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Gouvernement - Jean-Marc Ayrault : le "redressement" exige "la mobilisation de tous"

Dans sa déclaration de politique générale à l'Assemblée, le Premier ministre a avant tout insisté sur la réduction de l'endettement - une loi quinquennale de programmation des dépenses publiques est prévue - et sur l'enjeu du redressement productif. Plusieurs réformes institutionnelles sont confirmées, dont celle de la décentralisation et celle de la fin du cumul des mandats. D'autres mesures toucheront les collectivités, par exemple en matière de logement avec la multiplication par cinq des pénalités pour les communes ne respectant pas la loi SRU.

"Je crois en l'alliance de l'Etat et des collectivités locales", en "un Etat stratège", en "une décentralisation qui doit aller de pair avec la réforme de l'Etat", a fait valoir ce 3 juillet le Premier ministre devant les députés au cours de sa déclaration de politique générale. "Il est fini, le temps où l'Etat imposait ses décisions aux collectivités", a-t-il de même déclaré. Jugeant "immense" le chantier de la décentralisation et évoquant "un nouvel acte de la décentralisation, qui fera l'objet d'un large consensus", Jean-Marc Ayrault a confirmé que "la loi instituant le conseiller territorial sera abrogée" et que "le mode d'élection des conseillers généraux sera modifié pour permettre une meilleure représentativité des assemblées départementales". Il a également évoqué une modification du calendrier des élections cantonales et régionales.
"Je recevrai ce mois-ci les associations d'élus, je poursuivrai les consultations à la rentrée et je m'appuierai sur les conclusions des états généraux organisés par le Sénat, afin que le gouvernement puisse déposer un projet de loi avant la fin de l'année", a-t-il précisé.
Le Premier ministre en a profité pour confirmer plusieurs autres chantiers institutionnels importants touchant directement les élus, dont certains exigeront, a-t-il rappelé, une réforme constitutionnelle : l'introduction d'une part de proportionnelle pour les prochaines élections législatives, le droit de vote des étrangers aux élections locales, le retour – "après concertation" – d'un projet de loi de moralisation de la vie politique... Sans oublier la question sensible du cumul des mandats. Sur ce point, Jean-Marc Ayrault a été clair : "Il sera mis fin au cumul d'un mandat parlementaire et de fonctions exécutives locales pour 2014."
"Les collectivités sont prêtes à prendre part à l'effort national de redressement des comptes publics" si on leur accorde "plus d'autonomie et de clarté", a-t-il par ailleurs assuré, évoquant à ce titre un "pacte financier rénové et négocié" avec l'Etat.

"Justice territoriale"

Bien plus que les questions institutionnelles, c'est bien cet enjeu du redressement des comptes publics et, plus globalement, de l'économie du pays face à "une crise sans précédent menaçant notre modèle social", qui a occupé la majeure partie de cette déclaration de politique générale. Le principal message : le gouvernement entend bien faire de la réduction de la dette une priorité et assumer, face à cet enjeu, "une exigence de vérité". "Une France endettée est une France dépendante. Voilà pourquoi je veux réduire notre endettement public", aura-t-on par exemple entendu. Avec, en leitmotiv, une condition : "la mobilisation et l'engagement de tous".
Avec, aussi, un mot clef, la "justice" : "La justice est un facteur de croissance et de progrès", "la justice, c'est l'efficacité". Un terme que le Premier ministre a d'ailleurs décliné pour évoquer la "justice territoriale" et donc les "territoires fragiles", notamment ceux des banlieues. La politique de la ville, mais pas seulement : "N'oublions pas tous ceux qui habitent en zone périurbaine et en zone rurale et subissent souvent les conditions de vie les plus dures du fait des difficultés de transport, de la désertification médicale, de la fermeture des services publics... Il faut que l'Etat se tourne prioritairement vers ces territoires."
Autre volonté affichée, celle d'"associer les corps intermédiaires – les collectivités locales, les partenaires sociaux, les associations, les ONG...". "Comme ancien maire de Nantes, je sais que le changement passe par la mise en mouvement de toute la société", a noté Jean-Marc Ayrault, choisissant le terme de "dialogue social et territorial". S'agissant de dialogue social, il aura évidemment été question de la Conférence sociale des 9 et 10 juillet, le Premier ministre en rappelant les grandes thématiques : emploi ("notamment l'emploi des jeunes", formation, développement des compétences, sécurisation des parcours professionnels, rémunérations, égalité hommes-femmes et qualité de vie au travail, protection sociale…).
En termes de "méthode", on saura que le chef du gouvernement prévoit "deux phases" pour son quinquennat, la première devant être consacrée aux "réformes de structure" : "rénovation de tous les outils permettant de renouer avec la compétitivité et l'emploi", réforme fiscale, jeunesse, décentralisation, "transition écologique et énergétique"…

Nouvelles recettes fiscales

S'arrêtant longuement, donc, sur le volet "comptes publics" au lendemain de la publication de l'audit de la Cour des comptes (dont le diagnostic, a-t-il assuré, n'est pas une surprise et "valide les mesures et les orientations" choisies), Jean-Marc Ayrault a d'abord évoqué la question des effectifs de l'Etat, confirmant le principe d'une "stabilité globale" et la priorité donnée aux champs de l'éducation, de la justice et de la sécurité. Ce qui "exigera des choix dans tous les autres secteurs". Mais ceci, "non pas en suivant une règle mathématique aveugle" mais en se fondant sur "une évaluation de l'efficacité des politiques menées". Chaque ministre devra présenter ses propres "propositions de réformes" en ce sens.
Coté dépenses toujours, une "loi de programmation des dépenses publiques" qui couvrira les cinq années de la législature viendra "tracer le chemin" jusqu'en 2017 à la fois "pour l'Etat, la sécurité sociale et les collectivités".
Coté rentrées d'argent, comme prévu, "de nouvelles recettes fiscales seront mobilisées"… Ou comment "solliciter d'abord ceux qui jusqu'ici ont été exonérés de l'effort collectif". En commençant par le projet de loi de finances rectificative (PLFR) qui doit etre présenté ce mercredi 4 juillet en Conseil des ministres. Ce texte "n'épuisera pas le sujet de la réforme fiscale mais sera une première étape", a souligné le Premier ministre. On y trouvera notamment des mesures sur la fiscalité des particuliers (ISF, successions, bouclier fiscal), la suppression de l'exonération des heures supplémentaires dans les entreprises de plus de 20 salariés, une contribution accrue des grandes entreprises "notamment bancaires et pétrolières"… et l'abrogation de la fameuse TVA sociale, en notant au passage que la TVA sur le livre et le spectacle vivant repassera bien à 5,5% contre 7% actuellement.
Il aura par ailleurs beaucoup été question de "redressement productif", ce nouveau vocable apparu à la faveur du ministère confié à Arnaud Montebourg et qui, a insisté le Premier ministre, implique "la mobilisation de tous les secteurs" pour "rompre avec la désindustrialisation". Le "plan de reconquête industrielle" annoncé à la mi-juin est confirmé, un "plan pour la filière automobile" est annoncé pour "ce mois-ci" et un "pacte national pour la croissance, la compétitivité et l'emploi" est évoqué. Autres éléments abordés : l'optique d'une "spécialisation sur les créneaux les plus porteurs" en prenant appui sur le Commissariat général à l'investissement, la création de la banque publique d'investissement "avant la fin de l'année, en liaison étroite avec les territoires, notamment les régions", la création du livret d'épargne industrie, la mise en place d'une "véritable diplomatie économique" en faveur du commerce extérieur… 

D'autres points évoqués par le Premier ministre

Logement
Rappel de l'objectif de construction de 500.000 logements, dont 150.000 logements sociaux ; "plan de mobilisation du foncier sans précédent" ("les terrains vacants de l'Etat seront mis à disposition gratuitement des collectivités pour permettre la réalisation de programmes de construction et d'aménagement urbain, respectueux de la mixité sociale") ; relèvement du plafond du livret A ; décret sur l'encadrement des loyers "dans les villes où les tensions sont les plus fortes" ; "plan ambitieux de performance thermique de l'habitat" ; renforcement de la loi SRU. Sur ce dernier point, Jean-Marc Ayrault a assuré que "les communes qui ne respectent pas leurs obligations en matière de logement social verront leurs pénalités multipliées par cinq".

Environnement
Conférence environnementale dès la rentrée "pour préparer le grand chantier de la transition énergétique et de la biodiversité" ; développement d'"une économie verte fondée sur l'innovation technologique" ; réforme du code minier ; "programme massif d'économies d'énergies" ; mise en place d'une "tarification progressive, avec un double objectif, social et écologique" pour le gaz puis pour l'électricité et l'eau.

Education
Concentration des efforts sur le primaire ; élaboration d'un "nouveau contrat éducatif" ; respect de l'engagement de 60.000 postes supplémentaires en cinq ans dont 1.000 dès la rentrée 2012 ; redéfinition des rythmes scolaires ; "nouvel élan donné à l'éducation prioritaire" ; recrutement de 1.500 AVS individuels.

Emploi des jeunes
Mise en place, "très rapidement", du contrat de génération ; création de 150.000 contrats d'avenir destinés en priorité aux jeunes sans qualification ; développement du service civique en lien avec le mouvement sportif et les acteurs de l'éducation populaire.

Lutte contre l'exclusion
Un "plan de lutte contre la grande pauvreté" sera "engagé sans tarder", sur la base d'une conférence organisée à l'automne avec les associations et les collectivités locales. Il n'est pas question de "stigmatiser les chômeurs, de considérer l'allocataire du RSA comme un fraudeur potentiel ou un feignant", a par ailleurs déclaré le chef du gouvernement

Culture
Une "loi d'orientation sur la création et le spectacle vivant" est annoncée pour 2013, ainsi qu'un "grand plan en faveur de l'éducation artistique et culturelle".

 

 

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