Finances locales : le spectre d'une année noire s'éloigne

La situation financière d'ensemble des collectivités locales devrait être à la fin de 2025 "meilleure qu'on ne pouvait le craindre", estime Luc Alain Vervisch, directeur des études à La Banque postale, qui présentait ce 23 septembre à la presse la traditionnelle note de conjoncture des finances locales. Les départements devraient même bénéficier d'une "bonne surprise", grâce au rebond des droits de mutation à titre onéreux (DMTO).

L'étau se desserre un peu pour les collectivités : si leurs recettes de fonctionnement devraient continuer de ralentir (+2,2%, après +2,6% en 2024) pour atteindre 283,7 milliards d'euros cette année, les dépenses de fonctionnement (241,4 milliards d’euros) devraient afficher de leur côté une décélération très nette (+2,5% après +3,7% en 2024), à la faveur notamment d'une forte réduction de l'évolution des charges à caractère général et des prix des dépenses alimentaires et énergétiques.

Les départements devraient même bénéficier d'une "bonne surprise". Après s'être effondrée à 2,3 milliards d'euros en 2024, leur épargne nette devrait rebondir pour atteindre 3 milliards d'euros à la fin de 2025. Et cela, alors que les départements anticipaient dans les budgets primitifs votés au début de l'année un recul à "200 millions d'euros". Selon l'Observatoire des finances et de la gestion publique locales (OFGL), les budgets primitifs départementaux dessinaient un scénario particulièrement noir, avec un plongeon de l'épargne nette dans le rouge, à -0,6 milliard d'euros (voir notre article du 23 juillet).

Pas de miracle pour les régions 

Il faut dire que les départements avaient été très prudents au moment de l'élaboration des budgets pour l'année 2025 et qu'ils n'avaient pas tous anticipé la reprise du marché immobilier de ces derniers mois. Celle-ci a soutenu les droits de mutation à titre onéreux (DMTO), davantage que la possibilité ouverte par la loi de finances pour 2025 de relever de 4,5 à 5% le taux plafond de la taxe. Après deux années de chute (-22,3% et -12,8%), les DMTO perçus par les départements devraient croître de plus de 14% cette année, en dépit d'"un assez fort ralentissement" attendu pour la fin de l'année. 

Si "l'inquiétude très forte des départements sur les résultats 2025, ne sera sans doute pas confirmée", "l'interrogation et donc l'inquiétude à moyen-long terme sur leur capacité d'action" demeure cependant, tient à souligner Luc-Alain Vervisch.

De son côté, le bloc communal devrait bénéficier d'une très légère progression de l'épargne nette (+0,2%) en 2025. Toutefois, avec une croissance de 0,9% de cet indicateur, les communes seraient en meilleure position que les intercommunalités à fiscalité propre. Ces dernières enregistreraient un recul de 3,6% de leur épargne nette. 

Après deux reculs consécutifs (-11,8% en 2023, puis -7,6% en 2024), les régions et collectivités territoriales uniques connaîtraient à nouveau une réduction (-17,1%) de leur épargne nette. Celle-ci serait donc conséquente, mais moins marquée que ce que prévoyaient ces collectivités dans leurs budgets primitifs (-22,4%).

Discussions difficiles sur le projet de budget

Avec des perspectives alarmantes sur les finances départementales en 2025, Michel Barnier avait pris des décisions à l'automne 2024 pour réduire l'effort demandé en 2025 à celles-ci – par exemple une moindre ponction sur les recettes fiscales. Des mesures confirmées par son successeur, François Bayrou et qui, donc, ont été gravées dans la loi de finances pour 2025. 

Mais, avec l'amélioration de la situation financière en 2025, le nouvel hôte de Matignon, Sébastien Lecornu ne sera peut-être pas enclin à autant de bonnes grâces à l'égard des présidents de département, même s'il a lui-même exercé cette fonction. Le regain de forme des départements "ne va pas nécessairement simplifier le dialogue" entre l'exécutif et les élus locaux, au moment de la discussion sur le projet de loi de finances pour 2026, commente le directeur des études de la Banque postale.

Mais il prévient : l'année 2026 ne s'annonce pas nécessairement sous de bons auspices. "Il est vraisemblable qu'on ne retrouvera pas l'année prochaine une croissance des DMTO à la hauteur de 2025", argumente le directeur des études de la Banque postale. En outre, sous certaines hypothèses, le produit de TVA affecté aux collectivités (52,7 milliards d’euros en 2025) pourrait reculer.

Les collectivités pourraient dans ces conditions rencontrer des difficultés à maintenir leur capacité d'autofinancement. Mais, dans le même temps, la baisse de l'investissement qui devrait être observée l'année prochaine pour le bloc communal, du fait du début de l'entame d'un nouveau mandat, devrait offrir des marges de manœuvre aux communes et à leurs groupements, reconnaît-il.

Généralisation des budgets verts : premiers résultats 

Nous n'y sommes pas. En 2025, les dépenses d’investissement (hors dette) des collectivités devraient dépasser les 80 milliards d’euros (+1,2%), avec des disparités entre catégories de collectivités. Le bloc communal poursuivrait la hausse de ses investissements (+4,9%), tandis que les départements et les régions afficheraient des investissements en baisse, de respectivement -6,9% et -8,5%.

Compte tenu du niveau élevé des investissements, les collectivités continueraient à présenter un besoin de financement en fin d'année 2025. Mais à 0,35 point de PIB (10 milliards d’euros), celui-ci serait en recul par rapport à 2024, année où il s'était élevé à 0,45 point de PIB. Il serait "comblé par un recours à l’emprunt encore fort (près de 28 milliards d’euros) et un prélèvement sur la trésorerie du bloc communal", précise la Banque postale.

La note comporte une analyse des budgets verts que 240 grandes entités publiques locales (dont 110 d’au moins 50.000 habitants et de 34 EPCI d’au moins 200.000 habitants) avaient pour obligation d'élaborer au titre de l'exercice budgétaire 2024 sur le périmètre de leurs investissements. Sur la base de l'échantillon, il ressort que près de 35% des dépenses d'investissement communales et plus de 40% de celles des intercommunalités sont considérées comme favorables à la lutte contre le réchauffement climatique, contre respectivement 6% et 12% défavorables. Toujours s'agissant du bloc communal, entre 37 et 47% des dépenses d'investissement sont évaluées comme étant neutres, les dépenses non cotées ne représentant qu’environ un dixième du total. 

 

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