Archives

Finances locales - Budgets annexes des collectivités : à consommer avec modération...

Un rapport IGA-IGF préconise de réduire l'usage des budgets annexes par les collectivités. L'outil ne serait en effet pas toujours le meilleur pour identifier les activités et leurs coûts.

Les budgets annexes des collectivités territoriales et de leurs groupements, qui retracent les opérations budgétaires de certains services publics locaux dépourvus de personnalité juridique (eau, assainissement, déchets, transports…), sont loin d'être anecdotiques. Au nombre de 48.000 en 2014, ils représentaient 25 milliards d'euros de dépenses et autant de recettes. Si les budgets de nature communale étaient les plus nombreux (35.700), les quelque 9.000 budgets se rattachant aux communautés étaient de loin les plus importants, avec 8,6 milliards d'euros de dépenses de fonctionnement (soit près de 30% des dépenses de fonctionnement des communautés). Tel est le panorama des budgets annexes que l'inspection générale de l'administration (IGA) et l'inspection générale des finances (IGF) ont dressé dans un rapport que s'est procuré Localtis. Réalisé dans le cadre de la revue des dépenses (tout comme deux autres rapports portant respectivement sur la fonction achat et le patrimoine des collectivités territoriales), le gouvernement vient de le communiquer au Parlement, dans la perspective de l'examen du projet de loi de finances pour 2017.
Les budgets annexes présentent des avantages. En matière d'aménagement, ils permettent d'éviter d'importantes variations sur le budget principal d'une collectivité et dans le cas des services publics industriels et commerciaux (Spic), ils permettent l'équilibre des recettes et des dépenses. Dans ces cas-là, ils sont obligatoires. Pour les services publics administratifs, leur usage est facultatif et conditionné. Les collectivités choisissent alors cette solution souvent pour identifier les coûts directs du service.

D'autres solutions pour identifier les coûts

Si son usage est prisé par certaines collectivités, l'outil présente toutefois "des limites", estime la mission. En particulier, les budgets annexes ne retracent pas toujours l'ensemble des coûts d'un service public. Dès lors, la mission recommande de limiter leur recours : ils devraient être obligatoires pour les opérations d'aménagement et de lotissement, pour les Spic de la distribution de l'eau et de l'assainissement et pour ceux de la collecte et du traitement des déchets. Ils seraient aussi obligatoires pour les services publics et activités soumis à une obligation d'équilibre financier.
Dans le cas des services publics administratifs pour lesquels aujourd'hui les collectivités disposent de la faculté de créer des budgets annexes, il en va tout autrement. La mission recommande "de ne plus inciter" les collectivités à créer des budgets annexes dans de tels cas. Elle estime, en effet, que pour identifier les coûts, il existe d'autres outils "plus souples", comme la nomenclature fonctionnelle ou les états annexés. En outre, les hauts fonctionnaires de l'Etat trouvent inutile de continuer à utiliser les budgets annexes dans le but précis de suivre les activités soumises à la TVA et recommandent donc de supprimer, dans l'instruction budgétaire et comptable M14, la phrase invitant les collectivités à procéder ainsi.

Analyse consolidée des comptes des collectivités

Du fait du poids des budgets annexes, leur prise en compte constitue un enjeu essentiel dans la production de données statistiques sur les finances locales. Or, de manière surprenante, les institutions qui interviennent dans ce domaine (Observatoire des finances locales, Cour des comptes, service des études de la Banque postale...) ne consolident pas les données des budgets principaux et de celles des budgets annexes. Afin de disposer d'"une vision plus juste" des finances locales, la mission recommande à la fois de renforcer la fiabilité des données sur les budgets annexes et de remédier à leur "sous-utilisation".
Si la baisse des dotations de l'Etat aux collectivités devait être prolongée au-delà de 2017, la mission estime qu'une "réflexion" devrait être menée pour savoir s'il faut introduire les recettes des budgets annexes dans le calcul de sa répartition. Aujourd'hui, en effet, la contribution au redressement des finances publiques est calculée en fonction des recettes réelles de fonctionnement des seuls budgets principaux. Les collectivités qui ont créé des budgets annexes s'en trouvent avantagées. Le député Olivier Dussopt s'était alerté à l'automne dernier de cette situation (voir notre article du 8 mars 2016) et avait souhaité une modification des règles. Mais le gouvernement avait émis son veto. La mission conforte la position de l'exécutif. Mettant en avant des difficultés techniques et précisant que le changement aurait des effets relativement "significatifs" sur la contribution payée par les groupements à fiscalité propre, elle exclut sa mise en œuvre "à court terme".