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Projet de loi Alimentation : faute d'accord en CMP, députés et sénateurs se renvoient la balle

Suite à l'adoption du projet de loi "pour l'équilibre des relations commerciales dans le secteur agricole et alimentaire et une alimentation saine, durable et accessible à tous" (dit "EGalim") par le Sénat le 2 juillet dernier, la commission mixte paritaire (sept députés, sept sénateurs) réunie le 10 juillet n'est pas parvenue à faire converger les textes des deux assemblées. Et députés et sénateurs se renvoient la responsabilité de cet échec.

Ne pas "transiger sur la mutation vers un modèle agricole plus durable"

"Le texte du Sénat s'était beaucoup éloigné du texte de l'Assemblée [adopté le 30 mai 2018, ndlr], notamment sur le titre II" en faveur d'une "alimentation saine, durable, accessible à tous et respectueuse du bien-être animal", a expliqué à l'AFP le rapporteur à l'Assemblée Jean-Baptiste Moreau (LREM, Creuse). Le débat en CMP aurait "montré de vraies divergences entre les députés et les sénateurs", "deux visions éloignées de la transformation du modèle agricole français", a également commenté sur son blog la députée Laurence Maillart-Méhaignerie (LREM, Ille-et-Vilaine).
Pour cette dernière, qui était rapporteur de la commission du développement durable saisie pour avis sur ce texte, "les amendements adoptés par le Sénat ont contribué à dénaturer ou à supprimer les mesures les plus emblématiques du projet de loi, notamment la réforme de la gouvernance des coopératives agricoles, l’interdiction des remises, rabais et ristournes, la séparation de la vente et du conseil des produits phytopharmaceutiques ou encore l’interdiction de l’installation de tout nouvel établissement de poules en cage". "Nous ne pouvons transiger sur la mutation vers un modèle agricole plus durable qui réponde aux attentes sociétales !", a ainsi twitté Jean-Baptiste Moreau.

Indicateurs de prix : une "marche arrière" faisant "courir le risque que les États généraux ne servent à rien"

De l'avis du Sénat, ce sont d'autres raisons qui expliquent l'absence d'accord en CMP. Dans un communiqué du 10 juillet, les sénateurs de la commission des affaires économiques reprochent aux députés de la majorité membres de la CMP de s'être "opposés, dès l’examen de l’article 1er, aux modalités d’élaboration des indicateurs contribuant à la formation des prix agricoles pourtant adoptées par l’Assemblée nationale et par le Sénat". Selon cette disposition, adoptée par les députés contre l'avis du gouvernement et maintenue par les sénateurs, l’Observatoire de la formation des prix et des marges des produits alimentaires (OFPM) et FranceAgriMer devaient proposer des indicateurs de prix, lorsque les organisations interprofessionnelles n'en fournissaient pas. "Cette marche arrière", qui obéirait à une "injonction de l'Éysée" selon la commission des affaires économiques du Sénat, ferait "courir le risque que les États généraux ne servent à rien".
Alors qu'ils étaient de leur point de vue disposés à des compromis, "en particulier sur le volet relatif aux produits phytopharmaceutiques", les sénateurs considèrent par ailleurs que leurs propositions n'ont pas été examinées.
"L’enjeu de la CMP était pourtant d’assurer une adoption rapide du texte pour que ses dispositions puissent entrer en vigueur avant le début des négociations commerciales", a déploré en conclusion la commission présidée par Sophie Primas (LR, Yvelines). Tout devrait être "actif pour le mois d'octobre", pour les prochaines négociations commerciales, a quant à lui estimé Jean-Baptiste Moreau, alors que l'examen du texte reprendrait la semaine prochaine en commission de l'Assemblée nationale et début septembre en séance plénière.