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Réforme des collectivités - Encadrement des financements croisés : les nouvelles règles expliquées

Pourtant très discutées lors de leur examen au Parlement, les dispositions de la loi de réforme des collectivités locales sur l'encadrement des interventions financières des collectivités, en particulier les financements croisés, sont entrées en vigueur sans faire de bruit le 1er janvier 2012. Une circulaire commente la mise en oeuvre de ces mesures : champ d'application, entités concernées, règles de calcul...

Le gouvernement vient de mettre en ligne une circulaire relative à l'encadrement des interventions financières des collectivités locales et de leurs groupements. Transmise le 5 avril aux préfets, cette circulaire signée par le directeur général des Collectivités locales intervient quatre mois après l'entrée en vigueur des dispositions des articles 73 et 76 de la loi de réforme des collectivités territoriales. Le but de ces dispositions, rappelle le document, est de "limiter la pratique des financements croisés, de mieux responsabiliser les collectivités initiatrices de projets d'investissement et de contribuer à la maîtrise de la dépense publique locale".
Ces objectifs passent par l'instauration d'un seuil minimum de participation de la collectivité maîtresse d'ouvrage au financement de son projet. Un seuil qui, quelle que soit la taille de la collectivité, est de 20% du montant total des financements apportés par des personnes publiques à ce projet.
Le principe s'applique "aux seules dépenses d'investissement" des collectivités territoriales et de leurs groupements (y compris les syndicats mixtes), indique la circulaire. En revanche, ne sont pas visés par ces mesures : les syndicats mixtes constitués sous une forme dite "ouverte élargie" (c'est-à-dire comprenant des collectivités, des EPCI et d'autres personnes morales de droit public, à l'instar des organismes consulaires) et les établissements publics locaux qui ne constituent pas des groupements de collectivités territoriales tels que, par exemple, les offices publics de l'habitat ou les centres communaux d'action sociale.
Introduites à l'Assemblée nationale par le gouvernement en première lecture du projet de loi de réforme des collectivités, les dispositions sur l'encadrement des cofinancements étaient initialement plus strictes. Mais face à la pression des élus de tous bords politiques, y compris l'UMP, le gouvernement avait dû multiplier les assouplissements.

De nombreuses dérogations

Au final, le seuil de participation minimale du maître d'ouvrage est de 20% - au lieu des 30% initialement envisagés - et des dérogations sont prévues : en faveur des opérations de la politique de la ville et concernant le renouvellement urbain ; pour la rénovation du patrimoine ; si les projets s'inscrivent dans la reconstruction d'ouvrages publics après des calamités publiques. Enfin, la Corse bénéficie d'un régime particulier, puisque le seuil de participation minimale du maître d'ouvrage y est seulement de 10% pour un certain nombre d'investissements.
A l'aide d'exemples concrets (construction d'une crèche, valorisation d'un château, mise en accessibilité d'une mairie, réfection de l'éclairage d'un stade...), la circulaire explicite les règles de calcul de l'obligation de participation de 20% du maître d'ouvrage. Ce montant hors taxes peut inclure les dépenses consacrées aux études menées en vue de la réalisation de l'investissement, apprend-on ainsi. Surtout, on retiendra que le calcul de la participation "ne s'apprécie qu'au regard des financements apportés par les seules personnes publiques". Les éventuels financements purement privés (mécénat) ou apportés par des organismes de droit privé chargés d'une mission de service public, tels que les caisses d'allocations familiales, les fédérations sportives, la Mutualité sociale agricole ou les sociétés d'économie mixte, ne sont donc pas pris en compte. En outre, il faut noter que la participation de l'Etat "ne doit pas porter le total des aides publiques directes à plus de 80% de la dépense subventionnable engagée par la collectivité".
Sous réserve de l'application de cette règle des 20% de participation, les collectivités territoriales et leurs groupements restent libres des interventions financières décidées dans le cadre de leurs compétences, stipule la circulaire.

Départements et régions : limitation des aides aux associations

La loi de réforme des collectivités a en outre encadré la capacité des départements et des régions à contribuer, en dehors de leurs compétences, au financement des opérations menées sous maîtrise d'ouvrage d'autres entités. Ainsi, hors de leurs compétences, "le principe est que les départements ne peuvent allouer des subventions dans le cadre d'opérations d'investissement qu'aux seuls communes et groupements de communes. De même, les régions ne peuvent contribuer qu'au financement des opérations d'intérêt régional menées sous maîtrise d'ouvrage des départements, des communes et de leurs groupements et des groupements d'intérêt public", rappelle la circulaire (avec, toutefois, une dérogation pour les opérations réalisées dans le cadre des contrats de projet Etat-région). Conséquence : dès lors que la subvention envisagée "ne s'inscrit pas dans l'exercice d'une compétence dont ils disposent", les départements et les régions ne peuvent notamment pas financer des projets dont la maîtrise d'ouvrage est assurée par des associations ou encore par des syndicats mixtes ouverts.
L'encadrement des interventions financières des collectivités territoriales est entré en vigueur le 1er janvier dernier dans la plus grande discrétion. A l'époque, aucun commentaire public n'a été émis, alors même que l'adoption des dispositions au Parlement avait provoqué la protestation de nombreux élus locaux. Le dispositif est ainsi théoriquement applicable, alors qu'un décret en Conseil d'Etat, non encore paru, doit toiletter un certain nombre de dispositions réglementaires pour les mettre en conformité avec la loi. Le projet de décret (en téléchargement ci-contre) a été examiné par le Comité des finances locales lors de sa séance du 7 février dernier.
Faire en sorte que les gros projets d'investissement des collectivités locales soient dorénavant portés par les communautés, à la place de leurs communes membres dont la taille est insuffisante, c'est dans cet objectif que la direction générale des Collectivités locales, à la demande du gouvernement, a conçu l'encadrement des cofinancements des collectivités locales. Telle est en tout cas l'analyse que Jean-Jacques de Peretti, maire de Sarlat et auteur d'un rapport au président de la République sur la clarification des compétences des collectivités, faisait fin 2011 en réponse à une question de Localtis.

Thomas Beurey / Projets publics

Références : circulaire du 5 avril 2012 relative aux articles 73 et 76 de la loi de réforme des collectivités territoriales concernant les interventions financières des collectivités territoriales et de leurs groupements ; la circulaire précise la portée de l'article L.1111-10 du Code général des collectivités territoriales.

 

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