Projet de budget de l'État : désendettement et verdissement ?

En publiant les "plafonds de dépenses" du projet de loi de finances pour 2024, Bercy a levé un coin du voile sur le projet de texte, qui sera présenté fin septembre. Pour respecter les objectifs de réduction du déficit, ce projet de budget sera en baisse de 4,8 milliards d'euros. Mais plusieurs postes de dépenses seront en hausse, à commencer par la transition écologique (+ 7 milliards d'euros). Principal concours de l'État aux collectivités, la dotation globale de fonctionnement (DGF) doit rester inchangée à 26,9 milliards d'euros. Ce qui revient à une assez nette baisse, compte tenu de l'inflation.

Le budget de l'État va baisser de plus de 4 milliards d'euros en 2024, afin de réduire le déficit public, mais sans que cela ne pénalise l'effort en faveur de la transition écologique, qui va progresser de 7 milliards d'euros. À un peu plus de deux mois de la présentation du projet de loi de finances (PLF) pour 2024, le cap est fixé. La direction du Budget a mis en ligne, dimanche 16 juillet, les plafonds de dépenses du projet de budget. Un document technique qui recèle de précieuses indications sur les arbitrages que le gouvernement a déjà pris.

En dévoilant, en avril, le programme de stabilité, le gouvernement avait annoncé un tour de vis supplémentaire pour accélérer la réduction du déficit et de la dette (voir notre article du 20 avril). La trajectoire fixée pour le prochain budget est en phase avec cet objectif : à 356 milliards d'euros l'an prochain, le "total des crédits budgétaires et taxes affectées des missions du budget général" baissera de 4,8 milliards d'euros par rapport à 2023. Ce qui nécessitera des économies.

Recul de la dépense de l'État, vraiment ?

Ces dernières seront permises par "la fin des dispositifs exceptionnels de relance" et "la sortie des mesures de soutien face à la crise énergétique", dont "le bouclier énergie", indique Bercy. Par ailleurs, des "mesures d’économies identifiées dans le cadre des revues de dépenses" seront mises en œuvre, poursuit le ministère, sans plus de précisions. Lors des Assises des finances publiques, Bruno Le Maire, ministre de l'Économie et des Finances, avait notamment ciblé les champs du logement et de l'emploi (voir notre article du 19 juin).

"Pour la première fois depuis près d'une décennie, les dépenses de l'État vont baisser par rapport au budget de l'année précédente", déclarait dimanche, dans les Échos, le ministre délégué aux Comptes publics, Gabriel Attal.

Le recul de 4,8 milliards d'euros du budget de l'État n'est toutefois "pas surprenant, dans la mesure où ces dernières années, on a multiplié des dépenses exceptionnelles temporaires", a réagi l'économiste François Ecalle dans une interview publiée lundi dans le quotidien Ouest-France. "Cette baisse est très largement expliquée par toutes les mesures temporaires prises en lien avec la hausse des prix de l’énergie", indiquait-il. Si on exclut ces mesures et la baisse du plan de relance, "une hausse importante des crédits budgétaires, d'environ 3%", apparaît, selon le conseiller maître honoraire à la Cour des comptes. "L’effort de l’État est limité", conclut-il.

+ 7 milliards d'euros pour la transition écologique

Pour cause, de nombreux postes de dépenses sont orientés à la hausse. La planification écologique au premier chef. Elle bénéficiera d'un "accroissement inédit" de ses moyens, soit 7 milliards d'euros supplémentaires, détaille Bercy. Un montant qui avait déjà fait l'objet d'annonces de la Première ministre, dans la presse, une semaine plus tôt (voir notre article du 10 juillet).

Cette enveloppe servira à financer le "soutien à la rénovation des logements" (+ 1,6 milliard d'euros pour l’agence nationale de l’habitat, Anah), le fonds chaleur (+ 60%), la rénovation énergétique de l’immobilier de l’État, l'évolution des infrastructures de transport et le verdissement du parc automobile (+ 1,1 milliard d'euros). En outre, le "fonds vert" créé en 2023, dont le but est de soutenir les projets des collectivités locales en faveur de la transition écologique, sera reconduit et son montant passera de 2 milliards d'euros en 2023 à 2,5 milliards l'an prochain.

Ministères gagnants

Parmi ses autres priorités, le gouvernement met en avant le "soutien à l’investissement public et à l’innovation", notamment avec le plan France 2030, qui sera doté de 7,7 milliards d'euros en 2024. L'éducation n'est pas en reste : la mission Enseignement scolaire connaîtra une hausse de 3,9 milliards d'euros. Une enveloppe qui sera consacrée, entre autres, à la revalorisation de la rémunération des enseignants et des accompagnants d’élèves en situation de handicap (AESH) et au "lancement des mesures de la Conférence nationale du handicap". L’enseignement supérieur et la recherche bénéficieront, quant à eux, d'une hausse d’un milliard d’euros de crédits. Des moyens, qui seront employés notamment pour financer la revalorisation des bourses sur critères sociaux, le ticket U à 1 euro et la réhabilitation des logements du Crous.

La hausse du ministère de la Culture (de 3,5 à 3,7 milliards d'euros) "permettra notamment de soutenir la rénovation du patrimoine de proximité, l’activité des écoles de l’enseignement supérieur artistique, ou encore les initiatives de soutien à la lecture", indique Bercy. Parmi les autres hausses prévues, on notera l'engagement d'un milliard d'euros supplémentaires pour le ministère de l'Intérieur et de 500 millions d'euros de plus pour le ministère de la Justice. Des crédits sont également inscrits pour financer la "montée en puissance du service national universel".

DGF stable

Qu'en est-il des concours financiers de l'État aux collectivités locales ? Il est prévu qu'ils progressent d'un milliard d'euros, pour atteindre 54,1 milliards d'euros. En sachant que 40% de cette hausse sont liés à la progression du fonds de compensation pour la taxe sur la valeur ajoutée (FCTVA). Laquelle s'explique par la bonne tenue de l'investissement public local en 2021 et 2022 (du fait des décisions prises par les collectivités, mais aussi de l'inflation).

Au sein de ces concours, la dotation globale de fonctionnement (DGF) doit demeurer stable, à 26,9 milliards d'euros – alors qu'en 2023, elle a progressé de 320 millions d'euros. Une option qui, si elle devait rester inchangée, susciterait l'ire des oppositions, lesquelles ont souhaité récemment que l'évolution de la DGF soit alignée sur l'inflation.

Bercy confirme, par ailleurs, que la dotation biodiversité passera de 41 millions d'euros en 2023, à 100 millions d'euros l'an prochain - la Première ministre l'avait annoncé mi-juin en présentant le plan France ruralités (voir notre article du 15 juin).

En matière de soutien de l'État à l'investissement local, le verdissement va se poursuivre. Des parts minimales de la dotation de soutien à l’investissement des départements (DSID) et de la dotation d’équipement des territoires ruraux (DETR) devront nécessairement être affectées au financement de "projets concourant à la transition écologique", à hauteur respectivement de 25% et 20%. Un objectif de ce type s'appliquait déjà en 2023 à la dotation de soutien à l'investissement local (DSIL).

 

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