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Economie sociale - Associations et entrepreneuriat social : le HCVA publie un état des lieux

Suite à une saisine de Patrick Kanner, ministre de la Ville, de la Jeunesse et des Sports, le Haut Conseil à la vie associative (HCVA) a publié le 11 avril un rapport intitulé "Les associations et l'entrepreneuriat social".
L'ouverture de l'économie sociale et solidaire (ESS) à des sociétés commerciales depuis la loi de 2014, via l'agrément d'entreprise solidaire d'utilité sociale (Esus), "est enrichissante" mais "peut aussi être source de confusion et parfois d'exclusion pour certains acteurs comme les associations", avait écrit Patrick Kanner dans sa lettre de mission en janvier 2017. Le ministre demandait donc au HCVA "un état des lieux" susceptible de "clarifier ce que recouvre l'entrepreneuriat social, l'agrément Esus et le secteur associatif" et de "montrer la complémentarité" entre ces différents acteurs.

Des statistiques encore insuffisantes sur les entreprises solidaires d'utilité sociale

Le rapport répond à la demande en compilant les données existantes sur le sujet, en exposant notamment les cadres fiscaux respectifs des organismes sans but lucratif, des sociétés commerciales de l'ESS et des coopératives. Le HCVA pointe les limites actuelles des statistiques, ne permettant pas de cerner précisément la réalité des sociétés commerciales de l'ESS. Enfin, il liste et décrit les spécificités du modèle associatif – "absence de détention du capital", "absence de partage de bénéfices", "bénévolat", "transparence financière"… - et celles de l'entrepreneuriat social – "société dotée d'un capital", "participation aux résultats de l'exploitation", "finalité sociale ou d'utilité sociale", …
Au milieu des éléments de cet état des lieux, le HCVA rend compte d'une réflexion sur l'impact social des associations et des entreprises sociales. Est-il équivalent ? A cette question, le Haut Conseil répond d'abord que le poids des associations est encore largement supérieur à celui des entreprises sociales et que le recul est insuffisant. "L'entrepreneuriat social n'occupe sans doute pas tous les champs de l'action associative", se prononce toutefois le HCVA, s'appuyant sur des travaux de recherche.

La concurrence et le risque de délaisser les publics les moins solvables 

"Très concentré à l'origine dans le domaine de l'insertion de public en difficulté, l'entreprenariat social s'est ensuite ouvert à d'autres secteurs d'activité, tels que les Ehpad [établissements d'hébergement pour personnes âgées dépendantes, ndlr] ou les crèches, les Esat [établissements et services d'aide par le travail, ndlr], la récupération, voire les cliniques, bref à des secteurs ancrés sur des marchés, mais ne s'investirait pas ou faiblement, dans des domaines où la concurrence est quasi inexistante, comme le handicap ou l'aide à domicile."
Le HCVA suggère, tout en appelant à la "prudence", que les entreprises se revendiquant de l'entrepreneuriat social "[délaisseraient] les activités les moins rentables". Les associations seraient de leur côté doublement fragilisées par les "contraintes budgétaires publiques" et le "développement d'une concurrence lucrative sur les créneaux jusqu'alors légèrement plus rentables". L'instance alerte ainsi sur le risque "d'exclusion de certaines franges de population des prestations associatives de base".
On peut regretter l'absence d'analyse du continuum qui peut exister entre des associations qui cherchent à diversifier leurs activités et leurs ressources et de petites coopératives ou entreprises commerciales reconnues Esus. De l'aveu de l'instance, ces travaux – qui reposent sur une analyse documentaire et l'audition de six personnalités du monde de l'ESS - méritent d'être approfondis.