Protection des captages : le Sénat rejette une proposition de loi socialiste
Le Sénat n’a pas adopté la proposition de loi visant à renforcer la protection des ressources en eau potable contre les pollutions diffuses, examinée en séance, ce 12 juin, dans le cadre de l’espace réservé au groupe socialiste. Le texte, qui proposait d’interdire d’ici 2031 l’utilisation et le stockage des produits phytosanitaires et des engrais minéraux au sein des périmètres de protection des aires d’alimentation des captages, afin de limiter les traitements de potabilisation couteux et énergivores par les services publics d'eau et d’assainissement, avait essuyé un premier échec lors de son passage devant la commission de l’aménagement du territoire et du développement durable. Et cela en dépit des amendements "volontaristes" du rapporteur, Hervé Gillé (Gironde/SER), pour rééquilibrer le texte et améliorer son acceptabilité, notamment en resserrant le périmètre de l'interdiction là où les pressions sont les plus fortes, en réduisant les sanctions, et en proposant une contractualisation progressive. Près de 14.300 captages ont été fermés sur la période 1980-2024 - soit plus d'un captage sur quatre -, dont 41% du fait de teneurs excessives en nitrates ou en pesticides, a-t-il rappelé.
"Vous avez fait le choix du blocage et du dogmatisme là où il fallait chercher des solutions (…) ce refus de discussion vous place aujourd’hui en décalage total avec les attentes des élus du territoire, qui eux affrontent chaque jour la dégradation de la qualité de l’eau", a regretté la socialiste Florence Blatrix-Contat, à l’origine du texte, fustigeant cette "reculade" de la droite sénatoriale "sur un sujet où les constats sont désormais partagés".
Par amendement co-signé par des membres des groupes LIRT et LR (dont le sénateur de Haute-Loire Laurent Duplomb), et voté avec le groupe UC, l’article 1er du texte a été supprimé. L’article 2 - qui établissait un régime de sanction pénale pour le non-respect de l’interdiction nouvelle introduite à l’article 1er (deux ans d’emprisonnement et 75.000 euros d’amende) - n’a tout bonnement pas été adopté. Rendant ainsi inutile le vote sur la proposition de loi dans son ensemble.
Parmi les arguments avancés pour rejeter le texte : la proposition de loi Duplomb sur l’agriculture pour laquelle une commission mixte paritaire doit se réunir fin juin, et la volonté de "ne pas aggraver la situation du monde agricole". "Cela ne remet nullement en cause la nécessité d'agir, mais la méthode est trop radicale, coercitive et stigmatisante. N'imposons pas un nouveau changement rapide de méthode productive aux agriculteurs, sans aucune mesure d’accompagnement", a notamment justifié le sénateur Cédric Chevalier (Marne-LIRT).
Du côté du gouvernement, la porte-parole Sophie Primas s'en était remise à la sagesse du Sénat tant sur le texte que sur les amendements. "Il s'agit, non pas d'imposer, mais d'organiser une transition raisonnée, territorialisée, construite avec les acteurs de terrain", a t-elle relevé, appelant à cibler les efforts sur "les zones les plus vulnérables", comme le prévoit la feuille de route pour protéger les captages présentée fin mars par Agnès Pannier-Runacher (voir notre article du 28 mars 2025).