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Service public - Ile-de-France: le secteur privé conserve la gestion de l'eau

Les élus du Syndicat des eaux d'Ile-de-France (Sedif) ont voté le 11 décembre par 88 voix contre 54 en faveur du maintien au secteur privé de la gestion du plus gros service d'eau potable en Europe, qui alimente 4 millions d'habitants répartis sur 144 communes. Ce vote, effectué à bulletins secrets, entérine la poursuite de la délégation de service public (DSP), confiée depuis 1923 au groupe Veolia (alors Générale des eaux), et rejette de fait la constitution d'une régie publique qui avait notamment les faveurs d'élus de gauche. Ces derniers s'étaient mobilisés depuis septembre dernier et avaient lancé un appel qui avait recueilli plus de 700 signatures. L'option régie semblait avoir le vent en poupe depuis la décision prise fin novembre par la ville de Paris de remunicipaliser la distribution de l'eau dans la capitale.
Le débat public précédant le vote du 11 décembre du Sedif a souvent viré à la passe d'armes : les défenseurs de la gestion privée ont fustigé le "recours à des méthodes altermondialistes" de la part des partisans de la régie publique, qui ont, eux, accusé Veolia d'"être obnubilé par la soif de rentabilité".
Signé en 1962 pour un montant de 317 millions d'euros, le dernier contrat confié à Veolia expire fin 2010 et se trouve régulièrement au centre de critiques d'associations et d'élus de gauche qui dénoncent "une surfacturation" de l'eau francilienne, UFC-Que choisir l'ayant évaluée à 90 millions d'euros par an.
Une étude commandée par le Sedif lui-même montre pour sa part que des économies de 35 à 42,5 millions d'euros par an pourraient être réalisées en rénovant le mode de gestion actuel.
A l'issue du vote, le président (Nouveau Centre) du Sedif, André Santini, s'est montré très "optimiste" concernant une future baisse des prix, invoquant "la concurrence acharnée" qui s'est manifestée sur ce marché. "Veolia, c'est son plus beau contrat (...), ils sont très menacés, et Suez [Environnement, concurrent de Veolia, ndlr] a fait savoir, en montrant les dents, qu'il voulait être candidat. Je suis très optimiste", a-t-il résumé.
Opposante au projet, la maire (Verts) de Montreuil (Seine-Saint-Denis), Dominique Voynet, a fait part de sa "déception". "Je suis convaincue que la formule de la régie aurait permis de faire plus facilement baisser les coûts tout en assurant la sécurité de l'approvisionnement", a-t-elle déclaré. La coordination eau Ile-de-France, qui regroupe associations et usagers, estime pour sa part  dans un communiqué que le vote du Sedif est "en complet décalage avec l'opinion publique qui refuse de considérer l'eau comme une marchandise" et "aspire au contraire à une gestion publique, démocratique et transparente". L'association réclame dans l'immédiat une diminution des tarifs. "Le trop-perçu par Veolia, estimé a minima à 40 millions d'euros par an, soit plusieurs centaines de millions d'euros pour les dix dernières années doit être restitué au Sedif et permettre une baisse significative des tarifs dès 2009." 
Le Sedif doit à présent élaborer un cahier des charges détaillant les modalités de la nouvelle délégation de service public avant le lancement d'un appel d'offres international à la mi-2009. André Santini s'est notamment engagé à "étudier" la possibilité de diviser le marché en plusieurs lots ("alotissement") et à instaurer "une tarification sociale" de l'eau pour les ménages modestes.

Anne Lenormand avec AFP

 

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