Sécurité des écoles : des mesures immédiates, des discussions à venir

À la suite de l'attentat dans un lycée d'Arras le 13 octobre, le ministère de l'Éducation nationale a annoncé des mesures pour renforcer la sécurité des établissements scolaires, y compris durant les temps périscolaires. Des discussions avec les collectivités sont d'ores et déjà annoncées pour aller plus loin.

"La sécurité des établissements est notre priorité absolue", a déclaré Gabriel Attal, ministre de l'Éducation nationale, vendredi 13 octobre 2023 au soir, quelques heures après l'assassinat dans un attentat terroriste d'un professeur du lycée Gambetta d'Arras. "Nous avons acté un renforcement, avec le ministère de l'Intérieur, des forces de sécurité aux abords des établissements, a-t-il-poursuivi. Nous avons décidé de déployer plus de mille personnels de prévention et de sécurité du ministère dans les écoles et établissements scolaires. Il s'agit des équipes mobiles de sécurité rattachées aux rectorats." Le ministre a également précisé qu'il avait donné consigne aux recteurs de déployer ces personnels au sein des établissements pour les jours à venir pout tenir compte des "inquiétudes qui peuvent exister". Enfin, le partage d'informations entre le ministère de l'Intérieur et l'Éducation nationale dans le cadre des cellules de prévention de la radicalisation et de l'accompagnement des familles mises en place dans chaque département va être renforcé.

Parallèlement à ces déclarations, le ministre de l'Éducation nationale, toujours dans la soirée du 13 octobre, a envoyé aux établissements scolaires des consignes de sécurité pour faire suite à la décision du gouvernement de porter le plan Vigipirate au niveau "urgence attentat", le plus élevé, sur l'ensemble du territoire. Un niveau ayant par ailleurs déclenché le déploiement de 7.000 soldats.

Le périscolaire concerné

Le renforcement de la sécurisation des établissements scolaires porte en premier lieu sur les abords des établissements : la surveillance doit y être renforcée, de même que la surveillance et le contrôle des rassemblements. Par ailleurs, les activités aux abords des bâtiments peuvent faire l'objet d'une restriction voire d'une interdiction. Pour l'accès aux établissements, le renforcement des mesures porte sur le contrôle des personnes et des véhicules. Toutes ces mesures sont adaptées à chaque école et établissement scolaire et mises en œuvre en lien avec les préfets.

En complément de ces mesures, le ministère rappelle que l'accueil à l'entrée doit être assuré par un adulte et qu'un contrôle visuel des sacs doit être effectué. En cas de refus, le directeur ou le chef d'établissement peut refuser l'accès à l'établissement. En outre, l'identité des personnes étrangères à l'établissement doit être systématiquement vérifiée et, en cas de doute, le directeur ou le chef d'établissement peut refuser l'accès à l'établissement. Dans cette même logique, il est demandé à chacun de signaler tout comportement ou objet suspect, y compris aux abords des établissements.

Le ministère souligne également que l'attention doit être portée à la gestion des flux d'élèves, des entrées et sorties dans les écoles et établissements scolaires, dont ceux avec internat, et précise que, dans la mesure du possible, les attroupements qui exposent leurs membres à une menace d'attaque directe doivent être évités. Il ajoute que "des solutions limitant la fréquence des allées et venues entre l'établissement et la voie publique peuvent être recherchées en concertation avec les autorités concernées". Il est à noter que toutes ces mesures s'appliquent aussi aux activités périscolaires.

Une discussion "sans tabou" avec les collectivités

Alors que la circulaire du 8 juin 2023 a fusionné les PPMS (plans particuliers de mise en sûreté) "risques majeurs" et "attentat-intrusion", le ministère demande que chaque établissement vérifie l'efficacité et la connaissance par l'ensemble des personnels et des représentants de parents d'élèves présents de ce plan ainsi que des mesures spécifiques à prendre en cas d'intrusion.

Plus généralement, les directeurs et chefs d'établissement peuvent prendre attache auprès des équipes mobiles de sécurité de l'Éducation nationale pour la bonne mise en œuvre des mesures. En outre, le renforcement des liens avec les acteurs académiques (dont les équipes mobiles de sécurité), les polices municipales et les forces de sécurité intérieure doit être recherché. Les directeurs et chefs d'établissement doivent ainsi disposer à tout moment des conseils d'un interlocuteur de proximité, identifié comme le correspondant "sécurité école" en police et gendarmerie.

À la suite de la réunion de sécurité tenue à l'Élysée le 16 octobre au matin, le ministre de l'Intérieur Gérard Darmanin a rappelé que "100 millions d'euros de l'État ont été débloqués depuis cinq ans pour la protection des établissements scolaires, sans compter évidement ce que font les communes, les départements et les régions", et ajouté que "le ministre de l'Éducation nationale a été chargé d'y travailler davantage". La veille, sur TF1, Gabriel Attal a annoncé qu'il réunira les collectivités locales pour "avancer avec elles, sans tabou" sur la question de la sécurité des établissements. Selon l'AFP, le ministre doit réunir les syndicats enseignants dès ce mardi 17 octobre et les représentants des collectivités locales sur ce thème mercredi 18.

  • Entre minute de silence et réunion de sécurité...

Elèves et enseignants ont observé ce lundi à 14 heures une minute de silence dans tous les collèges et lycées de France. Celle-ci était organisée "en mémoire des victimes des attentats commis contre notre école", selon le ministre de l'Education Gabriel Attal, qui avait prévenu qu'"aucune contestation" ni "provocation" ne serait "tolérée". Devant le collège-lycée d'Arras où le professeur de lettres Dominique Bernard a été poignardé à mort vendredi et trois autres personnes blessées, beaucoup d'adolescents, certains avec leurs parents, étaient là. Les obsèques de Dominique Bernard auront lieu jeudi à la cathédrale d'Arras, en présence d'Emmanuel Macron. Plusieurs dizaines d'élèves et enseignants avaient dû évacuer l'établissement dans la matinée, après un appel téléphonique signalant un objet explosif. Pour la minute de silence, Gabriel Attal était aux côtés de la Première ministre à Conflans-Sainte-Honorine (Yvelines), au collège où enseignait Samuel Paty, le professeur assassiné le 16 octobre 2020.
Les cours n'avaient démarré qu'à 10h dans les collèges et lycées, pour permettre aux enseignants d'échanger entre eux.
De nombreuses communes ont aussi organisé des rassemblements, donnant rendez-vous à leurs administrés sur les parvis des mairies.
Le chef de l'Etat, qui a présidé à la mi-journée une nouvelle réunion de sécurité, veut que les préfets passent au peigne fin le fichier des personnes radicalisées susceptibles d'être expulsées. Le ministre de l'Intérieur Gérald Darmanin souhaite ainsi accélérer l'expulsion de 193 étrangers radicalisés en situation irrégulière.

Dans une circulaire aux préfets, le ministre de l'Intérieur leur ordonne de réunir sous 48 heures les groupes départementaux d'évaluation de la radicalisation créés en 2014 pour "réexaminer dans le détail" tous "les cas individuels", "notamment dès lors qu'il s'agit d'étrangers en situation irrégulière", a expliqué l'Elysée. Il s'agit de "s'assurer que toutes les personnes radicalisées qui sont expulsables l'ont bien été ou d'accélérer les procédures", et de "revérifier qu'il n'y a aucun oubli et qu'on est bien allés au maximum de la procédure".
Au-delà de cette circulaire, Gérald Darmanin a aussi été invité à étudier une "approche spécialisée pour les jeunes hommes originaires du Caucase sur la tranche 16-25 ans". "On sait qu'il y a un rapport à la violence qui est particulier", "des formes de radicalisation qui sont très fortes", "une culture très radicale de la pratique de l'islam", a fait valoir un conseiller de l'Elysée.
  Avec AFP