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Réforme de l'Etat - Deuxième étape de la RGPP : 150 nouvelles mesures pour économiser 10 milliards d'euros

Le ministre du Budget, François Baroin, a présenté en Conseil des ministres le 30 juin une communication relative au quatrième rapport d'étape et aux nouvelles mesures de la révision générale des politiques publiques (RGPP). Au nombre de 150, ces nouvelles dispositions doivent permettre "d'améliorer la qualité de service et de contribuer fortement à l'effort de redressement des comptes publics", a affirmé le ministre. L'objectif est d'"économiser 10 milliards d'euros d'ici à 2013", alors que selon le gouvernement, la première phase de la RGPP avait "permis d'afficher des économies de l'ordre de 7 milliards". Les nouvelles mesures doivent permettre de poursuivre la politique de non-remplacement d'un fonctionnaire sur deux partant à la retraite, "ce qui correspond au non-remplacement de 100.000 départs entre 2011 et 2013 et permet une économie de l'ordre de 3 milliards d'euros", a affirmé François Baroin. Toutefois, la moitié de ces 3 milliards sera reversée aux fonctionnaires toujours en poste, ce qui diminue d'autant les économies réalisées.

"L'objectif est également de réduire de 10% les dépenses de fonctionnement de l'Etat et des opérateurs, soit une économie d'environ 2 milliards d'euros d'ici à 2013", a ajouté le ministre. La centralisation de tous les achats réalisés par l'administration au sein d'un seul service devrait permettre d'épargner 700 millions d'euros et la rationalisation du patrimoine immobilier de l'Etat faire gagner environ 300 millions d'euros. Le plan prévoit que chaque fonctionnaire ne dispose plus que d'un espace de travail de 12 m2 contre 18 m2 jusqu'ici. L'Etat veut aussi moderniser son parc informatique et vise 300 millions d'économies sur ce poste.
"A cela viendra s'ajouter une économie de 10% des dépenses d'intervention, soit environ 5 milliards d'euros", a poursuivi François Baroin. Les crédits d'intervention comprennent notamment plusieurs aides économiques et sociales (emploi, logement, etc.) qui représentent 66 milliards d'euros au total.

 

100 démarches administratives à simplifier

Parmi les mesures annoncées, "un programme quinquennal de fusions sera lancé pour supprimer 150 corps" et "un effort de mutualisation sera engagé sur les formations comme sur la logistique des concours qui sera regroupée au sein d'un ou plusieurs organismes". 100 démarches administratives devront être "dématérialisées et simplifiées" d'ici à fin 2012 et l'Etat publiera régulièrement un baromètre rendant compte de la qualité du service rendu aux citoyens et de la gestion de leurs réclamations. Les démarches visées sont très variées : demande en ligne d'aide au logement, simplification des procédures liées au changement d'école suite à un déménagement, déclaration en ligne de l'avancement des travaux dans les procédures d'urbanisme (déclaration d'ouverture de chantier et déclarations attestant l'achèvement et la conformité des travaux), transmission des données par Internet lors du recensement de l'Insee,  simplification du recrutement d'un apprenti, compte en ligne personnalisé pour les TPE-PME leur permettant d'effectuer l'ensemble de leurs démarches administratives, possibilité de créer, de modifier et de dissoudre son association par Internet ou dépôt des bilans d'exécution dans le cadre des financements accordés au titre du Fonds social européen (FSE).

Le programme d'audit des principaux opérateurs de l'Etat va être poursuivi : en 2010 et 2011, il concernera notamment le Louvre, le château de Versailles, le Centre national de la recherche scientifique (CNRS), l'Institut national de la recherche agronomique (Inra) l'Ademe et Oseo. La lutte contre la fraude aux finances publiques va être renforcée, en particulier grâce aux croisements de fichiers.

A ces mesures transversales s'ajoutent des dispositions relevant de chaque ministère. Le ministère du Développement durable doit ainsi "étudier l'opportunité de créer un établissement public des espaces naturels protégés", moderniser l'application du droit des sols (dont le permis de construire) et les déclarations d'urbanisme liées aux travaux, notamment par la dématérialisation et poursuivre la réforme du numéro unique de demande de logement social. Côté ministère de la Justice, les demandes d'extrait d'acte d'état civil vont être supprimées et "remplacées par des échanges dématérialisés entre les mairies". Le ministère de l'Intérieur doit entre autres "mettre fin à l'obligation de tenue et de transmission par les communes d'outre-mer de triplicatas des actes d'état civil", une obligation qui remonte... à un édit royal du XVIIIe siècle.

Le ministère de la Santé va devoir "accompagner la mise en place" des agences régionales de santé (ARS) par la réalisation d'un audit spécifique en 2010 destiné à "optimiser le fonctionnement de ces nouvelles agences, notamment par la réingénierie des procédures qu'elles ont à mettre en oeuvre". Le ministère du Budget va s'attacher à renforcer la dématérialisation des procédures au sein de la direction générale des finances publiques (DGFiP), notamment avec le secteur public local. La chaîne de traitement des produits locaux doit être modernisée, en encourageant le règlement par carte bancaire pour les collectivités territoriales. Le ministère du Budget est aussi chargé de préparer la mise en place de la taxe poids lourds.

Côté ministère de la Culture, il est prévu de "simplifier les demandes de subventions et leur traitement", de "développer la performance et l'efficience des opérateurs", de "simplifier les processus d'autorisation de travaux concernant les espaces et les sites protégés" et de "mettre en place une instance de pilotage interministériel renforcé" pour faciliter l'accès au patrimoine culturel et moderniser la gestion des archives de l'Etat.

 

Les syndicats dénoncent la réforme

Ce deuxième volet de la RGPP a déjà suscité de vives réactions. "Jamais concertées, jamais débattues, ni au Parlement, ni avec les élus locaux, ni avec les organisations syndicales, ces décisions ont été élaborées en catimini par quelques hauts fonctionnaires et des conseillers privés (dont certains sont directement intéressés par la privatisation de missions de l'Etat du fait de l'activité, passée et à venir, de leurs sociétés)", a dénoncé FO dans un communiqué. Selon ce syndicat, "l'objectif idéologique demeure : supprimer des emplois publics et rendre les services publics de l'Etat inopérants afin de mieux privatiser les missions ensuite".

De son côté, la CFDT a estimé que "le gouvernement s'enlise dans une réforme uniquement comptable". "Contrairement à ce qu'annonce son nom, la RGPP n'est pas un passage en revue de l'action publique à des fins de modernisation. Au contraire, elle se réduit à une restructuration administrative d'ampleur pour comprimer les coûts", a-t-elle déploré dans un communiqué. Selon elle, "le gouvernement reste sourd à l'interpellation de la CFDT sur le malaise grandissant des agents et sur la dégradation de la qualité du service public". "La RGPP souffre d'un déficit démocratique", a-t-elle encore déclaré car la méthode gouvernementale revient à "contourner les organisations syndicales".
 

Anne Lenormand