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Fonction publique - Projet de loi Déontologie : les dispositions adoptées par le Sénat

Lors de leur examen du projet de loi sur la déontologie des fonctionnaires, les sénateurs ont enrichi le texte de nombreuses nouveautés. Devoir de réserve, cumul d'activités, intérim, recrutement sans concours ou sur titres, listes d'aptitude, apprentissage, plan de titularisation, temps de travail, arrêts maladie, centres de gestion... l'éventail des sujets est large.

Le Sénat a adopté dans la nuit du 27 au 28 janvier, après l'avoir modifié, le projet de loi sur la déontologie des fonctionnaires qui vise notamment à mieux lutter contre les conflits d'intérêts.
Sans revenir sur les principes fondateurs du statut de fonctionnaire, le texte complète la loi du 13 juillet 1983. Celle-ci avait défini pour la première fois les traits communs aux agents de la fonction publique (Etat, territoriale et hospitalière). Il ajoute de nouvelles valeurs comme "le respect du principe de laïcité" ou le fait qu'un fonctionnaire exerce ses fonctions avec "dignité, impartialité, intégrité et probité". L'un des objectifs du projet de loi est aussi de mieux prévenir les conflits d'intérêts. Tout fonctionnaire devra désormais veiller "à faire cesser immédiatement ou à prévenir les situations de conflit d'intérêts dans lesquelles il se trouve ou pourrait se trouver".
Après les députés en octobre dernier (voir articles ci-contre), les sénateurs ont complété le texte de très nombreuses dispositions nouvelles. Localtis fait le point sur les principales nouveautés.
Les nouvelles mesures adoptées par le Sénat visent à :

Déontologie et prévention des conflits d'intérêts
- Consacrer sur le plan législatif le devoir de réserve, principe qui selon le rapporteur Alain Vasselle, "implique la nécessité, pour un fonctionnaire, de s'exprimer avec tact et retenue".
- Priver d'indemnités spécifiques les hauts fonctionnaires exerçant des activités de dirigeant dans le secteur privé lorsqu'ils cessent leurs fonctions et réintègrent leur cadre ou corps d'origine. "Nous tenons à cet amendement" a déclaré la ministre en charge de la fonction publique en présentant cette mesure inspirée d'un rapport de la Cour des comptes sur le "sinistre" de Dexia.
- Prévoir l'intégration au 1er janvier 2019 de la commission de déontologie de la fonction publique au sein de la Haute Autorité pour la transparence de la vie publique. Une commission spécialisée dans laquelle siégeraient des membres de la Haute Autorité et des représentants des employeurs publics serait en charge des fonctionnaires.
- Assouplir les dispositions sur le cumul d'activités des fonctionnaires en autorisant un fonctionnaire occupant un emploi à temps complet à reprendre une entreprise, ou à occuper un autre emploi public à temps incomplet.

Discipline
- Maintenir la présidence du conseil de discipline par un magistrat administratif – comme c'est le cas aujourd'hui. Les sénateurs ont estimé qu'elle est une garantie de sécurité juridique.
- Rejeter l'idée formulée par la commission des lois du Sénat d'ouvrir au profit des fonctionnaires menacés d'une exclusion temporaire de fonction pour trois jours maximum le droit de demander la réunion en urgence du conseil de discipline. Ce nouveau droit ferait perdre à la sanction une grande partie de son intérêt, qui réside aujourd'hui dans sa facilité de mise en oeuvre.

Recrutement
- Maintenir le recours à l'intérim dans l'ensemble des fonctions publiques.
- Supprimer le caractère automatique des comités de sélection pour le recrutement sans concours d'agents de catégorie C que les députés prévoyaient de mettre en place.
- Supprimer l'allongement de trois à quatre ans de la durée de validité de l'inscription sur les listes d'aptitude pour les personnes admises à un concours de la fonction publique territoriale mais n'ayant pas été recrutées par une collectivité (les "reçus-collés").
- Prévoir un meilleur suivi des candidats inscrits sur une liste d'aptitude jusqu'à leur recrutement. Les modalités de cette mission qui incombera principalement aux centres de gestion seront définies par décret.
- Porter de deux à trois ans la durée maximale des contrats conclus pour pourvoir des vacances temporaires d'emploi (dans l'attente du recrutement d'un fonctionnaire).
- Développer le recrutement sur titres d'agents de la fonction publique territoriale dans les filières sociale, médico-sociale et médico-technique (infirmières, auxiliaires de puériculture, etc.). Les employeurs éprouvent parfois des difficultés pour recruter ces professionnels.
- Elargir les missions du CNFPT au développement de l'apprentissage et à la mise en œuvre de dispositifs de préparation aux concours de la catégorie A destinés à favoriser l'égalité des chances et la diversification des recrutements. Le CNFPT versera aux centres de formation d'apprentis concernés une contribution aux frais de formation des apprentis employés par les collectivités.
- Prolonger le plan de titularisation "Sauvadet" jusqu'au 12 mars 2020 (article 15 bis A) et du dispositif de mobilité des fonctionnaires de La Poste jusqu'au 31 décembre 2020.

Gestion des ressources humaines et finances publiques
- Supprimer la possibilité – utilisée actuellement par plus de 1.500 collectivités – qui permet d'appliquer une durée légale de travail inférieure à 35 heures. "La hausse du temps de travail dans la fonction publique est un levier d'action essentiel dans un contexte de tension des finances publiques", plaident les sénateurs de droite. La ministre en charge de la fonction publique était d'avis d'attendre que le rapport de Philippe Laurent sur le temps de travail lui soit remis en mars.
- Réintroduire une carence de trois jours pour les arrêts maladie des 5,4 millions d'agents publics, une mesure qui permettrait selon les sénateurs de réaliser une économie de 500 millions d'euros par an. Mais cette mesure qui leur est chère a toujours été rejetée par la majorité de gauche à l'Assemblée nationale.
- "Responsabiliser" les agents qui, après la suppression de leur emploi ou la fin de leur détachement sur emploi fonctionnel, sont pris en charge, selon la catégorie dont ils relèvent, par les centres de gestion ou le Centre national de la fonction publique territoriale (CNFPT). Même si ces agents doivent effectuer une recherche active d'emploi", leur rémunération sera dégressive.

Centres de gestion de la fonction publique territoriale
- Poursuivre la réforme des centres de gestion entamée lors par la loi "Sauvadet" du 12 mars 2012. Les sénateurs ont repris des éléments de la proposition de loi Vasselle déposée sur le bureau du Sénat le 17 septembre dernier. Les compétences que les centres de gestion exercent à l'échelle régionale ou interrégionale sont renforcées. Leurs compétences vis-à-vis des collectivités affiliées sont étendues à la tenue du dossier individuel des agents, au secrétariat des commissions consultatives paritaires et à la gestion administrative des comptes épargne-temps. A l'égard des collectivités non affiliées, les missions des centres de gestion sont aussi élargies (à la gestion du temps syndical et du droit syndical). Dans le cadre du socle de compétences insécable mis en place par la loi "Sauvadet", les centres de gestion exerceraient une fonction de "référent déontologue". Le périmètre des compétences facultatives est lui aussi accru, permettant de sécuriser certaines des missions assurées aujourd'hui par certains centres de gestion (dans les domaines de l'archivage ou de la dématérialisation par exemple).

Débattu en procédure accélérée (un seul examen par chambre), le texte fera à présent l'objet d'une commission mixte paritaire chargée de trouver un compromis entre les deux chambres.

 

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