Commande publique - En l'absence de prix, pas de marché public !
Dans un arrêt du 7 mars 2014, le Conseil d'Etat a rappelé l'importance du critère lié à la rémunération du cocontractant de l'administration pour se prononcer sur la qualification juridique d'un contrat public. L'affaire en cause concernait un centre hospitalier universitaire mais la solution rendue est largement transposable aux collectivités territoriales.
Dans les faits, le centre hospitalier universitaire (CHU) Hôpitaux de Rouen avait passé un contrat de délégation de service public (DSP) pour mettre à disposition des patients du CHU des abonnements de télévision, de téléphone et d'accès à internet. Un candidat écarté saisit le tribunal administratif de Rouen en vue de l'annulation de l'ensemble de la procédure. Le juge des référés du tribunal administratif fait droit à cette demande et considère que le contrat en cause est en réalité un marché public soumis aux dispositions du Code des marchés publics. La procédure de passation dudit contrat est alors annulée et il est enjoint à la personne publique de reprendre l'intégralité de la procédure. Le CHU et la société titulaire du contrat saisissent dès lors le Conseil d'Etat afin d'annuler l'ordonnance rendue par le juge des référés.
La Haute Juridiction devait donc se prononcer sur la qualification juridique de cette convention. S'agissait-il d'une DSP ou d'un marché public soumis dans ce cas aux dispositions du Code des marchés publics ?
Pour trancher cette question, le Conseil d'Etat fait application du critère lié à la rémunération du cocontractant de l'administration. Dans le cadre d'un marché public, la personne publique verse un prix à son cocontractant en contrepartie de la prestation commandée. Dans une DSP, la rémunération du délégataire est substantiellement liée aux résultats de l'exploitation du service. Le mode de rémunération permet donc d'opérer la distinction entre ces deux types de contrats publics.
Dans l'affaire qui lui était soumise, la Haute Juridiction relève que le prestataire se rémunérait sur les recettes d'exploitation des services et devait verser à la personne publique une redevance sous la forme d'un forfait ou d'un pourcentage du chiffre d'affaires annuel. La rémunération de la société titulaire du contrat était donc substantiellement liée aux résultats de l'exploitation. "En jugeant que le contrat devait être regardé comme conclu à titre onéreux au sens des dispositions de l'article 1er du Code des marchés publics, alors que la personne publique ne versait aucune rémunération à son cocontractant et percevait, en contrepartie de l'occupation de son domaine, une redevance dont le montant résultait de la mise en en concurrence, le juge des référés a commis une erreur de droit", estiment les juges du Palais royal. L'ordonnance rendue par le juge des référés est donc annulée.
L'Apasp
Référence : Conseil d'Etat, 7 mars 2014, n° 372897