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PLF 2019 - Réforme de la TGAP déchets : Amorce dénonce un passage en force

Face à la position inflexible du gouvernement sur l'augmentation de la TGAP sur l'élimination des déchets, le désarroi est palpable dans les rangs des élus locaux qui ont été nombreux à répondre présent au 32e congrès du réseau Amorce, qui s'est terminé ce 19 octobre et a réuni près de 700 participants au Havre.

Heureusement que la fiscalité déchets n'est pas le seul élément déterminant dans leur gestion ! Car le sujet divise profondément, entre ceux qui voient dans sa hausse "un signal écologique envoyé aux filières de gestion des déchets" (Joël Giraud, député LREM des Hautes-Alpes et rapporteur général du budget 2019), et ceux qui trouvent l'approche réductrice, focalisée sur l'aval de la filière et pénalisant avant tout les collectivités en charge de la gestion des déchets. Cet enjeu fiscal était au centre du programme du 32e congrès d'Amorce qui s'est terminé ce 19 octobre au Havre.
Devant un parterre d'élus locaux échaudés par le vote, la veille dans le cadre de l'examen du projet de loi de finances pour 2019 (volet "recettes"), d'une augmentation de la taxe générale sur les activités polluantes (TGAP) sur l'élimination des déchets à compter de 2021, la secrétaire d'État Brune Poirson y est intervenue en clôture pour réaffirmer la position du gouvernement en la matière, "l'équilibre du paquet fiscal" qui a été trouvé et la trajectoire de hausse annoncée en mai dernier par le Premier ministre dans la continuité de la feuille de route pour une économie circulaire (Frec). 

Problèmes de fond et correction d'anomalies

Cette trajectoire d’augmentation des tarifs de la taxe relative au stockage (mise en décharge) et à l'incinération (valorisation énergétique), qui passera par exemple pour le premier de 40 à 48 euros la tonne en 2025, fait grincer des dents. "Il s'agit de corriger l'anomalie selon laquelle recycler coûte plus cher que de mettre en décharge ou d'incinérer. De rétablir la hiérarchie du traitement des déchets", a resitué dans l'hémicycle Laurianne Rossi, députée des Hauts-de-Seine et rapporteure pour avis de la commission du développement durable.
"Nous soutenions au départ cette réforme mais là, c'est incompréhensible, tous nos amendements portés et même défendus en commission ont été rejetés dans l'hémicycle ! La réforme passe en force, sape la concertation, avec le risque de se mettre à dos les collectivités", réagit à chaud Nicolas Garnier, délégué général d'Amorce. Les députés LR Marie-Christine Dalloz (Jura) et Patrick Hetzel (Bas-Rhin) ont déploré "une vision punitive de l’écologie" qui ne "traite pas du problème de fond et privilégie clairement une approche fiscale". Des problèmes d’acceptabilité de cette fiscalité par les habitants ont aussi été pointés.
L'évolution de la TGAP sur l'élimination des déchets devait être conditionnée à la mise en œuvre de mesures compensatoires issues des propositions des collectivités. Notamment pour garantir le fléchage des recettes vers des projets d'économie circulaire. "Dans ce cas-là, nous sommes en effet prêts à accepter cette hausse", a rappelé au Havre Gilles Vincent, président d'Amorce.

TGAP amont : une invitation à approfondir

Autre idée mise dans la balance et débattue le 18 octobre dans l'hémicycle : soumettre les metteurs sur le marché de produits non recyclables à une TGAP amont. Plusieurs députés ont déposé des amendements allant dans ce sens en cherchant à caractériser ces producteurs ne contribuant pas à la gestion des déchets sans toutefois pénaliser les petites entreprises. Aucun n'est passé. Bien qu'il partage "l’idée d’une taxation plus importante de certains produits pour forcer tout le monde à entrer dans une économie non productrice de déchets", le ministre de l'Action et des Comptes publics, Gérald Darmanin, craint que cette TGAP amont se traduise par "une augmentation du prix pour le consommateur car comme on ne pourra pas distinguer les produits en amont, on taxera tout, ce qui sera l’équivalent d’une fiscalité supplémentaire, un peu comme une TVA qui ne dirait pas son nom". "Mais le sujet, je m’y engage, mérite qu’on y travaille collectivement", a-t-il ajouté. "Il faut l'approfondir techniquement, la réflexion n'est pas encore aboutie", a complété la députée LREM de l'Allier Bénédicte Peyrol. Très déçue, Amorce regrette qu'on ne taxe "qu'en bout de chaîne : les recettes de la TGAP vont grimper mais sur des gisements qui continuent de croître en décharge. Cela ne réglera rien".