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Transports - Des parlementaires planchent sur l'avenir des ports français

C'est un fait peu commun : trois missions parlementaires débutent en même temps leurs travaux sur l'attractivité des grandes places portuaires. Elles seront menées tambour battant avec un point d'étape dans les dix prochains jours et des conclusions en juin. Pourquoi une telle urgence ? Le 1er mars, le "think tank" TDIE rassemblant élus et professionnels des transports a apporté quelques réponses lors d'une conférence portant sur cet enjeu.

Près de quatre ans après la remise d'un rapport sénatorial sur la relance portuaire (voir notre article dans l'édition du 12 juillet 2011), dans le contexte à l'époque d'une délicate réforme, voilà que l'attractivité, la compétitivité et la qualité des places portuaires françaises reviennent au rang des enjeux intéressant le Parlement. Ou du moins une petite frange – à la fois des députés et sénateurs – qui s'attelle, à la demande du Premier ministre, à des travaux qui seront rapportés au secrétaire d'État en charge des transports Alain Vidalies. Un point d'étape est prévu dès les prochaines semaines et leurs conclusions sont attendues en juin.

Sortir de la logique de seconde zone

D'ici là, les auditions et déplacements s'enchaînent, chacune de ces trois missions parlementaires ayant pour objet d'étude un axe portuaire spécifique. Par exemple, l'axe Seine, et donc le devenir des ports du Havre et de Rouen, revient à la députée socialiste de Seine-Maritime Valérie Fourneyron et au sénateur Les Républicains Charles Revet, élu du même département. Leur lettre de mission souligne les progrès réalisés, notamment avec la création du groupement Haropa, mais pointe le "déficit d'attractivité et de compétitivité" dont ces ports "souffrent encore par rapport à leurs principaux concurrents, pourtant moins bien situés géographiquement". Déficit qui se traduit, selon cette même lettre, dans les volumes traités "bien en-deçà de leur potentiel, et sans commune mesure avec les meilleurs concurrents". Or, poursuit la missive, "rien ne peut expliquer que la France, première façade maritime d'Europe, soit durablement un acteur de seconde zone dans le domaine du transport de marchandises". Charge aux deux élus normands de recenser les freins à lever et de définir une stratégie cohérente pour que ces ports tirent au mieux partie des efforts financiers actés dans le cadre des dernier contrats de plan Etat-région (CPER) francilien et normand (un milliard d'euros d'investissements au bénéfice de la vallée de la Seine). A l'ordre du jour également, la préparation "dès à présent" des premières pistes et orientations en vue des CPER suivants (2020-2025).

Une stratégie de front commun

Le 1er mars, lors d'une conférence du "think tank" TDIE les élus et professionnels réunis ont accueilli favorablement cette dynamique visant à élever l'enjeu de développement portuaire, "souvent confiné dans sa dimension technique", à un niveau de débat plus politique. "Tout n'est pas perdu face au centre de gravité des ports d'Europe du Nord – l'axe Anvers-Amsterdam-Rotterdam-Hambourg – qui polarisent certes la majorité des trafics, acteurs et investissements mais face auxquels en étant soudés - Douanes, État, acteurs portuaires et élus compris - nous conservons un potentiel de développement", a motivé Herbert de Saint-Simon, ancien directeur général de Bolloré Logistics et président d'une organisation professionnelle du secteur (TLF Overseas).

Echec souvent mis en avant : l'enlisement du dossier du terminal multimodal du Havre, plombé par un manque de coordination et des problèmes économiques. "Au-delà des soucis de gouvernance portuaire, laquelle peut toujours être améliorée mais ne fait pas le trafic, ce qui est actuellement le plus préoccupant touche au modèle économique. La capacité d'autofinancement des ports s'affaiblit. Ils subissent de plein fouet la hausse de la fiscalité, la fermeture de raffineries, les difficultés économiques de leurs clients", a alerté Hervé Martel, à la tête de l'Union des ports de France et du directoire du grand port maritime du Havre. Un signe optimiste, néanmoins : si la force des ports d'Europe du Nord tient dans leur hinterland, un port français, celui de Dunkerque, est réputé pour bien s'en tirer en la matière. Du côté des parlementaires, ce sont les sénateurs de la Somme Jérôme Bignon (LR) et du Nord René Vandierendonck (PS) qui se pencheront sur ce bon élève nordiste, en vue d'améliorer encore sa zone d'influence et notamment les liaisons fluviales et ferroviaires entre le port et l'arrière-pays.

Enfin, la sénatrice du Rhône Elisabeth Lamure (LR) et le député des Bouches-du-Rhône François-Michel Lambert (PS) se concentreront sur le renforcement des connexions fluviales et ferroviaires du port de Marseille-Fos. La création d'une quatrième mission parlementaire ciblée sur la façade atlantique, où est situé le port de Nantes-Saint-Nazaire, a été évoquée, sans être à ce jour confirmée.