"Inaction climatique" : la ville de Grande-Synthe déboutée de ses demandes contre l'État
Le Conseil d'État a rejeté ce 24 octobre les demandes de la ville côtière de Grande-Synthe et de trois associations, qui attaquaient l'État pour son "inaction climatique" face au risque de montée du niveau de la mer, a annoncé le Conseil d'État. Cette décision de la plus haute juridiction administrative clôt la procédure intentée en 2019 par le maire écologiste de cette commune voisine de Dunkerque, sur le rivage de la mer du Nord. Le Conseil d'État conclut en effet que les mesures prises par le gouvernement répondent aux injonctions émises lors de ses deux précédentes décisions, rendues en juillet 2021 et mai 2023.
La première décision dans cette affaire avait été saluée comme "historique" par les défenseurs de l'environnement. Le Conseil d'État avait ordonné au gouvernement, dirigé à l’époque par Jean Castex, "de prendre, d’ici le 31 mars 2022, toutes les mesures permettant d’atteindre l’objectif de réduction des émissions de gaz à effet de serre de - 40% en 2030 par rapport à leurs niveaux de 1990, afin de respecter les objectifs fixés dans le droit français, européen (paquet énergie-climat) et international (convention cadre des Nations unies sur les changements climatiques et Accord de Paris)". En mai 2023 (lire notre article), il avait estimé que si des mesures supplémentaires avaient bien été prises, il n’était pas encore garanti que la trajectoire de réduction des émissions de gaz à effet de serre puisse être effectivement respectée. Il avait alors ordonné au Gouvernement de "prendre de nouvelles mesures d’ici le 30 juin 2024, et de lui transmettre un bilan d’étape détaillant ces mesures et leur efficacité".
Les associations Notre affaire à tous, Oxfam et Greenpeace, qui assistaient Grande-Synthe dans cette procédure, estimaient que cette décision n'avait "pas été pleinement exécutée à la date du 30 juin 2024" et réclamaient une astreinte de 75 millions d'euros par semestre de retard faute de "mesures complémentaires".
Mais pour le Conseil d'État, les mesures prises par l'exécutif pour réduire les émissions de gaz à effet de serre françaises devraient aboutir, en 2030, à "une baisse de 39,5% par rapport à l'année 1990", pour un objectif de 40% au moment où a été lancée la procédure. Ses décisions de 2021 et 2023 doivent donc "être regardées comme entièrement exécutées", écrit-t-elle. Ces objectifs sont depuis devenus caducs, puisqu'en 2023 l'Union européenne s'est engagée à une baisse de 55% des émissions sur la période 1990-2030, la France visant pour sa part 50%.
Le Conseil d'État "constate simplement le respect d'objectifs désormais dépassés", affirme dans un communiqué une responsable de Notre affaire à tous, Elsa Ingrand. "Dans un contexte de recul sur les politiques climatiques et de décrochage de la trajectoire de baisse d'émissions de gaz à effet de serre, une telle décision est préoccupante", écrivent les associations dans un communiqué commun.
Sur le respect ou non ces nouveaux objectifs, le Conseil d'État indique dans son arrêt que le droit ne lui permet pas de se prononcer.
Grande-Synthe touchera 3.000 euros au titre des frais de justice. Les trois associations se partageront une même somme, a précisé le Conseil d'État.