La moitié des jeunes ruraux ont quitté le cocon familial avant leurs 19 ans

Alors que trois quarts des jeunes décohabitent entre 17 et 26 ans, l’Insee observe de fortes différences selon le territoire d'origine. Les jeunes issus de communes rurales quittent massivement le foyer des parents avant 19 ans, le plus souvent pour poursuivre des études, quand les jeunes issus de zones urbaines denses tendent à retarder leur départ. Ces dynamiques territoriales posent de nouveaux enjeux en matière d'offre de logement étudiant, de mobilité et d'insertion.

À 17 ans, un quart des jeunes ruraux ont déjà quitté le domicile des parents, contre seulement 4% de ceux issus de l'urbain dense. L'écart s'accentue à 18 ans : 51% des jeunes ruraux sont déjà partis, contre 16% en milieu urbain dense. Ces départs précoces sont d'autant plus fréquents que la commune d'origine est isolée. Ils concernent tous les profils sociaux, "ce qui souligne le poids déterminant de la géographie dans le passage à l'âge adulte", estime l'Insee dans une étude statistique parue le 4 septembre 2025

Ces trajectoires s'accompagnent aussi de retours plus fréquents chez les parents : 51% des jeunes ruraux sont revenus au foyer au moins une fois avant 27 ans, contre 40% des jeunes de milieu urbain dense. L'itinéraire vers l'autonomie des jeunes ruraux se construit donc davantage par étapes, au gré des contraintes scolaires, financières et professionnelles.

Les études, principal déclencheur de décohabitation

Les études secondaires expliquent une part importante de ces départs précoces. Près d’un jeune rural sur trois (28%) a quitté la maison familiale durant cette période, le plus souvent pour rejoindre un internat ou une résidence étudiante. Ces jeunes suivent aussi plus souvent une formation professionnelle, dont l'offre est concentrée et impose parfois de longs déplacements. En comparaison, ils ne sont que 6% en zone urbaine dense à quitter la maison familiale durant cette période

Le baccalauréat et l'entrée dans l'enseignement supérieur marquent un second pic : 1 jeune sur 5 quitte le domicile parental à ce moment, mais avec de forts écarts entre les territoires. Dans les communes rurales, 26% franchissent le pas, contre 13% dans l'urbain dense. Cette différence tient au besoin de se rapprocher des pôles universitaires, quand les jeunes urbains peuvent plus souvent rester chez leurs parents en début d'études.

Enfin, un tiers des jeunes décohabitent après leurs études, à l'occasion d'un premier emploi (10%), d'une installation en couple (13%) ou dans un autre contexte (12%). Ces départs "tardifs" sont plus fréquents en zone urbaine dense qu'en milieu rural.

Des mobilités orientées vers les villes

Quitter le foyer parental signifie souvent changer de territoire. Les jeunes issus des campagnes rejoignent massivement les communes urbaines : 1 sur 2 s'installe en ville lors de sa première décohabitation, proportion qui grimpe à 83% quand celle-ci coïncide avec l'entrée dans le supérieur. Le phénomène reflète la concentration des établissements d'enseignement, mais aussi des bassins d'emploi.

Les mobilités sont moins systématiques lors d'un départ lié aux études secondaires (40%) ou au premier emploi (38%), mais elles participent toutes d'un mouvement structurel : l'accès à l'autonomie passe par l'attraction urbaine, renforçant la polarisation territoriale.

1 jeune urbain sur 6 vit encore chez ses parents à 26 ans

À l'autre bout du spectre, 1 jeune sur 6 issu de l'urbain dense vit encore chez ses parents à 26 ans, contre 10% en moyenne. Si cette cohabitation peut résulter de difficultés d'insertion (26% des jeunes concernés ne sont ni en emploi ni en études), elle reflète aussi des choix liés à la poursuite d'études ou aux conditions de logement. Dans ces territoires, 37% des jeunes restés au domicile familial à 26 ans sont diplômés du supérieur (bac+3 ou plus), contre 18% ailleurs.

Cette situation illustre une réalité paradoxale : l'urbain dense permet de rester plus longtemps dans un cadre familial tout en poursuivant études ou carrière, quand le rural oblige à partir tôt mais expose à des mobilités complexes et parfois réversibles. Pour les collectivités, ces dynamiques interrogent à la fois l'offre de logements étudiants (voir notre article du 4 septembre), les politiques de mobilité (voir notre article du 23 mai 2024) et les conditions d'insertion professionnelle (voir notre article du 4 septembre).

 

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