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INTERVIEW - Thierry Braillard : "Une révolution culturelle doit avoir lieu dans le sport professionnel"

Pour les membres du gouvernement, les cérémonies des voeux pour 2017 sont forcément l'occasion de tirer un bilan du quinquennat qui s'achève. En matière de politiques sportives, la place des collectivités territoriales auprès du sport professionnel a été largement débattue ces dernières années. Sans toujours déboucher sur de nouvelles mesures législatives. Thierry Braillard, secrétaire d'Etat aux Sports, s'en est expliqué pour Localtis en marge de ses voeux présentés ce mardi 24 janvier.

Localtis - La seule mesure qui concerne les collectivités territoriales dans la proposition de loi visant à préserver l'éthique du sport, à renforcer la régulation et la transparence du sport professionnel et à améliorer la compétitivité des clubs récemment votée à l'Assemblée nationale (lire ci-contre notre article du 17 janvier 2017) est la fin de l'interdiction des garanties d'emprunt par une collectivité territoriale à un club en vue de la réalisation d’un équipement. S'agit-il d'un retour en arrière par rapport à la loi du 16 juillet 1984 qui offrait un garde-fou ?

Thierry Braillard - Entre 1984 et 2017, beaucoup de choses se sont passées. Une révolution culturelle doit avoir lieu dans le monde du sport professionnel. Aujourd'hui, les collectivités territoriales n'ont plus les moyens soit de construire, soit d'entretenir des bâtiments qui sont d'usage exclusif, en faveur d'une société commerciale qui gère un club professionnel. C'est la raison pour laquelle cette révolution culturelle a été énoncée lors de la grande conférence sur le sport professionnel par le groupe de travail mené par Patrick Bayeux, qui parlait de projets privés-publics. C'est maintenant aux clubs de voir comment ils vont investir dans leur outil de travail qu'est la salle ou le stade, et aux collectivités territoriales de voir comment elles pourront les accompagner, avec plus de facilités lorsque ce sera une garantie d'emprunt qu'un investissement lourd. Car on sait aujourd'hui que l'argent des collectivités territoriales est contraint.

Durant la discussion de cette PPL, un amendement adopté au Sénat puis rejeté par l'Assemblée nationale proposait de limiter à 50% la participation des collectivités territoriales au financement des équipements sportifs professionnels, précisément pour limiter l'investissement des collectivités. Pourquoi ne pas l'avoir soutenu ?

Il existe un principe constitutionnel, celui de la libre administration des collectivités. Or cette mesure votée par le Sénat remettait en cause ce principe. C'est la raison pour laquelle, à l'unanimité, faut-il le rappeler, les députés, pas le gouvernement, ont souhaité annuler cette mesure en estimant que le maire sera assez grand pour savoir s'il décide de garantir l'intégralité ou une partie d'un emprunt. Mais la loi ne peut pas imposer un amendement comme celui dont vous vous faites l'écho.

Vous avez été à une époque très réticent quant à l'utilisation des partenariats publics-privés (PPP) dans la construction des grands stades…

… Je le suis toujours.

… Or le Sénat, toujours lui, à travers une proposition de loi de Michel Savin de septembre 2014 restée lettre morte, avait voulu interdire le PPP dans la construction des grands stades. Auriez-vous soutenu une telle mesure ?

Je ne suis ni Nostradamus ni David Copperfield. Je fais du concret. Les partenariats publics-privés ont montré leurs limites, si bien qu'il n'y en a quasiment plus aujourd'hui dans le sport. On est plutôt sur des projets privés-publics, c'est le sens du texte de loi adopté à l'Assemblée nationale, et dont j'espère un vote conforme du Sénat en seconde lecture. C'est là-dessus que je m'engage.

Vous avez profité de la cérémonie des vœux du ministère de la Ville, de la Jeunesse et des Sports pour annoncer un plan interministériel sur la place du sport dans la société. Pouvez-vous nous dire de quoi il s'agit ?

Nous avons pensé que, quelle que soit l'issue de la candidature de Paris à l'organisation des Jeux olympiques de 2024, dont le destin que j'espère positif sera scellé le 13 septembre, il fallait profiter de l'élan de cette candidature pour mettre en place un plan d'héritage, doté de 20 millions d'euros (lire ci-contre nos articles des 18 et 19 janvier 2017, Ndlr). Ce plan va nous permettre d'intervenir dans différents secteurs, pas uniquement sur les infrastructures sportives, mais aussi sur le sport-santé, le lien entre sport scolaire et sport fédéral, qu'il faut accentuer, le rayonnement international de la France. Il y aura également des actions en faveur d'associations qui oeuvrent à la promotion du sport féminin ou pour l'accès au sport des personnes atteintes d'un handicap. Tout cela va être mis en place de façon très interministérielle à partir du mois de février. Et ce plan fera l'objet d'une délibération lors du conseil d'administration du CNDS [Centre national pour le développement du sport, ndlr] le 28 février.