Réactions contrastées après les propositions de la convention citoyenne sur les temps de l'enfant
Les propositions de la convention citoyenne sur les temps de l'enfant visant à bousculer l'organisation scolaire provoquent des réactions très contrastées. Alors que les syndicats enseignants rejettent massivement ses préconisations, les élus à l'éducation et le mouvement sportif le reçoivent positivement.
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Les propositions, parfois disruptives, issues du rapport de la convention citoyenne sur les temps de l'enfant (lire notre article du 24 novembre) ont provoqué des réactions aussi tranchées que variées selon les secteurs d'activités. Premier cercle concerné par ces préconisations, le monde enseignant est unanime pour en rejeter l'essentiel. Pour le SNUipp-FSU, l'allongement de la semaine à cinq jours et la fin des journées à 15h30 ne passent pas. Quand les membres de la convention voient dans cette mesure une façon de respecter le rythme biologique de l'enfant, le syndicat majoritaire du premier degré répond sur un autre registre : "Il n'y a aucune corrélation entre organisation des rythmes scolaires et réduction des inégalités d'apprentissage". Quant à la concentration des apprentissages "théoriques" le matin et des apprentissages "pratiques" l'après-midi, le SNUipp-FSU y voit un modèle qui "risque d'externaliser une partie des apprentissages".
Non à la "territorialisation de l'école publique"
Même défiance pour le Snep-FSU qui se dit "abasourdi" par les propositions de la convention. Le premier syndicat des enseignants d'EPS considère qu'il est "impossible de faire accéder tous les élèves à des équipements sportifs seulement sur les après-midis", dénonce "une disparition de l'EPS obligatoire" et estime qu'"une animation sportive faite par des intervenants extérieurs" porte "le risque d'une rupture dramatique de l'unité du service public d'éducation".
Critique tout aussi radicale au Snalc. Le deuxième syndicat de l'enseignement secondaire juge que les 4 millions d'euros qu'a coûtés la convention citoyenne sur les temps de l'enfant ont été "jetés par la fenêtre". "Quand la quasi-totalité des communes sont revenues à la semaine de quatre jours au primaire, il faut arrêter de croire qu'on a les capacités d'organiser une semaine de quatre jours et demi ou cinq jours avec une prise en charge de qualité dans l'ensemble des villes", pointe le Snalc. Enfin, la Fnec FP-FO dénonce la proposition visant à rendre obligatoires les projets éducatifs de territoire (PEDT), qui aggraverait "la territorialisation de l'école publique", et rejette "l'immixtion toujours plus importante des associations ou des collectivités locales dans le fonctionnement de l'école publique laïque et républicaine".
Le mouvement sportif prêt à travailler avec l'école et les collectivités
Face à la proposition de passer de trois à deux zones de vacances et d'étaler les congés de février et Pâques sur seulement trois semaines pour permettre aux enfants de familles séparées habitant des zones différentes de se retrouver sur une semaine, le monde du tourisme a exprimé son opposition lors des travaux de la convention. La Confédération des acteurs du tourisme (CAT) juge l'actuel étalement des vacances de février et de Pâques sur quatre semaines "en phase avec la nécessité d'une meilleure gestion des flux touristiques et des déplacements".
Il faut se tourner vers le monde sportif pour trouver un accueil plus enthousiaste. Le CNOSF (Comité national olympique et sportif français) voit dans la restitution de la convention "le sens des propositions portées par le mouvement sportif". Il se félicite de la fin des cours plus tôt "pour favoriser les activités extrascolaires", se dit favorable à des "écoles plus ouvertes, mieux équipées et propices au mouvement" et annonce qu'il "sera au rendez-vous" pour "travailler avec l'école et les collectivités, [afin d'] accueillir plus d'enfants dans nos clubs et poursuivre la dynamique d'équipements".
"Ça peut marcher avec une réelle alliance éducative"
Même position chez les élus du RFVE (Réseau français des villes éducatrices). Jointe par Localtis, Émilie Kuchel, sa présidente, "trouve intéressant que l'éducation soit mise dans le débat public et ne soit pas vue que par des experts". Sur les changements de rythmes scolaires, elle juge qu'il faut décorréler "le temps de l'enfant passé devant l'enseignant et le temps passé à l'école" et rappelle que "les villes comme Brest qui sont restées à quatre jours et demi [après la réforme de 2014] notent une amélioration, les animateurs ont été formés, c'est beaucoup plus apaisé qu'il y a quelques années. Ça peut marcher avec une réelle alliance éducative". À ce propos, Émilie Kuchel se dit "contente" que l'on reparle des PEDT : "Il faut un projet par territoire avec tout le monde autour de la table pour échanger sur le bien-être des enfants et des familles. Ça devrait d'être une priorité nationale." Le RFVE partage aussi l'idée de "campus des jeunes" : "On est plusieurs villes à travailler sur des cours d'école qui pourraient s'ouvrir aux enfants dans les quartiers en dehors du temps scolaire. Sur les activités périscolaires, on travaille aussi avec les centres de loisirs qui vont dans les écoles. On peut créer des lieux qui, au-delà des temps scolaires, proposent des temps communs." Dans une réflexion plus vaste sur la place de l'enfant dans l'espace public, Émilie Kuchel dit enfin apprécier l'idée d'un "ministère de l'Enfance" avancée par la convention.
Le rapport de la convention citoyenne sur les temps de l'enfant va prochainement être remis au président de la République et au Premier ministre avant d'être présenté aux parlementaires et aux élus locaux. Quant aux différents ministères impliqués (Éducation, Santé, Ville, Culture, etc.), ils devraient rédiger une note sur la faisabilité des propositions les concernant d'ici à deux semaines.