Urgence sur la rénovation hospitalière : comment favoriser l’accès aux soins ?

Six Français sur dix ont renoncé à un acte de soin au cours des cinq dernières années (Enquête IPSOS). Une crise notamment accentuée par la vétusté du bâti hospitalier. Si des maisons de santé et autres solutions innovantes pour favoriser le “aller vers” sont développées, l'hôpital reste un pilier central du système de soin français. Sa rénovation est une priorité.

Un système de santé en tension : une offre insuffisante face à des besoins en hausse

Les besoins en santé sont de plus en plus importants, notamment en raison du vieillissement de la population. À horizon 2035, 43 % des Français pourraient souffrir d'une pathologie chronique et 26 % être atteints d'une affection de longue durée. Mais alors que les besoins augmentent, l'offre médicale se révèle insuffisante, aussi bien en médecine de ville que dans les hôpitaux. 

Aujourd'hui, 87 % du territoire est classé en désert médical, ce qui représente 30 % de la population française qui ne bénéficie pas d'un bon accès aux soins. Six millions de Français n'ont pas de médecin traitant1 et le délai pour obtenir un rendez-vous chez un généraliste est, en moyenne, de 3 jours.

À court terme, la situation ne devrait pas s'améliorer puisqu'un tiers des généralistes en activité est âgé de plus de 60 ans. Même inquiétude dans les hôpitaux publics et privés où le nombre de lits disponibles a diminué de 23 % entre 2000 et 20222, en partie par manque de personnel.

Ce décalage entre l'offre et le besoin entraîne une hausse du renoncement aux soins. 60 % des Français déclarent avoir déjà renoncé à un acte de soins dans les cinq dernières années3

Solène Moitry, Cheffe de projet du secteur public local et projets complexes à la Direction des Prêts de la Banque des Territoires

À compter de 2035, la fin du numerus clausus devrait produire ses premiers effets positifs, mais d'ici là se faire soigner restera difficile. Aucun territoire n'est épargné puisque les territoires ruraux comme les villes, notamment les banlieues des grandes agglomérations, sont touchés par ce phénomène de désert médical. 

Ce renoncement aux soins, subi par de plus en plus de Français, n’est pas sans conséquences. Un retard de diagnostic obère les chances de guérison des malades et peut nécessiter des traitements plus lourds, plus longs et donc plus coûteux.

Rénovation hospitalière : allier bonne prise en charge et cadre de travail attractif

Selon la Direction de la recherche, des études, de l'évaluation et des statistiques (DREES), le parc immobilier des établissements publics de santé est vieillissant. Le taux de vétusté du bâti est passé de 51,3 % en 2021 à 58,5 % en 2023. 

Des infrastructures hospitalières obsolètes nuisent à la qualité des soins offerts aux patients, mais impactent aussi le personnel avec un cadre de travail moins attractif contribuant à une crise des vocations. Les conséquences sont multiples :

  • baisse d’efficacité et rupture de la continuité des soins : fuites d’eau, plafonds détériorés, ascenseurs en panne… les dégradations du bâti hospitalier perturbent l’organisation et la productivité des professionnels de santé ;
  • risque sécuritaire : la vétusté des infrastructures augmente significativement les risques d'accidents du travail et compromet la sécurité physique des soignants ;
  • stress et épuisement moral : l'environnement dégradé et l'inconfort thermique (liés à la mauvaise performance énergétique) participent à l'épuisement professionnel et exposent les patients vulnérables à des risques sanitaires accrus, il n’est pas rare de mesurer plus de 30° dans les bâtiments lors des canicules ;
  • surcharge et compensation des problématiques structurelles : le maintien des standards d'hygiène est entravé par l'état des locaux, imposant une surcharge aux équipes pour compenser ces déficits par des sur-nettoyages ou des protocoles additionnels ;
  • perte d’attractivité et rétention du personnel : des conditions de travail délabrées constituent un obstacle majeur au recrutement et à la rétention des professionnels, contribuant au sous-effectif chronique.

La problématique du renouvellement du bâti hospitalier est centrale. Ce sujet recouvre aussi bien des questions techniques, avec la mise aux normes sécuritaires, le désamiantage…, que des questions organisationnelles avec des travaux d'aménagement pour favoriser les synergies entre les services et ainsi améliorer la prise en charge des patients.

Solène Moitry, Cheffe de projet du secteur public local et projets complexes à la Direction des Prêts de la Banque des Territoires

Répondre au coût de rénovation de l'hôpital public

Conjointement avec la direction du réseau, la Banque des Territoires a récemment apporté son soutien financier à deux établissements hospitaliers.

  • Le CHU de Caen en Normandie bénéficie d'un prêt Transformation Écologique d'un montant de 105 M€ pour son projet de reconstruction de l'hôpital afin de réaliser un regroupement d'activités sur un site de 16 hectares totalisant 110 000 m2 de surface de plancher dont la livraison est prévue en 2026.
  • Le centre hospitalier La Palmosa à Menton en région Provence-Alpes-Côte d’Azur, bénéficie d'un prêt Cohésion Sociale de 851 000 € pour son projet de rénovation et extension de son bâtiment principal, construit en 1979, qui accueille les urgences.

Financer les travaux de rénovation du bâti hospitalier

En fonction de la nature du projet, du besoin de financement, du calendrier des travaux, la Banque des Territoires propose différentes solutions pour permettre aux hôpitaux de construire de nouveaux bâtiments performants ou de réaliser des travaux de rénovation énergétique :

  • le prêt Transformation Écologique : ce prêt au taux du livret A + 0,50 % dédié aux opérations avec exigences de performances environnementales de construction (normes RT 2012 ou RE 2020) et de rénovation (au moins 30 % de gain énergétique après travaux), permet d'emprunter 100 % du besoin de financement, quel que soit le montant ;
  • le prêt Cohésion Sociale : cette offre de prêt au taux du livret A + 0,60 %, sans critère d’éco-conditionnalité, permet de financer la rénovation et la construction des infrastructures de santé, en empruntant 100 % du besoin de financement jusqu'à 5 M€ et 50 % du besoin de financement au-delà de 5 M€ ;
  • le prêt Renouvellement Urbain pour financer les opérations situées dans les zones de géographie prioritaire (Quartiers prioritaires de la Politique de la Ville et communes des dispositifs Action Cœur de Ville et Petites Villes de Demain).

La Banque des Territoires s'inscrit comme un partenaire de confiance, à long terme, auprès des établissements hospitaliers pour mener à bien les opérations. Les caractéristiques financières de nos prêts nous permettent de nous adapter au calendrier des travaux, notamment lorsque ceux-ci sont réalisés en site occupé, afin d'assurer la continuité des soins.

Solène Moitry, Cheffe de projet du secteur public local et projets complexes à la Direction des Prêts de la Banque des Territoires

Pour accompagner les chantiers de rénovation des hôpitaux, la Banque des Territoires met également à disposition des crédits d'ingénierie pour appuyer la structuration des projets et le plan de financement.

 

Sources :

1 Rapport d’information n°137 du Sénat (novembre 2024), chiffres fournis par la Caisse nationale d’assurance maladie (Cnam)
2 Rapport de la Cour des comptes, mai 2024
3 IPSOS - Enquête sur les Français et l’accès aux soins, mars 2024

Solène Moitry

Cheffe de projet du secteur public local et projets complexes à la Direction des Prêts de la Banque des Territoires

Diplômée d'un Master de l'Université Paris Dauphine, Solène Moitry a exercé un peu plus de cinq ans en banque commerciale. En avril 2024, elle a rejoint le groupe Caisse des Dépôts au poste de Cheffe de projet du secteur public local et projets complexes à la Direction des Prêts de la Banque des Territoires.

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