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Covid-19 : mesures renforcées pour la prise en charge des personnes handicapées et de leurs aidants

Lors d'une téléconférence de presse le 4 avril, Olivier Véran et Sophie Cluzel, la secrétaire d'État chargée des personnes handicapées ont procédé à un large tour d'horizon sur la situation des personnes handicapées et de leurs aidants et annoncé un certain nombre de mesures nouvelles "pour soutenir les établissements et services médicosociaux dans la gestion sanitaire de la crise, pour garantir l'accès aux soins des personnes handicapées et prévenir l'épuisement des aidants".

Ces mesures s'adressent aux "10 millions de Français handicapés et 8 millions de proches aidants [qui] s'adaptent chaque jour face à la crise", chiffres trop élevés pour ne pas inclure aussi les personnes âgées en perte d'autonomie. Au-delà des décisions déjà prises depuis le début de la crise sanitaire (voir nos articles ci-dessous), les dispositions annoncées le 4 avril se fondent sur un avis du Haut conseil de la santé public (HCSP) du 30 mars sur l'accompagnement des personnes en situation de handicap. Le HCSP rappelait notamment trois principes généraux : proposer des solutions pour toutes les formes de handicap, graduer et agir par subsidiarité, et garantir le respect du droit des personnes en situation de handicap et des aidants à participer à la co-construction des solutions. Il recommandait également plusieurs mesures, comme une organisation graduée de la continuité d'accompagnement (avec, "pour des cas exceptionnels", la réouverture d'externats ou d'accueils de jour), le soutien à la continuité de l'accompagnement au domicile, l'organisation et la sécurisation des transports...

Les "cinq principes d'action" présentés par Olivier Véran et Sophie Cluzel s'inspirent en partie de ces préconisations. Le premier consiste à mettre en place un suivi renforcé et en temps réel de l'évolution de l'épidémie dans le secteur du handicap. Ceci est rendu possible, comme pour les Ehpad, par la mise en service, le 28 mars, du portail de signalement des cas de covid-19 et des décès dans les établissements sociaux et médicosociaux (ESMS). Des cellules médicosociales, communes aux secteurs des personnes âgées et du handicap, sont également  déployées par les ARS (agences régionales de santé) "pour appuyer les structures, en lien avec les conseils départementaux".

Renforcer la prévention et ne pas laisser les établissements seuls face aux cas de covid-19

Second principe : renforcer les mesures de prévention au sein des établissements pour personnes handicapées. Comme dans les Ehpad, il est ainsi "très fortement recommandé aux responsables d'établissements, en lien avec le personnel soignant, de limiter les déplacements au sein de l'établissement". Une évolution vers un confinement à la chambre, nettement plus difficile à assurer pour les personnes handicapées, notamment mentales, que pour les personnes âgées dépendantes. Dans cette même optique de prévention, mais de façon encore assez vague, il est également prévu de faciliter la réalisation des tests grâce à la "mobilisation renforcée" des équipes mobiles de prélèvement et des infirmiers libéraux.

A noter : en marge de cette téléconférence de presse, Olivier Véran a également promis, le 4 avril, la livraison de "500.000 masques par jour au secteur médicosocial" (plus large que le seul champ du handicap), tout en reconnaissant qu'"il y a toujours ces éternels problèmes de logistique, pour lesquels nous avons renforcé nos schémas de distribution". A cette occasion, il s'est félicité de la contribution des départements qui "nous aident pour la répartition du matériel de protection, à la fois à destination des établissements médicosociaux mais également pour ceux qui interviennent à domicile".

Le troisième principe consiste à "ne pas laisser les établissements et services seuls pour prendre en charge les cas de covid-19". Pour cela, il est notamment prévu, "lorsque les ressources internes sont insuffisantes", de mobiliser les professionnels de santé volontaires, la réserve sanitaire et les étudiants en santé. Si cela ne suffit pas pour surmonter les difficultés, il sera possible de réquisitionner des professionnels de santé. Ces différentes étapes de mobilisation seront assurées par la cellule médicosociale mise en place par chaque ARS (voir plus haut), l'acte de réquisition revenant toutefois au préfet. Pour les populations les plus fragiles, comme les personnes polyhandicapées, le recours aux spécialistes hospitaliers qui les suivent habituellement "sera également recherché et mis en place via la sollicitation des médecins des filières maladies rares". Et toutes les solutions possibles de télémédecine seront déployées dans les établissements qui les accompagnent.

Anticiper les hospitalisations et soutenir les aidants

Le quatrième principe consiste à anticiper et à organiser une prise en charge à l'hôpital, lorsque celle-ci se révèle indispensable. A cette fin, les professionnels et les proches aidants sont invités à tenir à jour le dossier de liaison de la personne handicapée, dans l'hypothèse d'une hospitalisation d'urgence. Il est aussi prévu de "tendre à terme" vers la présence, dans chaque centre 15, d'un médecin régulateur référent pour la prise en charge des personnes handicapées, comme cela se fait déjà dans certains d'entre eux. De même, les personnes handicapées, notamment vieillissantes, bénéficieront de la filière d'admission directe dans les services hospitaliers, déjà prévue par la stratégie de prise en charge des personnes âgées. Enfin, si l'établissement hospitalier n'est pas en mesure d'apporter l'accompagnement humain nécessaire – ce qui pourrait être le cas étant donné la saturation des services – "la présence d'un aidant professionnel ou familial auprès de la personne handicapée devra être envisagée à titre exceptionnel et dans des conditions très strictes de sécurité".

Dernier principe présenté par Olivier Véran et Sophie Cluzel : le renforcement de la continuité de l'accompagnement médicosocial pendant la durée de l'épidémie, et la vigilance accrue à apporter "à l'identification des besoins de répit des aidants exposés à un risque d'épuisement physique et psychique, ainsi qu'aux besoins de soutien des personnes isolées". Il est donc possible d'envisager des solutions de "relayage à domicile" dans des conditions sanitaires sécurisées, voire – de façon exceptionnelle et sous réserve d'un accord de l'autorité sanitaire – de mettre en place un accompagnement individualisé par un professionnel dans les espaces extérieurs des établissements médicosociaux. En cas de "difficulté très importante" dans le maintien à domicile, les professionnels peuvent également proposer sans formalité, auprès de la MDPH (maison départementale des personnes handicapées), un accueil temporaire en hébergement, pour 7 à 14 jours renouvelables, dans le respect des consignes sanitaires nationales. Ces possibilités valent aussi pour les assistants et accueillants familiaux accompagnant des enfants et des jeunes handicapés confiés à l'ASE (aide sociale à l'enfance).

 

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