En sept ans, Jouques est devenu un territoire d'emploi (13)

« L’entreprise à but d’emploi Élan Jouques rend des services à la population, qui n’existaient pas auparavant, et elle a sauvé des gens d’une paupérisation quasi certaine », témoigne Éric Garcin, maire de la commune de Jouques, située à 20 km au nord-est d'Aix-en-Provence. Éloignée du bassin d’emploi d’Aix-Marseille du fait de sa situation enclavée au cœur d’une vallée, la commune connaît en 2015 un taux de chômage de 10 %, constitué, pour près de la moitié, de chômeurs de longue durée. « Beaucoup de personnes avaient renoncé à trouver un travail, surtout des parents isolés, à cause du coût et du temps de transport pour aller vers les bassins d’emploi. » Créée en 2017 dans le cadre de la première expérimentation Territoires zéro chômeur de longue durée, l’entreprise à but d’emploi (EBE) est aujourd’hui le premier employeur de la commune, devant la mairie qui compte 45 agents. « Nous ne sommes plus vus comme la boîte des fainéants, mais comme l’entreprise de services de la commune », formule abruptement son directeur, Ludwig Rouault.

5 pôles d’activités

Une structuration au fil du temps

Portée avec ferveur par les habitants et la municipalité sous la mandature précédente, l’expérimentation a su s’adapter aux réalités de la vie d’une entreprise locale. « Au départ, l’organisation interne de l’EBE était quasiment horizontale, ce qui a rapidement posé problème quand il fallait prendre des décisions d’entreprise. Aujourd’hui, je dirais que le management est diagonal : les décisions sont très collaboratives pour tout ce qui relève de l’opérationnel, mais c’est le conseil d’administration avec la direction qui prend les décisions stratégiques » témoigne le directeur, arrivé à Élan pour restructurer l’organisation au bout d’un an. De même, les relations entre l’EBE, la mairie et le Comité local pour l’emploi (CLE) ont été revisitées au démarrage de la nouvelle mandature, en 2020. La présidente de l’EBE a démissionné de son mandat de conseillère municipale. « Il y a aujourd’hui une frontière nécessaire et voulue entre les trois parties », souligne le maire, qui préside le CLE.

Le Comité local pour l’emploi réunit 2 à 3 fois par an tous les acteurs de l’emploi (Pôle emploi, Cap emploi, département…) pour étudier les parcours des personnes privées d’emploi, orienter les candidats vers l’EBE et imaginer des activités nouvelles au service du territoire, en s’assurant toujours de la non-concurrence avec des activités existantes. Cette animation territoriale est essentielle au développement de l’EBE. « Nous avons besoin d’une personne pour l’ingénierie du comité local, explique le maire, mais ce poste n’était pas financé dans la première loi d’expérimentation. Nous avons monté un dossier auprès du Fonds social européen pour obtenir un financement sur 3 ans. » Pour autant, le territoire est d’ores et déjà « à l’exhaustivité » : dès que le comité local identifie un profil, l’EBE parvient à l’embaucher sous 4 à 5 semaines. « Nous ne sommes pas dans une dynamique de création de nouvelles activités, mais de renforcement de l’existant », souligne le directeur.

Une commune et des habitants revitalisés par les activités nouvelles

Entre 2017 et 2023, 87 personnes privées d’emploi depuis plus de deux ans ont ainsi été embauchées en CDI à Élan Jouques. 54 sont salariées à fin 2023 et 33 sont reparties, tous motifs confondus : retraite, embauche, création d’activité, déménagement, non-adhésion au projet. « L’EBE apporte énormément à la commune, se réjouit le maire. 50 personnes ont réglé leurs problèmes de mobilité, de garde d’enfant, de temps de travail aménagé. Ça fait du bien de voir des gens qui étaient enfermés chez eux, au bord du gouffre, repasser le permis, avoir un logement décent, se faire soigner. Au CCAS, les demandes d’aides ont diminué. »