146 du 16 février 2010 modifiant le décret n°2004-374 du 29 avril 2004 relatif aux pouvoirs des préfets, à l'organisation et à l'action des services de l'Etat dans les régions et départements.

 

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